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L’expression « c’est
pas le moment » est savoureuse. On l’attend partout et pour
n’importe quoi. Chaque fois que l’on veut renvoyer aux calendes grecques une
activité ou la concrétisation d’une obligation que l’on sait être dans une
impossibilité d’évitement. Un jour ou l’autre, dans une semaine, un mois, une
année, inévitablement, on devra s’y consacrer, lui trouver la solution
adéquate.
C’est aussi une
formule que l’on retrouve dans les milieux du football de l’élite du football
professionnel, chaque fois que l’équipe est en situation de crise….financière
et ne peut donc assurer ses engagements envers d’abord les joueurs, puis envers
les tiers créanciers. Une façon très raccourcie et allusive de dire « vous
savez que nous pas les moyens. Nous vous payerons plus tard quand les
subventions seront rentrées. Faites nous confiance ! ». Alors
que la confiance n’est plus.
Un discours mimétique,
emprunté à d’autres sphères sociétales que le milieu sportif, qui permet
adroitement de faire taire les oppositions au nom de la cohésion sociale, de l’amour
des couleurs que l’on voudrait préserver lorsque les temps sont durs et que les
contradicteurs font pression.
Cette expression a été
entendue, lue à au moins deux reprises ces derniers temps. La première fois
dans la bouche d’Abdelkrim Raïssi, le PDG de la SSPA du MCA, lorsqu’un ancien
responsable du club (Kaci Saïd) décida de faire exécuter une décision de
justice qui lui était favorable. Sa décision fut ébruitée on ne sait par qui.
Cependant, l’ancien joueur international et ancien manager ayant déclaré qu’il
n’était pas à l’origine de la fuite (« je ne voulais pas que cette
affaire s’ébruite pour qu’elle paraisse dans la presse »), on peut
supposer à juste raison qu’elle le fut par la partie adverse.
Après avoir indiqué
que la question sera examinée par la justice, le président Raïssi déclara à la
presse que, cela est fort suggestif, « de toute façon, je pense que ce
n’est pas le moment de faire un tel manège». Certains journalistes
embarqués se sont engouffrés dans la voie ainsi ouverte en écrivant que le timing
choisi (par Kaci Saïd ? Ou par l’auteur de la fuite) n’était pas le plus
opportun car l’équipe préparait alors une rencontre très importante pour l’avenir
du club algérois face au CRB. Comme si cela ne suffisait pas, notre confrère
écrivit « d’ailleurs, pour beaucoup, cette affaire
n’avait pas lieu d’être à ce moment précis de la saison ».
C’est à peu de choses
près la même argumentation qui fut proposée lorsque Omar Ghrib (un ancien
président déchu du MCA, radié du mouvement sportif national pour avoir pris
maladroitement la défense des intérêts du club) fit valoir ses droits à être
payer pour ce qui lui était du. Le moment n’étant pas adéquat (difficultés de
trésorerie et crise de résultats, etc. obligent), le débiteur (détenteur, a-t-on
dit, d’une reconnaissance de dettes établie dans les règles de l’art) obtint
gain de cause auprès des tribunaux. Les dirigeants mouloudéens étant restés
sourd à la requête, Ghrib fit bloquer les comptes de la SSPA l’obligeant par ce
moyen à payer instamment plus de 7 milliards de centimes pour que la SSPA
puisse retrouver sa liberté de manœuvre et d’exercer les pressions avec une
certaine efficacité (spécialité des clubs en difficulté) sur leurs joueurs.
Si ces atermoiements
ou pratiques dilatoires sont (dans une certaine mesure) compréhensibles de la
part des dirigeants ou de supporters, elles ne le sont guère du point de vue
d’un ancien joueur. Pourtant, ce fut la voie choisie par Ismail Gana, ancien
joueur et capitaine du NAHD qui, après avoir convenu qu’il est « inconcevable
qu’un club comme le NAHD rétrograde trois fois en cinq ans » ,
fustigea ses successeurs en déclarant , qui plus est à la télévision, que
« les joueurs n’avaient pas raison lorsqu’ils ont demandé l’argent en
cette période délicate du championnat ». Après les avoir accusés
d’être à l’origine de la situation catastrophique, il ajoutera, en substance
que les questions gênantes pourraient être soulevées à un autre moment, plus tard au nom de « l’union sacrée pour essayer de
sauver le club de la relégation ».
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