lundi 13 juin 2016

Dans le rétro (5), Contamination ou machination ?


P
endant l’été 2012, Zahra Bouras, effondrée par sa mésaventure, suit les jeux olympiques de Londres à la télévision. Quelques semaines plus tôt, alors qu’elle s’apprêtait à disputer le 800 mètres des championnats d’Afrique, elle a été suspendue provisoirement à la suite d’un double contrôle antidopage positif. La durée de la suspension n’est pas encore connue mais elle sait qu’elle sera comprise entre une et deux annnées. Elle écopera d’une suspension de deux années qui prend effet à compter de la mi-juin 2012.
Nombreux sont ceux qui entre athlètes, entraîneurs, officiels, médias et grand public s’interrogent sur ce que l’avenir lui réserve. Sur son avenir sportif. En effet,  depuis, la fin de carrière de Hassiba Boulmerka, elle est celle que l’on voit lui succéder. Au cours de 20 dernières années, elle a été la seule Algérienne à faire mieux que 2 minutes au 800. La seule à se mêler à la meute de jeunes femmes avides de se faire un nom sur la distance, à rivaliser avec les demoiselles du Kenya, de Russie et autres grandes nations du demi-fond féminin. Un exploit attribué à l’association Amar Bouras-Ahmed Mahour Bacha, les entraîneurs terribles, les pivots de l’athlétisme algérien. Un exploit entaché maintenant par ce contrôle positif qui remet tout en cause. Un contrôle qui crée le doute dans l’esprit de ceux qui furent leurs partisans et qui également renforce les déclarations de ceux qui les dénonçaient pour leur mainmise sur l’athlétisme national.
Aux journalistes lui demandant si elle va continuer sa carrière, elle répond catégoriquement qu’elle ne peut pas « arrêter après ce qui vient de m'arriver ». Les motivations de cette décision qui n’est, au moment où elle faite dans la presse, qu’une annonce médiatique sont multiples. La première est qu’elle a fait de son retour sur les pistes, un « défi personnel ». Ensuite, arrêter sa carrière sur cette fausse note serait « comme reconnaître l'accusation qui est portée contre moi »  alors qu’elle se dit innocente. Poursuivre sa carrière, c’est aussi engager une forme de combat destinée à démontrer qu’elle a été dopée à son insu, que cet acte répréhensible de tricherie à l’éthique n’a pas été volontaire, délibéré.
 Alors qu’elle est à l’arrêt, elle annonce qu’elle va reprendre l’entraînement pour préparer cette reprise qui n’interviendra, du moins elle le suppose, alors que la décision des instances disciplinaires n’est pas encore connue, que dans deux années. Elle a déjà élaboré un programme de préparation pour gérer cette période pendant laquelle elle doit affronter le regard des autres. Elle est forte de certitudes. Elle sait ainsi, que quel que soit le résultat des analyses à venir, celles qui portent sur ce que la procédure appelle l’échantillon B, sa réputation est souillée. Elle est consciente qu’avec le contrôle positif « le mal est fait » et qu’elle doit « apprendre à vivre avec une faute que je n'ai pas commise ».
Elle pressent que le plus dur est à venir et que la société sera impitoyable. Elle affirme sans détours que « le système va m'enfermer dans la case des "athlètes dopés"». Elle se voit en paria. En ce début du mois d’août 2012, se projetant dans l’avenir, elle comprend aussi et déjà que ses « prochaines victoires seront l'objet de discussions ». Une appréciation qui, de son point de vue, indiquait qu’à sa reprise, ses courses ne peuvent être que victorieuses. Victoire sur elle-même, sur ses adversaires et en particulier de la part de tous ceux qui se sont réjouis de ce qui lui est arrivé, de ce qui, à ce moment-là, est pour elle une contamination ou pire encore une machination d’« une main étrangère qui avait rajouté le Stanozolol dans l'injection ».
Zahra est cependant dans l’erreur. Les gens  ne se réjouissent pas de sa mauvaise passe mais plutôt des effets que sa suspension pour dopage a, parmi les plus irréductibles adversaires de son père et de son ex-entraîneur, sur leurs notoriétés.





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