A la mi-juin, l‘Ethiopienne
Genzebe Dibaba battait le record du monde du 1 500 mètres féminin. Un
vieux record qui figurait sur les tablettes parce que les notables de l’IAAF et
les experts des laboratoires de lutte contre le dopage n’avaient pu prendre à
défaut les athlètes de « l’armée de Ma » aux méthodes d’entraînement
très controversées. Une performance inaccessible aux athlètes de l’Europe
occidentale et prenait le pas sur un chrono établi par une sportive de l’ex-URSS,
Tatyana Kazankina. Un record qui lui aussi dura quelques 13 années et fut
amélioré de 2 secondes.
Dans la mémoire collective, ces deux chronos sont représentatifs d’une
approche du haut niveau ne correspondant pas aux standards en vigueur à
l’époque et aussi de la dépréciation des résultats en provenance des pays où
l’idéologie socialiste était dominante. La ₺Guerre froide₺
rythmait les relations entre les grandes nations à l’époque de Kazankina et n’était
pas encore un vestige du passé (même si le ₺Mur de Berlin₺
était tombé et que la Perestroïka était à l’œuvre dans la Fédération des pays
soviétiques) lorsque les Chinoises (ultime rempart du communisme) furent sur
les podiums.
Il est vrai que l’éclatement du bloc des pays de l’Est a mis à jour
des pratiques qui permettaient de créer des surhommes en jouant avec les règles
de la déontologie médicale et en faisant d’êtres humains des cobayes de
laboratoires.
L’athlétisme de l’Europe de l’Ouest, pendant la même période, n’a pas
été exempt de ce fâcheux phénomène. Même si celui-ci n’était pas encore érigé
en système, de temps à autre, quelques contrôles mettaient au ban de la société
sportive des athlètes de réputation. Il faut dire qu’il est vrai que
l’infestation apparaîtra un peu plus tard, dans une forme individualisée ou de
petits groupes n’ayant pas l’impact que le fléau avait pris dans
l’ «autre » Europe en déclin technologique.
L’avance prise par les laboratoires de production sur ceux de lutte
contre le dopage s’est réduite au fil des aveux et des dénonciations, des
politiques de délation et d’incitation à la délation. On pourrait expliquer la
multiplication des contrôles positifs par le recours à «des formules
dépassées », connues et répertoriées par les laboratoires de contrôle,
utilisées en désespoir de cause par des athlètes peu fortunés. Ce qui
appartenait à la course aux médailles, entre les deux blocs idéologiques
dominants de plus en plus défavorable au groupe des nations socialistes, s’est
transformé en une guerre de financement entre les pays occidentaux.
La gangrène qui aurait du s’estomper avec la disparition du
« bloc de l’Est » a pris des proportions incroyables aux Etats Unis
et des nations idéologiquement proches tels le Canada et la Grande Bretagne. Ce
seront les épisodes (à deux époques différentes) Ben Johnson, Tim Montgomery et
Marion Jones et de l’affaire Balco en athlétisme et Lance Amstrong en cyclisme.
Par un curieux hasard, ces athlètes performants à plus d’un titre,
« tombent » au moment où ils deviennent « intouchables »,
si souvent contrôlés qu’ils sont insoupçonnables. C’est ici que la fameuse
« théorie du complot » devient crédible et que l’implication des
structures d’accompagnement des athlètes (équipementiers, staff médical, coachs,
managers, etc.) semble plausible ainsi qu’a tenté de le faire croire B. Johnson.
Comment expliquer la montée des « prises » dans le milieu d’athlètes
spécialistes des courses sur route espagnols et Italiens si ce n’est par une
contamination par les réseaux à l’œuvre dans le cyclisme professionnel ayant
trouvé un déboucher dans un domaine sportif où les qualités physiques impliquées
sont proches.
On remarquera que le phénomène du dopage a pris, en Europe du Sud
(Espagne, Italie, Grèce) une propagation incroyable allant de pair avec la
professionnalisation à outrance de l’athlétisme et de l’augmentation
vertigineuse des primes de participation et des bonus.
L’athlétisme africain tant qu’il était refermé sur lui-même n’a pas
connu de véritables scandales de dopage. Nous supposons que c’est la formule de
groupes d’entrainement (ayant pris son essor dans la dernière décennie du 20ème
siècle autour d’un staff européen) qui a introduit le mal dans le continent
noir mais surtout dans les pays où les courses de demi-fond et de fond (Kenya,
Ethiopie, Maroc), les courses de sprint (Nigéria) et de lancers ou d’épreuves
combinées (Egypte, Afrique du Sud) sont devenus des faits culturels.
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