Le jeune Ali Saïdi-Sief semble avoir possédé
l’esprit aventureux qui caractérise les adolescents. Surtout les jeunes
Algériens dont les horizons sont perçus (à tort ou à raison) bouchés et qui
sont mis en situation, par une société de plus en plus fermée imposant des
tabous numériquement plus nombreux, de connaître des frustrations diverses.
Cette absence de projections sur un avenir
serein, plus ou moins en phase avec les dimensions sociétales et humaines véhiculées par les chaînes de télévision
satellitaires mais également en contradiction profonde avec les « traditions »
nouvellement ancrées dans une société
progressivement transformée par l’importation d’une conception éducationnelle,
pédagogique et religieuse amène à faire naître dans les esprits et à
concrétiser la pensée de ce qui deviendra le « brûlage des frontières »
lorsque les conditions de le faire en toute légalité sont présentes. La
migration clandestine dominante présentement n’est pas encore à l’ordre du
jour.
Nous avons cru comprendre, dans un des récits
du vice-champion olympique du 5 000 mètres racontant ses premiers pas, qu’Ali Saïdi-Sief a possiblement fait partie
de l'équipée ratée de Miloud Abaoub. Etrangement, seul le nom de ce dernier a été retenu par la petite histoire. Une
histoire narrée par les responsables du sport scolaire de l’époque et, en
premier lieu, par les responsables de la délégation (désireux vraisemblablement
de se dédouaner vis-à-vis et auprès des
autorités qui auraient préféré le black-out médiatique) qui firent que celui-ci
fut désigné en tant que fugueur en chef, le porte-flambeau de l’escapade.
Certainement parce qu’il venait de conquérir un
renom certain avec le titre de champion du monde scolaire du 3 000 mètres
et que l’information, en raison de cette particularité, avait plus de
retentissement médiatique. Ce fut l’association du titre de champion du monde
et de la fugue collective qui donna un éclat particulier à ces deux
informations qui, en d’autres circonstances, seraient passées totalement
inaperçues. Le sport scolaire n’était (et n’est toujours) pas aussi porteur,
qu’il aurait dû l’être dans la perception du développement de beaucoup
d’éducateurs. Il était pourtant, il nous faut le reconnaître, structurant.
Retenons aussi qu’en ce temps-là, l’IAAF n’organisait
pas de championnats du monde U 18. L’IIAF
était encore « fédération
internationale d’athlétisme amateur » et perdra
quelques années plus tard la qualification « amateur » en
devenant « fédération
internationale des associations d’athlétisme ». Elle entérinait ainsi l’entrée du dollar et de
l’euro dans cet univers qui longtemps avait conservé, comme marqueur social et
discriminatoire inaltérable de son fonctionnement, l’absence visible et
illusoire des récompenses monétaires).
En sa qualité de champion du monde scolaire du
3 000 m, Abaoub était donc un virtuel champion du monde cadet. Ce qui
rehausse la participation et le statut initial d’Ali Saïdi-Sief affirmant
aujourd’hui qu’il fut champion d’Algérie du 1 500. Sans préciser si ce fut sous
la tutelle du sport scolaire ou de la fédération dite civile.
Observons ici l’inversion des trajectoires. Cette inversion réside dans la disproportion (ou l’absence, dans la phase
initiale de leurs carrières sportives) des moyens accordés à l’évolution
régulière des carrières, de leurs
progressions.
Abaoub et Saïdi-Sief ont toutefois en commun
d’être engagés dans le même processus de production de champions qu’a été
le binôme sport scolaire et sport civil.
Il reste à élucider, pour ceux qui vécurent,
(ou voudraient retracer) cette période, leurs participations à l’instrument de
base de la détection des coureurs à pieds que furent, à différents moments de
l’histoire : « le
cross du Parti », « le cross du Parti et des
APC » puis, dans la dernière
livrée (à partir de 1990), du « cross de la Jeunesse ».
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