Comme tout acte de parole (au sens saussurien de la notion incluant
les formes orale et écrite que peuvent revêtir les actes langagiers), la
chronique est soumise aux effets du prisme (éclairant et déformant) situé au
cœur de la thèse jungienne de la « perception-projection ».
Cette thèse qui, quels que soient les efforts de dissimulation consentis
par le locuteur, montrerait que l’acte langagier ne peut que se parer des
marques de l’inconscient perceptibles dans la subjectivité qui s’afficherait
aux regards.
Selon Jung, ces indicateurs à rechercher seraient le produit de deux Inconscients :
un « Inconscient individuel », déjà décrypté et mis en
valeur par la psychanalyse freudienne et ses disciples, et un « Inconscient
collectif » exhibant ce que, en tant qu’individu, on retient du
monde environnant ou (c’est l’autre facette du prisme) le regard que l’on porte
sur son environnement.
Cette subjectivité (marque de l’individualité) serait incluse - selon les linguistes de la seconde
moitié du XXème siècle, appartenant aussi bien à l’école structurale qu’à leurs
confrères nourris aux conceptions de la praxèmatique, une sociolinguistique inspirée
par la dialectique marxiste - dans les influences psychosociologiques (et autres)
subies par chaque locuteur en position d’auteur ou de lecteur.
Elle est contenue dans le concept d’ « énonciation »
qui, à la suite de C. Kerbrat-Orechioni, précédée par Martinet et Benveniste,
enrichit d’abord le « schéma de la communication » de
Roman Jakobson et lui accole l’expression, popularisée depuis lors, de « subjectivité
dans le langage ».
Cette subjectivité, cette énonciation doctrinalement assumée, est la
raison essentielle qui fait que, « Sous l’olivier »,
prise de parole individuelle, ne postule pas à la prétendue exhaustivité et
objectivité de l’information derrière laquelle se réfugient les « techniciens »
du journalisme et les débatteurs politique n’en détenant, malgré leurs
rodomontades et prétentions hautaines, qu’une partie infime. Celle que les
faits bruts, masqués par les techniques d’écriture journalistique, restituables
par celles de l’analyse du discours, semblent leur concéder.
Il faut comprendre par-là que la chronique met en scène (comme le font
d’ailleurs, à un degré moindre, les autres formes d’articles) un récit
journalistique disposant de sa totale puissance subjective.
La chronique n’est pas une fin. Logiquement, elle suscite d’autres
développements, d’autres traitements rédactionnels (d’une variété infinie à
l’aune du nombre de lecteurs dotés des capacités intellectuelles pour les
agencer dans un autre récit informationnel) sont incontestablement possibles
pour ceux qui ont à disposition des informations supplémentaires et/ou
complémentaires (qui trop souvent ne peuvent accéder à la surface, prendre place sur les ondes, les écrans de télévision
ou sur les pages de la presse écrite) souvent plus complètes que celles qui
nous parviennent via les colonnes des mass-médias ou par la voie des rumeurs.
La notion de « rumeurs », exécrée par le
jdanovisme ambiant à la fois désuet et vivace, doit aussi être explicitée. Dans
notre discours, il n’est pas (il n’a pas été et ne sera pas) question de
racontars colportés par la vox populi répétant à l’infini une information dont
la validité, la traçabilité et la qualité se sont altérées au fil du temps et
des relais de transmissions apportant chacun une interprétation-trahison.
Une information qui, en fin de parcours, par une dissémination
massive, non contrôlée après son émission se transforme en une légende urbaine,
un mythe des temps contemporains qui n’envient rien au monstre du loch Ness ou
au triangle des Bermudes.
Il s’agit essentiellement d’informations vraies, transmises le plus
souvent « of record » (selon l’expression consacrée par
les discours sur les médias pour signaler une information qui n’est pas
destinée à la publication dans les formes habituellement requises par la
déontologie) par un « informateur ».
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