mercredi 7 septembre 2016

Polémiques (9), Bouras, la duplicité incarnée


Nous étions installés dans le hall d’entrée de l’ «hôtel Expo », à proximité de la gare centrale de Barcelone, tout près d’une bouche de métro, le quartier général de l’organisation de la finale du « grand Prix IAAF-Mobil ». Nous venions à peine de terminer une discussion féconde avec Saïd Aouita. Nous  attendions les athlètes  et entraîneurs algériens qui devaient participer à cette finale (Boulmerka, Morceli et Brahmi) lorsqu’un groupe des personnes attendues, celui que l’on considérait comme étant le « groupe Bouras », (une réduction qui marquait aussi l’opposition avec le « groupe Brahmia ») c’est à dire Amar Bouras en personne, Hassiba Boulmerka et Azzedine Brahmi (médaillé de bronze du 3 000 mètres steeple) accompagnés d’une quatrième personne qui nous était inconnue. Une personne que Bouras nous  présenta comme étant le manager de Hassiba, l’Italien Enrico Dionisi.
Arrêtons-nous un instant sur une situation aberrante devant nous donner à réfléchir. Azzedine Brahmi fut un des héros des championnats du monde de Tokyo.  Sa performance dans une épreuve dominée par les Kenyans est passée presque inaperçue. Elle fut du moins éclipsée par l’éclat des médailles de vermeil de Hassiba et Noureddine, les premières à un tel niveau de compétition remportées par des athlètes algérien. Que dire alors de deux médailles, sur la même distance, à quelques heures d’intervalle. La folie dans tous les pays.  L’abondance ne nuisant pas, alors que pendant des années les résultats n’avaient pas suivi, Azzedine n’existait presque pas aux yeux du public.
Pensons aussi, le temps de cligner des cils, à ce que dû ressentir Yasmina Azzizi, cinquième de l’heptathlon (l’épreuve féminine correspondant au décathlon masculin), en voyant l’accueil triomphal réservé à Larbi Bourraâda à son retour de Rio). Imaginons un seul instant l’importance qu’auraient pris ces deux résultats (la médaille de bronze de Brahmi et la 5ème place de Yasmina Azzizi, alors complétement inconnue à ce niveau de compétition) en d’autres circonstances comme celles des temps actuels qui, en l’absence de médailles, fait d’une cinquième place un exploit alors que les dirigeants prédisaient pour cet athlète (qui s’est déjà classé 5ème aux championnats du monde) une médaille.
Autres temps, autres mœurs, dit-on. L’espace médiatique s’est élargi se nourrissant de ce sensationnel qui recherche l’exception dans ce qui devrait être la norme. Une place de finaliste obtenue par un tricheur (n’a-t-il pas été suspendu pendant deux ans ?) ayant bénéficié du soutien total des pouvoirs publics (y compris pendant la période où il aurait dû être en marge) est cent fois mieux valorisé que celles de ses pairs (les médaillés et les finalistes d’hier et d’avant-hier). La populace est versatile et s’identifie à ce qu’on lui offre.
Les présentations faites, le groupe (Bouras, Hassiba et Azzedine) s’éclipsa pour se rendre au stade (me laissa-t-on entendre pour une reconnaissance des lieux et une séance d’entrainement) me laissant seul avec Dionisi qui, selon Bouras, aurait aimé discuté avec moi. Cela tombait bien puisque nous aussi nous étions intéressé d’aborder avec lui le sujet touchant à la fonction de manager d’athlètes de haut niveau  qu’Amar Brahmia avait introduite en Algérie avec la prise en charge des intérêts de Noureddine Morceli. Une activité qui alimentait les débats. Un regard étranger était le bienvenu.
La question ne fut jamais abordée. Dionisi me laissa sur ma faim.  A peine assis, Dionisi attaqua tête baissée le sujet qui le tenaillait. Le sujet sur lequel l’avait branché certainement quelques instants plutôt Amar Bouras. J’avais vu le quatuor sortir de l’ascenseur. Je l’avais vu s’arrêter quelques minutes, discuter âprement en me regardant discrètement puis reprendre son chemin vers la sortie et obligatoirement vers nous qui étions idéalement placé sur leur chemin, sur le seul passage direct vers l’extérieur. Ce qui leur tenait à cœur (Dionisi n’étant qu’un intermédiaire) était le « fameux » entrefilet, la mutation (finalement avortée) de Hassiba vers le MPA.
Au bout de quelques minutes, le temps de comprendre le pourquoi de l’agressivité verbale, d’un discours en un français plus qu’approximatif qui aurait fait honte à n’importe quel lycéen moyen d’Alger, nous arrêtâmes son flot de paroles saccadées. Nous lui  dîmes, alors qu’il venait de nous menacer d’une action en justice : « Vous avez lu l’article ? Vous l’avez compris ? Non. Amar vient de vous en parler. Lisez-le. Déposez votre plainte où vous voulez. Demandez aussi à Amar de vous apprendre l’intérêt du mode conditionnel dans la langue française. Mais, sachez bien que vous perdrez votre procès et que je demanderai un million de dollars pour préjudice moral». Entendant le montant d’un million de dollars ou peut être aussi en raison d’une réaction à laquelle il ne s’attendait pas (tous les Algériens ne sont-ils pas, dans son esprit, la copie conforme de Bouras ?), il se leva et parti. Nous le retrouvâmes le lendemain au stade olympique. Sns qu’un mot ne soit prononcé.

Nous n’avons plus entendu parler de lui ni parlé à Amar Bouras. Sauf, pour ce qui concerne ce dernier, en deux occasions. La première (dans les semaines qui suivirent Barcelone) lorsque nous l’appelâmes au téléphone pour demander son autorisation de communiquer son numéro de téléphone ou celui de Hassiba à des journalistes français (VO2 Magazine) qui souhaitaient  interviewer la surprenante championne du monde. La seconde, il y deux ou trois ans au « semi-marathon  Chihani Bachir » du Khroub.

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