jeudi 5 avril 2018

Ali Saidi Sief (20), Les gorges du Rémis


La citadelle, perchée sur son rocher surplombant la vallée de l’Oued Rhumel et Hamma-Bouziane qui fut autrefois une immense étendue de jardins (aujourd’hui détruite, recouverte par les poussières émanant des cheminées de la gigantesque cimenterie dominant la plaine), méconnait l’histoire qui regorge pourtant de faits similaires à ceux accolés à la Rome antique.

De plus, ces méfaits contrastent indéniablement avec la délicatesse et la préciosité culturelle et civilisationnelle que l’Histoire s’accorde à attribuer aux harems dont se sont dotés les occupants sanguinaires venus de Constantinople et les demeures bâties sur le modèle rapporté d’Andalousie par les réfugiés morisques.

Des récits proposent la geste tragique de courtisans de la cour beylicale jetés (après un transport par les souterrains joignant le Palais aux précipices) dans le Rémis (« les gorges de l’Oued Rhumel » dans l’expression dialectale locale forgée au début du 20ème siècle) pour avoir déplu, par les actes ou par les paroles, au seigneur Bey de Constantine, féal du Dey d’Alger, vassal du Sultan de la Porte Sublime.

Comme cela fut souvent le cas dans le milieu de l’athlétisme algérien, la carrière sportive d’Ali Saïdi-Sief ne tint à presque rien, à un fil. Elle fut le produit de concours de circonstances, d’enchaînements factuels qui, selon les époques, furent bénéfiques ou maléfiques. Ali Saïdi-Sief connut les deux variantes. 
Au milieu de la décennie 90, Ali Saidi-Sief, le futur médaillé d’argent du 5 000 des jeux olympiques de Sidney (2000) avant d’être, une année plus tard, le premier athlète Algérien reconnu internationalement pour avoir été suspendu en raison de faits de dopage, était un illustre inconnu y compris dans son village natal.

L’athlétisme y était émergeant, quasiment inexistant en terme de performances de premier plan. Il faudrait en vérité percevoir la première discipline olympique en termes de course à pied elle-même limitée, comme dans tant de villages et de petites villes de l’ « Algérie profonde », à des compétitions de courses sur route organisées le plus souvent dans les rues des villages et des villes.

Des organisations mises sur pied le plus souvent, en ces localités retirées, par les enseignants d’EPS dans le cadre du sport scolaire et par les autorités locales, contraintes de se plier aux injonctions péremptoires et autres résolutions coercitives des instances supérieure du Parti unique et de l’Administration. Il fallait en passer par là afin de préserver et de booster leurs carrières administratives et politiques. Déjà à cette époque, l’ascension sociale était impulsée par le carriérisme politico-administratif, l’alliance entre le Parti et l’Administration.

Ces compétitions  étaient organisées à l’occasion des phases du  « cross du Parti et des APC » et par la suite (à partir de 1990, le parti unique n’étant plus en odeur de sainteté avec l’avènement du multipartisme) du « Cross de la Jeunesse ».

Par bonheur, un club naitra à Hamma-Bouziane. Il rejoignit la modeste dizaine de clubs de la ligue constantinoise d’athlétisme dont l’étendue, au fil des bouleversements imposés par les découpages administratifs successifs, s’est rétrécie comme une peau de chagrin dès avant le recouvrement de la souveraineté nationale et la fin, par redécoupage administratif successif, du département de Constantine, l’une des trois entités administratives de l’Algérie coloniale.

A Hamma-Bouziane, comme partout ailleurs, la naissance du club fut portée par d’anciens athlètes convertis en techniciens supérieurs des sports. Le but était d’éviter aux adolescents de la bourgade les déplacements, longs, fastidieux et coûteux alors, sur Constantine, de leurs procurer une activité sur place, à domicile. Au-delà de ce prétexte louable, il y avait l’ambition de démontrer que les talents y existaient mais qu’ils ne disposaient pas de l’exposition nécessaire, étouffée qu’elle était par l’emprise des entraineurs et des clubs constantinois.

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