samedi 18 juin 2016

Dans le rétro (9), Zahra dévoile les imperfections fédérales

Z

ahra Bouras ne connait pas qu’un seul exil. S’étant éloignée sportivement de l’athlétisme algérois où elle fit ses premiers pas.  Délaissant ce microcosme, ce milieu sportif (où les conflits, les querelles sportives sont légions) qui la vit grandir jusqu’à atteindre l’équipe nationale et participer aux compétitions internationales, elle rejoignit sportivement d’abord la terre dans laquelle s’enfonce ses racines familiales. Avant de s’éloigner encore plus loin vers les terres septentrionales que l’on dit si accueillantes pour les personnes en perte ou en quête de repères.
Elle a rejoint (à moins qu’elle ne l’ait précédée) la cohorte des bons athlètes algériens qui - pour pouvoir sillonner à leurs aises le territoire hexagonal, à la recherche de compétitions où ils puissent exposer et exploiter à bon escient leurs talents - sont signataires dans des clubs français.      
Dès qu’elle a été autorisée à fouler à nouveau les pistes d’athlétisme, sa suspension consommée, elle s’engagea donc avec l’ACS Bounouara et ensuite avec le SCO Sainte Marguerite, à proximité de cet aéroport de Marseille, un des lieux privilégiés par ceux qui considèrent la métropole méridionale comme une excroissance du pays. Un club qui regroupe quelques-unes des meilleures athlètes féminines de demi-fond français. Ceci pour dire qu’elle sut quand même choisir où mettre les pieds. La preuve également que ce second exil a été mûrement réfléchi.
Depuis ses contrôles positifs, la vie de Zahra n’est pas idyllique. Son nom est maintenant associé indéniablement à cet acte de tricherie à la morale sportive que ni elle ni ses proches n’ont voulu assumer. Comme tous les tricheurs d’ailleurs. Mais là n’est pas le plus important depuis qu’elle a payé sa dette à la société sportive. Bien que sa réputation en pâtisse. Pour longtemps et toujours. Là-bas au moins, elle retrouvera la solitude du coureur de fond.
Le vent a tourné laissant le malheur derrière elle. Nous l’avons vu son exil constantinois a permis à un club méconnu et à une commune quasi-inconnue de trouver une certaine notoriété et surtout une aisance (financière et matérielle) inespérée. Son retour à la vie sportive a aussi permis aux athlètes algériens de formaliser officiellement leurs statuts d’athlètes autorisés à bénéficier de la double licence sportive. Une en Algérie et une autre en Europe. Une sorte de régularisation de situation administrative et sportive.
Jusqu’à son retour sur les stades, quelques athlètes étaient déjà intégrés dans ce système des doubles avantages. Une organisation baignant, comme il se doit dans la société algérienne, dans l’incognito, l’informel qui nous sied si bien. Une organisation s’appuyant sur « le ni vu ni connu ». L’officialisation de la double licence n’a rien changé. Elle renvoie encore et toujours au sens de la débrouillardise et aux réseaux personnels. Aux liens qui se tissent au fil du temps, des stages et des compétitions patronnées par la « fédé ».
L’officialisation n’a rien amélioré. Elle a seulement donné une couverture juridique et médiatique au phénomène qui prend de l’ampleur. Un fait de la société athlétique algérienne dont les liens avec la fédération sont si ténus que les performances réalisées à l’étranger n’étaient pas enregistrées par elle. Zahra Bouras en fut, l’année dernière, l’exemple marquant. Son meilleur chrono de l’année sur 800 mètres n’était pas connu à l’heure de l’officialisation du classement annuel qui ne retient que les 10 meilleurs par épreuve, le fameux « Top 10 ».
C’est grâce à Zahra Bouras, encore et toujours, ou plus exactement à cause de l’impair commis (par la commission des statistiques) en ignorant la meilleure performance de la fille du président, que la participation des athlètes algériens à des compétitions de second ordre (dans la classification des compétitions françaises) bénéficie d’une certaine médiatisation. Par réseaux sociaux interposés qui, ces derniers temps, proposent les « start-list » avant le déroulement de la compétition et les résultats après.


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