samedi 15 octobre 2016

Polémiques (31), Le soutien au parti islamiste

L’annonce du passage à la télévision d’Amar Brahmia, bien qu’elle ait été faite sur un ton sentencieux, ne fit pas grand effet. En ces temps-là, la réussite sportive de Noureddine Morceli était l’opportunité idoine pour faire de son manager l’invité très spécial des émissions sportives de la télévision publique qui était seule dans le paysage audiovisuel algérien. A ce que l’on racontait alors, LE manager de référence en Algérie n’en demandait pas tant. Lui qui était l’habitué, le client des plateaux  télévisés. A vrai dire, tous ceux qui étaient présents au moment de cette déclaration connaissaient quasiment par cœur ses longues envolées, ses tirades empreintes de religiosité.
Qui étaient les témoins ? Nous n’en avons pas un souvenir précis  si ce n’est que c’étaient des sportifs (parmi ceux dont nous avons cités le nom précédemment et bien d’autres), des personnes qui ne portaient pas l’islamisme (ou l’islam politique) montant dans leurs cœurs, le plus souvent des démocrates et même ceux  qui étaient désignés, dans le jargon d’alors, comme des « progressistes », les démocrates de la gauche et de l’extrême gauche regroupés aussi sous l’étiquette englobante de «  communistes ». Ou ne le montraient pas encore ouvertement.
En fait, l’appartenance politique n’était pas encore un élément de différenciation comme elle peut l’être aujourd’hui. L’appartenance politique n’était pas déterminante dans le concert social de la période. Les premières élections pluralistes n’avaient pas encore eu lieu. La campagne électorale, à laquelle allait prendre part Amar Brahmia en incitant à voter pour le parti religieux, était aussi la première du genre.
L’Algérie des décennies précédentes avait baigné, quasiment depuis l’indépendance, dans « le socialisme spécifique », dans les « Révolution agricole », « Révolution culturelle » et « Révolution industrielle », un mode de penser qui introduisit la notion d’ « industrie industrialisante » chère à Bernis et à Belaid Abdeslam, les sociétés nationales, la GSE (gestion socialiste des entreprises), la participation directe du syndicat unique (l’UGTA) à la prise de décision au sein des entreprises publiques et tant d’autres concepts dont l’idée et la philosophie agissent encore dans l’esprit des Algériens du 21ème siècle pourtant emportés dans le courant du libéralisme économique et politique. L’encadrement du  mouvement sportif (numériquement peu développé) l’était  encore plus que le reste de la société.
Le mouvement sportif national, à travers  « la Réforme sportive », du fait de son discours polysémique, était (nous le croyons fermement) susceptible de fonder n’importe système sportif, dans n’importe quelle configuration économico-juridique et sociétale. La prospection, la détection, la sélection, la formation, le développement, la promotion, la prise en charge du haut niveau, etc. étaient les composants du crédo. L’avantage de la configuration juridique était d’avoir socialisé la pratique sportive, de l’avoir inscrite dans le mode de pensée et de vie.
Nombreux étaient ceux qui, dans l’encadrement et de la politique de développement du sport algérien, avaient suivi une formation à l’institut des sports de Leipzig (ex-RDA, Allemagne de l’Est) tandis que des centaines d’autres avaient eu pour formateurs, dans les établissements de formation de cadres du sport réalisés par l’Etat algérien, des coopérants techniques venus du bloc de l’Est. Inévitablement, ils avaient influencés leurs modes de pensées.

Nous ne devons pas cependant oublier que le monolithe unanimiste mis en place par le FLN historique - mouvement rassembleur de toutes les idéologies présentes sur le terrain politique algérien au déclenchement de la guerre de libération - a commencé son délitement au mois d’Octobre 1988 (émeutes d’Alger et pillages des magasins du secteur étatique), marqueur du début de la reconnaissance du multipartisme et déclic  tonitruant pour l’ouverture  économique entamée quelques années plus tôt. Les différentes tendances politiques (jusqu’alors confidentielles et clandestines) ont commencé à apparaitre au grand jour et se sont retrouvées engagées  dans le processus électoral qui est en cours lorsqu’intervient l’annonce de Brahmia.

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