dimanche 25 novembre 2018

Ali Saidi-Sief (54), Pensée pour Zine El Abidine


Pendant ce semestre de transition, sur le plan de l’accompagnement technique, Yahia Azaidj a été écartelé, comme peut l’être un jouet que de grands enfants se disputent, entre les programmes de préparation concoctés les entraineurs nationaux (Mohamed Salem, entraîneur de l’EN junior de cross-country et de demi-fond fut l’un d’eux) et par les entraîneurs rémunérés par le MCA.

Il était également partagé entre les objectifs (devenus secondaires) du club de Ksar El Bokhari, évincé et confiné au simple rang de façade administrative, et ceux du MCA et de la fédération qui, au début de la décennie 1990, se percevait plus comme un opérateur et non tel un régulateur. La compréhension des textes réglementaires en vigueur à l’époque aidant avait fait  d’elle, en accord avec la vision du centralisme démocratique hérité du Parti Unique et du jacobinisme légué par le colonialisme,  un super  club réceptacle ultime de l’élite nationale.

Il fait partie de la nature de l’athlétisme, ou plutôt de la politique sportive telle que perçue par les entraîneurs en mal de notoriété ou désireux de la conserver, sous l’impulsion d’une politique plus libérale, de se disputer les jeunes talents émergents.

Nous avons vu que l’encadrement administratif d’Ali Saidi-Sief fut stable. Comme ce fut le cas pour Azaidj et tous ceux qui firent partie de l’association sportive pétrolière. Ayons en permanence à l’esprit que celle-ci est adossée à la plus importante entreprise économique et industrielle, le pis nourricier du pays. Toutefois, des informations tardives (les langues ont tardé à se délier) laissent à croire que tout ne fut pas toujours rose, aussi limpide que ce qui a été raconté dans les chaumières et dans les cénacles sportifs.

Aïssa Belaout a narré sur les réseaux sociaux les mésaventures qu’il a rencontrées lors de la fin de son parcours avec le Mouloudia et ceux (entraîneurs, manager, etc.) avec qui il était en contact. C’est au cours de cette période que semble avoir débuté la fragilité que connue Ali Saïdi-Sief.

Le temps passé, se comptant maintenant en décennies, n’efface pas toujours les ressentiments et les frictions d’hier. Il se dit aujourd’hui, dans cet univers que l’on ne voit qu’à travers le prisme déformant  des grands moments de la fabuleuse décennie athlétique (1990-2000), que les rapports entre les individus, plus particulièrement entre les membres du couple de base que sont les athlètes et leurs entraîneurs, ne furent pas toujours aussi harmonieux que ce que l’on peut entrevoir lorsqu’on est à distance ou lorsque les résultats sont présents et sont exposés « à la  Une » des journaux télévisés. Ce qui a pour conséquence d’attiser de toute évidence les convoitises naissantes.

La décennie 1990 a enregistré l’essentiel des titres et médailles mondiales et olympiques attribuées aux athlètes algériens. Boulmerka, Morceli, Merah-Benida, Hammad, Saïd-Guerni, Saïdi-Sief sont synonymes de moments de joie populaire.

Cette séquence temporelle de joies éphémères tranche paradoxalement avec le contexte de la décennie sanglante. Les victoires sportives, les plus belles qu’ait connues l’Histoire de l’athlétisme, furent le seul et unique rempart immatériel au sentiment de terreur que l’Algérie eut à connaitre. Un rempart qui transcendait les hommes (et les femmes) debout.

Les sportifs de haut niveau, mis dans un cocon quasi-imperméable aux effets et méfaits de la vie quotidienne, étaient perçus, médiatiquement parlant, par le petit bout de la lorgnette chère à Gulliver, ce personnage romanesque de Jonathan Swift, à travers la mise en avant du soutien polymorphe accordé par Sonatrach et l’Etat à ces ambassadeurs sportifs devenus des idoles nationales (et internationales) de la résistance à cette barbarie que la planète ne découvrit réellement qu’avec une décennie de retard.

Pendant longtemps (la décennie comprise entre 1996 à 2005), Djabir Saïd Guerni fut le compagnon, au club et en équipe nationale, de Saïdi-Sief et de tant d’autres champions dont beaucoup restèrent en plan. Contrairement à la leur, la carrière internationale de Djabir fut jalonnée par des médailles et des titres africains, mondiaux et olympiques.

Djabir Saïd-Guerni eut la chance (dont on ne mesure pas toute l’importance) d’avoir été accompagné, dès son plus jeune âge (13 ans), par son père. Zine El Abidine, un entraîneur venu de l’EPS qui ne fut pas apprécié de son vivant à sa juste valeur car il n’appartenait pas au sérail, sut protéger son fils, un champion musculairement fragile et, à ce titre, sujet à des blessures à répétions qui handicapèrent sa carrière.

 Il ne fait pas de doute que cet aspect (la protection de l’athlète) n’aurait certainement pas été au cœur des motivations d’un autre entraîneur qui ne serait pas lié à l’athlète par ce lien de parenté très fort. Préparation, repos, respects des consignes médicales, participations à des meetings soigneusement sélectionnés semblent avoir été préoccupations primordiales des Said-Guerni.

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