mardi 27 mars 2018

Ali Saidi Sief (16), Le clash des philosophies


Lorsque Hassiba Boulmerka et Noureddine Morceli s’illustrent au niveau mondial, le plan d’ajustement structurel (P.A.S.) pointe le bout de son nez. Les résistances de quelques acteurs du pouvoir politique, partisans de l‘ « économie de guerre » n’y changent rien.  Les restrictions font déjà partie du quotidien de la population algérienne habituée depuis plusieurs années à un consumérisme de bas étage introduit par le P.A.P. (plan anti-pénurie). 
Concomitamment à la révision de l’idéologie socio-économique alors dominante, l’encadrement juridique et organisationnel du mouvement sportif national fait l’objet d’un amendement révolutionnaire introduisant   une dose de libéralisme (ce que les membres de la grande famille sportive se refusent obstinément et jusqu’à aujourd’hui à voir et à reconnaitre) inscrite dans le concept de « désengagement de l’Etat » que l’on perdra de vue lorsque le prix des hydrocarbures retrouvera des couleurs ou qu’il faudra calmer la colère populaire.
C’est cependant au cours de cette période que l’athlétisme algérien fut au plus haut, connut ses plus belles heures. Pourtant, en ce temps que l’on pourrait dire béni par les dieux de l’Olympe, toutes les difficultés se sont rassemblées, ajoutées, agglutinées les unes aux autres pour le mettre à genoux. Dans l’indifférence quasi-générale.
En ces temps difficiles, où le sang coule sans discontinuer, les athlètes, les dirigeants, les entraîneurs font partie des cibles privilégiées au même titre que les citoyens et les intellectuels progressistes (hommes et femmes le plus souvent non voilées), les journalistes, les représentants de l’Etat au niveau local, les Patriotes et GLD, les policiers, les militaires.
La décennie sanglante, la dernière du 20ème siècle marque également le début de la perte des repères de l’athlétisme algérien. Elle est celle où s’affirme deux troubles mentaux, la paranoïa et la schizophrénie idéologique et sociologique des parties ne partageant pas les idéaux prônés par les deux parties dominantes.
Cette paranoïa et cette schizophrénie sont fondées sur un sentiment d’exclusion. Elles ont aussi pris leurs racines dans les discours populistes et dans cette notion de « démocratie » mal assimilée qui conduit à une forme d’activisme discursif annihilé par la mainmise de plusieurs clans véhéments sur le devenir de la discipline.  
 Au cours de cette période cognitivement instable car en pleine mutation, le sens du devoir et le sens du service public transcendent encore l’action. Le changement de siècle voit déjà apparaitre la transformation du substrat fondé sur l’intérêt général en une autre perspective portant l’intérêt personnel. L’individualisme, l’égoïsme, l’égocentrisme ont pris les commandes. 
L’impact de la perte de repères fut ressenti jusque dans les contenus de la législation et de l’organisation sportives apparues à partir de l’abrogation du système sportif antérieurement basé sur une organisation de type soviétique et son remplacement par une autre législation et une autre organisation distinguant dans la prise  en charge le sport de haut niveau (les équipes nationales) du sport de base (les clubs).
Tandis que le premier niveau de la structure sportive reste à la charge de l’Etat, le second dépend des efforts consentis par les dirigeants appelés à se transformer en lobbyistes, en quémandeurs de subventions auprès des autorités publiques, des entreprises étatiques dont la privatisation est largement entamée et des  moyennes entreprises du secteur privé en germination. Les nouveaux dirigeants ne sont pas préparés à ces nouvelles missions et aux mentalités qui y président.
Le lien ombilical, dans ses dimensions juridiques et administratives, fut rompu dans l’esprit des dirigeants fédéraux qui se tournèrent essentiellement vers le premier des deux niveaux de pratique et, cela fait partie du fonctionnement social, de la satisfaction des desiderata de la hiérarchie administrative dont l’ambition, seule et unique, est de faire valoir la dimension symboliquement politicienne de la Victoire.  

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