jeudi 16 juin 2016

Dans le rétro (7), L’exil à Bounouara

E
n reprenant sa carrière sportive, à l’issue de la suspension de deux années pour dopage prononcée à son encontre, Zahra Bouras a été amenée à prendre (on ne sait si c’est de son plein gré ou contrainte et forcée par des considérations qui la dépassent) une décision extrême : celle de l’exil sportif. Un exil consistant à prendre une licence à plus de 400 kilomètres des lieux où elle grandit, où, selon l’expression très sportive d’ailleurs, elle a ses marques. Elle s’est retrouvée dans un petit club quasiment inconnu (au moment où elle y atterrît) sur la planète de l’athlétisme algérien. Dans un petit village que l’on aurait de la peine à situer sur une carte géographique si ce n’était l’aide des instruments de géolocalisation, de "Google Maps" ou de "Google Earth". A la condition expresse que l’on ait le souhait de localiser la localité.  
D’ailleurs, comme pour brouiller les cartes déjà bien mélangées en prélude d’une partie de poker, le club ne porte pas le nom de la commune de référence. Il (le nom du club) renvoie à un lieu-dit perdu au bout du monde (ou presque) qui prend de l’importance depuis que Sonatrach (la compagnie nationale pétrolière qui subvient et pourvoit à tous les besoins de la nation) y a installé un important centre de distribution de ses produits.
Le hasard fait toujours bien les choses. La prise de licence se déroule, comme il se doit, dans l’anonymat le plus complet au cours de ce qui, à ce qui se dit, d’une réunion tripartite regroupant le club, la ligue et la fédération. Une formalité à accomplir. Sauf que pour Zahra, elle s’est accompagné d’un tintamarre médiatique qui ne s’est pas focalisé sur la signature du document proprement dit mais sur ce qui pourrait être une de ces mesures d’accompagnement qui enrichissent (selon les descriptions faites par la presse et les chroniques judiciaires) la passation de marchés et/ou de conventions.
A l’époque où Zahra Bouras prend licence à l’ACS Bounouara, il est organisé, sous l’égide de la fédération algérienne d’athlétisme présidée par Amar Bouras, la première édition de la course sur route d’Ouled Rahmoune clôturant, en fin d’année 2014, le challenge national de courses sur routes. Une course qui concurrence (à la même date) l’étape inaugurale du challenge national de cross-country programmée à Bordj Bou Arreridj. Nos amis de l’athlétisme algérien ont certainement conscience que ces deux courses (dont l’une qui ne figurait pas initialement au programme fédéral) se partage le même bassin, le même réservoir de coureurs. Incidemment, pour bien corser l’affaire, le président de la FAA rehausse de sa présence la course sur route d’Ouled Rahmoune. Il confirme ainsi ses discours axés sur les courses sur route en tant que moyen de promotion de l’athlétisme. Et derrière lui, comme une meute, la presse fait son métier en médiatisant un village très peu connu.
En retrouvant les labours et les pistes d’athlétisme, Zahra Bouras est devenue (ou redevenue) une professionnelle de la  course à pied. Elle serait bénéficiaire d’une indemnité équivalente, selon des proches du club, à la rémunération confortable d’un diplômé de l’enseignement supérieur. Une de ces indemnités que le ministre de la jeunesse et des sports (appliquant la loi) a voulu interdire avant que n’intervienne le tollé des dirigeants du mouvement sportif national. Dans le landernau athlétique constantinois (l’ACS Bounouara relève de la ligue constantinoise d’athlétisme), essentiellement parmi les entraîneurs écœurés, ce recrutement a fait polémique. La jeune femme ne dérange pas. Elle est plutôt sympathique. Mais le contexte n’est pas propice avec deux faits antagonistes: l’arrivée d’une athlète dont la réputation a été salie par le dopage et le départ d’un jeune athlète, prometteur, émargeant dans la catégorie des jeunes talents sportifs.

Au début de l’année 2015, alors que Zahra Bouras prenait licence, un jeune sauteur en longueur, l’athlète junior première année Triki Yasser Mohamed Tahar (finaliste des championnats du monde cadets, puis des championnats du monde junior et des jeux olympiques de la jeunesse) ne trouvait pas à Constantine un club lui offrant quelques avantages. Pour une petite partie de ce qui est attribué à Zahra Bouras, Triki s’est retrouvé signataire au "Flambeau" de la ville de Bejaïa (MBB), lui apportant au passage le titre de champion d’Algérie Open (toutes catégories) 2015 du saut en longueur et les titres arabes juniors (2016) du saut en longueur et du triple saut ainsi qu’un record national junior du triple saut de bonne augure.

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