La politique de démocratisation de l’enseignement a permis à
la fois le développement du mouvement sportif scolaire et la création de clubs
(associations sportives communales et associations sportives de performance)
puisant dans les viviers du sport scolaire. Les flux de la progression scolaire
et de la migration sportive qui va de pair sont reflétés par les équations
suivantes (très grossières esquissées et très rarement réalisées) :
collèges-ASC-daïras, lycées-ASP (ou associations sportives-leader)-wilayas.
Une analyse plus sérieuse montre sans équivoque que ces
cartes s’adaptent à la réalité du terrain en tenant compte d’autres paramètres tels que par exemple la
carte des transports routiers, des relations commerciales interurbains et des
bassins d’emploi.
Pour ce qui concerne Hassiba, ce schéma, devenu commun, ne
peut être appliqué en l’état. Athlète de performance, elle est intégrée dans
une ASP algéroise (le CRB) qui - tout en lui assurant (en principe) une
reconversion professionnelle (en fonction de ses compétences) à l’issue de sa
carrière sportive - lui permet de pratiquer son sport dans des conditions
proches d’un professionnalisme (ne disant pas son nom) qui est celui mis en
place par l’Etat algérien.
A ce titre, elle bénéficie des multiples avantages prévus
par la réglementation en vigueur à l’époque (temps de travail aménagé en
fonction du programme d’entraînement, congés spéciaux rémunérés d’athlètes
permettant l’absence au poste de travail pour participation à des stages de
préparations et aux compétitions nationales et internationales). En rejoignant
Alger, Hassiba n’a pas changé de club. Elle a seulement changé d’entraîneur.
Elle est passée d’un entraîneur aux compétences avérées à un entraîneur n’ayant
pas fait ses preuves mais disposant des moyens et du soutien de la fédération.
Comme Hassiba, de nombreux athlètes constantinois (et
d’ailleurs), ont emprunté la voie de l’exil sportif pour la même raison :
améliorer leur vie socio-professionnelle via la pratique sportive de haute
performance. Elle est la seule qui ait vraiment réussi. L’exploitation de sa
notoriété sportive (ses titres de championnes du monde et olympiques, sa
ténacité, sa rage de vaincre), ses gains (primes, bonus), les privilèges (logement,
classement par décret dans la nomenclature des emplois du secteur au rang de
conseiller des sports) l’ont extirpé des difficultés sociales dans lesquelles
sont restés englués ceux (et surtout celles, nombreuses en particulier dans le
giron de Mahour Bacha) qui ont cru au mirage et n’ont pas su préparer une
véritable reconversion. Chacun pourra recenser, dans son environnement proche
(à Tlemcen, Guelma, Skikda, etc.) les nombreux échecs. Pour notre part, nous ne
citerons que quelques-uns.
Nous commencerons par Amel Boudjelti (rivale de Hassiba sur
400-800) qui - après avoir été « casée » comme femme de
ménage dans un établissement hospitalier grâce aux efforts de membres de la
ligue de Constantine (plus exactement d’un « officiel » de la ligue) –
occupait (à notre dernière rencontre, il y a trois ou quatre ans), avec un
diplôme en dessin industriel, le poste de lingère dans le même établissement.
Les instances sportives (DJS, MJS, FAA) sont restées sourdes, s’était-elle
alors plainte, à ses multiples appels à l’aide. Ce sont les
avanies qu’auraient connues Hassiba si (comme Amel) elle était restée à
Constantine et surtout elle n’avait pas connue la réussite sportive.
Nora Hassani (une athlète d’Alger de la même période
1990-1996), spécialiste des haies (100 et 400), divorcée (comme Amel Boudjelti)
a longtemps vécu (avec ses enfants) dans un conteneur.
Kamel Zemouli, un des tous premiers Algériens à atteindre un
niveau international (continental) intéressant sur 400 mètres haies, se
retrouva (lorsque sa carrière eut pris fin) à exercer la fonction de chauffeur
de taxi et impliquer dans la tourmente islamiste du début des années 90.
Saliha Djeblahi (que nous avons déjà signalée) aurait dû
succéder à Yasmina Azzizi (tout en brillant au 100 mètres haies ou au saut en
longueur). Elle aussi quitta le groupe d’athlètes entraînées par Labed pour
rejoindre le groupe de Mahour Bacha. Elle était encore jeune (junior)
lorsqu’elle fut sanctionnée pour avoir commis une de ces fautes que commettent
les jeunes venus des quartiers défavorisés lorsqu’ils se trouvent à l’étranger
(presque sans moyens, elle était en stage avec l’’équipe nationale) les yeux
écarquillés, éblouis par la profusion d’articles introuvables sur les étals de
chez nous. Nous sommes vers 1992, un
période de grandes pénuries, de difficultés de tout ordre, la fin du PAP (Plan
anti-pénurie et le début PAS (Plan d’ajustement
structurel).
Notons que pour un écart somme toute véniel et
compréhensible (compte tenu des circonstances atténuantes citées), les
dirigeants de l’athlétisme la renvoyèrent à sa misère originelle alors que, à
titre de simple comparaison (Mahour Bacha vient de la confirmer dans sa
dernière conférence de presse), Larbi Bourraâda (pris dopé dans un contrôle à
l’étranger et de ce fait médiatisé. Nous croyons fermement qu’au pays son cas
aurait été dissimulé) a bénéficié du soutien matériel et logistique des
institutions sportives nationales (FAA et COA), en infraction à l’éthique et à
la réglementation en matière de dopage, pendant la période de suspension.
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