samedi 8 octobre 2016

Polémiques (28), Dans les couloirs de l’hôtel Expo

Le meeting s’était terminé tard. Il avait été suivi par une réception donnée par les organisateurs, à l’intention des athlètes, entraîneurs, dirigeants internationaux (président de l’IAAF, Primo Nebiolo) et invités (le prince héritier du Royaume d’Espagne et son épouse) et les journalistes, dans une salle de sports donnant à  la « Coupole » et à la « salle Harcha » la dimension d’une salle omnisports de proximité comme on voit tant dans les villes de l’intérieur du pays.
Après cette réception et le retour à l’hôtel, nous nous offrîmes une balade pédestre nocturne dans les rues de Barcelone. En agréable compagnie, celle d’Azzedine Brahmi (médaillé de bronze aux 3000 mètre steeple de Tokyo) appartenant au « groupe Bouras », du Marocain Moulay Brahim Boutayeb (champion olympique du 10 000 mètres à Séoul 1988 et médaillé de bronze du 5000 mètres des championnats du monde de Tokyo 1991) et Mohamed Salem (entraîneur national de demi-fond de l’équipe nationale algérienne junior, celles des Azaïdj, Kohil, Gatte, Zoghmar, Benzaï, Hadef et Menaï, etc.) qui, ce soir-là, nous démontrèrent, que la compétition étant achevée, les champions pouvaient se conduire en êtres humains à la recherche de plaisirs de courte durée et se comporter en gais lurons, en jeunes adultes libérés des contraintes de l’internat ou de la caserne.
C’est au retour de cette promenade que nous rencontrâmes Amar Brahmia dans les couloirs de l’ «Hôtel Expo », sortant d’une chambre pour se rendre à l’ « Hôtel Princès Sophia » où devaient se trouver les frères Morceli. Il devait être deux heures du matin.
Il paraissait  satisfait de lui et nous dit : « Noureddine dort après avoir remporté la victoire. Je viens de faire ma part de travail ». Une façon de dire qu’il existait comme une sorte de répartition des tâches. L’un (Morceli) courant sur la piste et l’autre (Brahmia) de bureau en bureau et dans les couloirs d’hôtels ou d’administration ou accroché au téléphone. Une véritable énigme pour nous que cette présence et cette sentence.  
D’abord sa présence à l’ « Hôtel Expo » qui nous semblait à tout point de vue incongrue et cette phrase. Il nous expliqua qu’il venait de récupérer la prime de Morceli et que sa mission de manager pour cette compétition venait de s’achever pour le mieux. Nous n’eûmes même pas besoin de lui demander des explications qu’il sortit de son porte-documents le chèque que l’argentier du meeting (installé dans une des chambres, celle dont il venait de sortir) venait de lui remettre. Alors que rien ne l’obligeait, en tentant de cacher, avec son pouce, le montant (proche de 1 suivi de cinq zéros), il nous montra le nom du bénéficiaire : « Noureddine Morceli ». Dans son esprit, le plus important était de dissimuler le montant. Un montant que la documentation remise par le comité d’organisation lors de l’accréditation permettait de reconstituer.
En grande partie seulement. La prime de participation nous était inconnue et ne pouvait être indiquée dans les prospectus. Il suffisait simplement d’additionner la prime de victoire, la prime de performance (en fonction du chrono réalisé) et la prime de classement au Grand Prix pour nous rapprocher de la somme inscrite sur le chèque.
Rentré à Constantine, sur la base des données en notre possession grâce à ce déplacement éreintant jusqu’à Barcelone, nous avions pu déterminer qu’avec les primes et bonus du championnat du monde (IAAF et sponsors), le jeune (21 ans) Noureddine Morceli avait encaissé près d’un million de dollars.
De quoi attisé les convoitises et alimenté sans fin les discussions. Par cette rencontre imprévue, Amar Brahmia, dont la réactivité est réputée, avait le sentiment d’avoir prouvé, à un élément neutre ou du moins pas impliqué dans les magouilles du stade annexe, sa bonne foi. Sauf qu’Amar Brahmia ne savait pas que nous connaissions la notion d’ « endossement de chèque » qui permet à un tiers d’encaisser le montant d’un chèque.

Ceci étant, il est possible de comprendre que, compte tenu du niveau des compétitions aux quelles prenaient part Noureddine Morceli, le règlement du défraiement devait s’effectuer essentiellement grâce à cet instrument de paiement.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire