lundi 29 février 2016

Sport en mutation (4), La belle époque du sport algérien

L
orsque le mouvement sportif national connait en 1976, avec la promulgation de ce qui sera la « Réforme sportive », sa première secousse tectonique, celle qui l’ébranla dans ses fondements juridiques et idéologiques, le sport national était structuré. Il avait certes conservé dans un premier temps les principes hérités de la loi française de 1901 mais, au fil des années et de l’imprégnation des idéaux  de gauche, il avait, au contact des coopérants techniques venus des pays de l’Europe de l’Est et du retour des cadres et futurs cadres du sports envoyé en formation  dans les pays-là, consolidé et systématisé les piliers d’une démarche scientifique renvoyant à la démocratisation du sport, la prospection, détection, formation et développement des talents sportifs. Cette période culmina avec l’organisation des Jeux Méditerranéens d’Alger et les deux médailles d’or hautement symboliques enregistrées avec la victoire en finale du tournoi de football de l’équipe nationale dirigée par l’ancien professionnel (Saint Etienne et Bastia) et membre de l’équipe du FLN Rachid Mekhloufi et l’incroyable chevauchée sur le 3 000 mètres steeple de Boualem Rahoui.
La « Réforme sportive » consolida ces acquis en assurant intégralement le financement (dans toutes ses dimensions) par l’Etat et ses prolongements (entreprises publiques relevant du patrimoine privé de l’Etat, collectivités et entreprises locales) et en garantissant l’avenir des sportifs. Cette période eut pour marqueurs les qualifications de l’équipe nationale de football aux coupes du monde de 1982 et 1986, les exploits des athlètes (Abderrahmane Morceli, Ammar Brahmia, Abderrezak Bounour, Rachid Kram, etc.) et les épopées des équipes nationales de sports collectifs et de tant d’autres sportifs dans quasiment toutes les disciplines sportives (boxe, natation, judo, karaté, cyclisme).
Une autre secousse législative « redressa » le mouvement sportif. La tendance à glisser vers la gauche (si bénéfique car elle enrichit en densité le palmarès du sport algérien) fut rattrapée et l’amena à se diriger vers les orientations véhiculées par les « conditionnalités » économico-politiques apportées dans les bagages du retour aux normes et ratios de l’économie et de la gestion financières mis en place sous les « auspices bienveillants » du FMI, de la Banque mondiale et des autres institutions financières mondiales.
Ce sera la loi de 1989 (organisation du système national de culture physique et sportive) qui vint remettre de l’ordre dans la réglementation et la législation sportive nationale qui marquèrent le désengagement de l’Etat du moins dans sa partie dite des « capitaux marchands de l’Etat » suscitant le retrait en masse (bien qu’échelonné dans le temps) des anciennes entreprises publiques - qui pour la majorité avait une viabilité et une pérennité fortement compromises, regroupées successivement en « holdings », puis « fonds de participations » et « société de gestion des participations » (au gré des décisions politiques) - du financement imposé des associations sportives de performances. Dorénavant, la représentation sportive nationale (l’élite) est certes prise en charge par l’Etat, les fédérations et le comité olympique tandis que le reste de l’organisation dépend du bon vouloir des structures locales (DJS et collectivités locales) et des partenariats économiques pouvant être conclus avec les opérateurs économiques publics et privés (sponsoring).
Cette période de disette est pourtant marquée par l’émergence de deux futurs grands champions d’athlétisme que seront Hassiba Boulmerka (championne d’Afrique des  800 et 1 500 mètres à Annaba et demi-finalistes, toujours sur 800-1500, aux jeux olympiques de Séoul) et Noureddine vice-champion du monde junior du  1 500 à Sudbury (Canada). Deux années plus tard, en 1991, ils remporteront le titre mondial du 1 500 mètres à Tokyo. Comme pour inaugurer en beauté la nouvelle ère deux autres athlètes feront honneur aux couleurs nationales en se hissant sur la podium des championnats du monde (Azzedine Brahmi, 3ème  du 3 000 mètres steeple) et Yasmina Azzizi en accédant en finale de l’heptathlon). A nouveau champions du monde et olympique sur la même distance, ils sont rejoints dans la gloire par Ali Sidi-Sief, Abderrahmane Hamad, Nouria Merah-Benida dont la détection et la formation relèvent encore des mécanismes de la période antérieure qui poursuit sur son erre.

Ces exploits sportifs seront accompagnés par ceux de l’équipe nationale de football qui remporte son premier titre en compétition continentale (coupe d’Afrique de 1990).     

Sport en mutation (5), Le professionnalisme de façade

L
a dernière décennie du 20ème siècle marque les esprits et la mémoire des sportifs algériens. Les exploits s’accumulent à ce  niveau mondial qui avait été juste effleuré pendant la « Réforme sportive ». Celle-ci a permis cependant de poser les bases idéologiques, organisationnelles et infrastructurelles d’un mouvement précédemment quasi-inexistant.
Le sport qui n’était qu’une forme décriée de loisirs, difficilement acceptée par une population (à majorité rurale) dont les besoins primaires (tels que définit par A. Maslow) sont, au sortir d’une guerre de libération ayant bouleversé les modes de vie, des plus pressants est devenu un élément incontournable de la société algérienne déboussolée par les multiples changements qui lui sont imposés.
Bien que non listé parmi les « constantes », il en devient cependant l’étendard et souvent même un des symboles de la souveraineté nationale que l’on exhibe en toutes occasions. Ses résultats, ses réalisations infrastructurelles sont brandis presque au même titre que l’emblème ou l’hymne national. Le déchirement sanglant de la décennie 90 est surmonté en partie par l’adhésion unitaire qu’apportent les performances sportives de ceux et celles considérées comme ces « héros de la Nation » qui renvoient à d’autres pays et d’autres temps. Alors que le sport est moribond.
Lorsqu’est abordé le 21ème  siècle, la loi sur l’éducation physique et sportive (2004) est promulguée. Elle déclenche une « rupture épistémologique» qui connaitra une seconde avancée avec la loi de 2013 portant sur les activités physiques et sportives. La loi algérienne reconnait alors deux formes très distinctes de pratiques sportives et légalise le « sport professionnel » en créant des personnes morales - sociétés sportives commerciales ayant le statut de société sportives par actions (SSPA) ayant juridiquement le droit de faire des bénéfices et de distribuer des dividendes) - et des clubs sportifs amateurs (CSA).
La privatisation, érigée en dogme dans la sphère économique, atteint maintenant de plein fouet le système sportif. Il s’agit en fait de la poursuite de la politique de désengagement de l’Etat entamée aux débuts des années 90 qui autorise les opérateurs économiques du secteur privé (sans l’interdire expressément à ceux du secteur public) à investir dans le domaine du sport. Les pouvoirs publics conservent la main sur le sport amateur (ayant le statut d’activités à caractère social et public) mais aussi sur la gestion des équipes nationales.
Répondant à l’insistance des dirigeants du football (essentiellement ceux des clubs les plus réputés et ceux de la fédération s’inscrivant dans une perspective d’émancipation de la tutelle étatique), la nouvelle législation avait pour ambition première d’alléger le fardeau que faisait peser la gestion du sport-roi de haut niveau sur les finances publiques et le mouvement sportif national. Ce sont les autres disciplines sportives (enkystées dans l’amateurisme et persistant dans les réflexes d’antan du « professionnalisme de façade ») qui en ont indirectement payé le prix fort. Le football bénéficie de dérogations qui ne sont pas élargies aux autres disciplines.

Les dérives des gestionnaires du football (salaires mirifiques, prises en charge logistique luxueuses, irrespect du code du travail et des assurances sociales, infractions à la réglementation fiscale, mésusage des règles footballistiques, etc.) ont amené ces dirigeants à tenter de revenir dans le giron de l’Etat protecteur et salvateur tout en préservant leur autonomie. Alors que la fédération, s’appuyant sur les importantes rentrées financières qu’induit le sponsoring depuis les exploits de équipes nationales s’étant qualifiées aux Coupes du monde de 2010 et 2014), se désiste des subventions publiques, les clubs des Ligues professionnelles 1 et 2 quémandent auprès des pouvoirs publics des terrains d’assiettes au dinar symbolique, la prise en charge de la réalisation de centres de formation et de préparation inexistants jusqu’à aujourd’hui et un soutien financier pour la prise en charge des charges de logistique détournés ouvertement afin de régulariser les salaires perpétuellement en instance des différents staffs (joueurs, entraineurs et autres employés de la SSPA). Les plus influents sollicitent même que leurs SSPA soient affectées à des entreprises publiques…. comme au temps de la « Réforme sportive ».

samedi 27 février 2016

Sport en mutation (2), Un exemple de distorsion idéologique

D
ans notre précédente chronique (« Sous l’olivier n° 250. Sport en mutation, La réglementation pour pierre d’achoppement »), nous avons tenté de montrer que ce qui est permis au football-roi (l’utilisation des fonds publics à d’autres fins que la couverture financière des besoins logistiques des associations sportives) ne l’est pas pour les sports collectifs (et les autres disciplines) considérés comme mineurs et qui pour cette raison se sont élevés contre cette discrimination patente, déclarée, reconnue et cependant tue par ceux qui devraient y remédier.
Dans notre description (somme toute superficielle), nous nous sommes inspirés afin de relater, plus que sommairement, les différentes phases de l’évolution historico-juridique du mouvement sportif national,  des concepts en œuvre en « géologie » et en « Histoire » qui analysent l’objet de leurs études à travers la notion d’ « ères » renvoyant à une image constituée de « strates », de « couches » successives empilées, entassées chronologiquement les unes sur les autres et donnant le sentiment erronée qu’une période s’achève avec l’apparition de la suivante. Cette approche que nous avons empruntée est celle privilégiée par l’Administration considérant que la promulgation d’un texte législatif entraîne ipso facto, dans un processus de mise à jour permanente et automatique des références juridiques, concomitamment l’abrogation de celui qui, portant sur la même thématique, l’a précédé.
Pour les citoyens que sont les dirigeants bénévoles, descendants des tribus autochtones irrédentistes soumises à  l’épée de Damoclès suspendue au-dessus de leurs têtes par cette Administration perpétuant à la fois la permanence des pouvoirs des dominations étrangères qui se sont succédées depuis des millénaires dans les convois des armées phéniciennes, carthaginoises, romaines, byzantines, vandales, puis de  ce  « Beylik » (la puissance publique mise en place par les pouvoirs militaires ottomans) honni, qui s’est poursuivi d’une certaine manière (avec rigueur et amplification) avec  l’Administration coloniale française qui impose un rapport de forces défavorable au nom d’un slogan impérialiste qui veut que « nul n’est sensé ignoré la loi ».
Ce principe de fonctionnement de l’Etat fondé sur le droit écrit est difficilement accepté par la société qui elle se meut dans l’univers de l’oralité. Ce principe est toujours ignoré d’autant que la Loi est sans cesse en mutation. A leurs détriments et dans l’intérêt perçu du législateur.
Les dirigeants sportifs sont toujours en retard d’une guerre, celle conduite par l’Administration anticipant leurs capacités de compréhension et d’assimilation du nouveau cadre idéologique.  Pour eux et pour tous les acteurs du mouvement sportif national (non intégrés dans les rangs de l’Administration s’entend), les textes régissant la gestion des associations sont perçus (lorsqu’ils sont connus) comme une juxtaposition de principes s’inscrivant dans une linéarité intemporellement définie où l’on peut puiser éternellement. Pour eux, les principes de l’ère de la « Réforme sportive » sont encore vivaces.
Dans leur conception, la notion d’abrogation est absente. Les textes régissant le fonctionnement du mouvement sportif  ne connaissent pas de ruptures. Au contraire, ils appartiennent à une forme évolutive transitoire tandis que la législation (dans ce domaine en particulier) se veut (toutes les deux décennies environ) révolutionnaire, remettant radicalement en cause le crédo sportif, lui-même déstabilisé par les secousses sismiques qui se produisent dans les sphères idéologiques des pouvoirs politiques et économiques avec lesquels il lui est exigé de se mettre en phase avec en point de mire l’unicité de pensée et d’action.
Notons aussi qu’alors que dans les autres domaines d’activité régis par la Loi, les corpus juridiques sont réunis sous forme de code regroupant l’ensemble des lois et décrets promulgués (Code civil, Code de procédure pénale, Code de la famille, Code du travail, de la sécurité sociale, des marchés publics, etc.), la législation et la réglementation sportives  se présentent sous la forme de textes épars,  à rechercher et pas toujours disponibles en cas de nécessité.

La transmission de l’information, malgré le développement des nouvelles technologies de  l’information et de la communication, continue à se faire de manière traditionnelle, de bouches à oreilles, sur les bords de stades, au gré des mésaventures et des incompréhensions avec la tutelle administrative du sport. Nous serions tentés d’écrire par « berrah » (crieur public, mode de communication institutionnelle et sociale d’antan) interposé. Facebook et les autres réseaux sociaux n’ont pas encore pu le supplanter.     

Sport en mutation (1), La réglementation pour pierre d’achoppement

I
l y a quelques semaines, une partie de ce que l’on appelle le «  mouvement sportif national » était sur le point de déclencher une mutinerie. Les équipes de l’élite de ces disciplines que l’on distingue du football-roi, des «sports individuels » et des « sports de combat » en leur attribuant le vocable de « sports collectifs », comme si la balle aux pieds n’était pas un « sport co », à savoir le hand-ball, la basket-ball et le volley-ball sont montés au créneau en revendiquant la révision de la réglementation sportive nationale qui, selon la perception qu’en ont leurs dirigeants, les sportifs d’une manière générale, leur interdit de proposer des avantages pécuniaires (salaires et indemnités) à ceux qui portent leurs couleurs dans les compétitions de l’élite nationale en puisant dans les subventions accordées via les direction de la jeunesse et des sports ou le ministère de tutelle.
Les intentions velléitaires de porter atteinte à la régularité chronologique des compétitions (boycott des rencontres) ont « provisoirement » disparu après la mise en place par les pouvoirs publics du processus de résolution des situations de crise caractérisé, selon des mécanismes réglés comme du papier à musique, par une rencontre entre les dirigeants contestataires et le département ministériel concerné à savoir la jeunesse et des sports, mettant temporairement (nous le supposons en l’absence d’informations crédibles sur le déroulement de cette rencontre) sous le boisseau l’application du décret  contesté.  
L’action des dirigeants des équipes de « sports co » médiatise une contrainte que vivent tous les clubs sportifs amateurs et leurs sections. Cette obligation faite au sport dit amateur de ne pas verser de rémunérations (quelles qu’en soient les formes) était à l’œuvre depuis plusieurs mois déjà, avant même la promulgation du décret. En fait, depuis que les clubs (toutes disciplines confondues) ont produit, devant les autorités sportives, les dossiers d’attribution de subventions étatiques. Nous avons le souvenir que des clubs  ont été contraints de réviser leurs bilans financiers (pourtant certifiés par un commissaire aux comptes et approuvés par l’assemblée générale) et d’en expurger toutes références à ces « maudites » rémunérations qui les incitent à déroger à la stricte règle comptable et à tenir une double comptabilité : une (que nous qualifierons de « comptabilité cadrée ») pour satisfaire les exigences des DJS (qui, comme le Tartuffe de Molière, ne veulent pas voir la réalité et se voilent la face pour occulter administrativement parlant les situations dérangeantes)  et une autre qui répond aux normes.
L’Etat, représenté par le MJS, s’appuyant sur son crédo idéologique né aux débuts des années 90 et sur les textes législatifs balisant depuis cette époque la pratique sportive  sur le territoire national, s’en tient fermement à la distinction entre le « sport professionnel » et le « sport amateur ». Cela fait partie incontestablement de ses prérogatives de souveraineté. On ne peut décemment le lui reprocher. Sauf que, entre ces deux univers juridiquement définis, le mouvement sportif national évolue dans un no man’s land, une zone où s’épanouit un « professionnalisme de façade », vestige du professionnalisme étatique des années 70-80 et produit de l’économie de bazar.

Doit-on reprocher au mouvement sportif national, aux disciplines sportives qui ne sont pas le football, de s’inspirer des modes de gestion du football professionnel (qui justement donnent le mauvais exemple en ce domaine) se caractérisant par des pratiques occultes prédominantes? Les subventions destinées initialement aux règlements des différentes charges (matériel pédagogique, équipements sportifs, etc.) font l’objet de changement de chapitres  et sont donc détournées et utilisées pour le paiement des salaires et indemnités qui révulsent des institutions qui, parce qu’elles sont impliquées directement ou indirectement dans la dérive (par au moins leurs laxismes) et détournent leurs yeux au nom de la paix sociale. Les « sports co » (et les autres disciplines sportives) ont appris à leurs dépens que les pratiques permises au football leur sont strictement interdites au nom de la légalité républicaine et de l’insuffisance de l’accompagnement par les supporters.

Sport en mutation (3), La perte des « acquis sociaux »

A
l’orée de l’avènement du 21ème  siècle et du 3ème millénaire, alors que se profile la dernière décennie d’un siècle et d’un millénaire, le mouvement sportif national, stabilisé depuis une décennie et demie par un soubassement en perte de vitesse dans les nations qui l’ont vu naître mais encore fortement ancré à l’intérieur des frontières nationales, ressent les premières secousses qui frappent les sphères idéologiques, politiques et économiques du pays. La crise des hydrocarbures, la baisse vertigineuse du prix du pétrole et du gaz impacte les ressources en devises de l’Etat mono-producteur. Les « conditionnalités» des institutions financières mondiales de Brettons Wood (Fonds monétaire international, Banque mondiale, Club de Paris et Londres) nées pour gérer le cataclysme économique consécutif à la fin de la seconde guerre mondiale pointent leurs nez. Les programme d’ajustement structurel (P.A.S) qui restructuraient, dans une perspective libérale, les économies nationales (et en lamineront beaucoup d’autres) au cours du demi-siècle qui suivra, se mettent en place. Ils participeront au démantèlement d’une organisation économique et politique déjà mise à mal par les expériences d’une gouvernance qui s’écarte de plus en plus du « boumediénisme », du « socialisme spécifique » pur et dur, qui a perdu son leader tout en laissant en héritage une « Réforme sportive » que ses partisans n’ont pourtant pas hissé sur le même piédestal que les « Révolutions » agraire et industrielle.
Pourtant, il s’agit d’un véritable séisme qui a bouleversé les structures sportives nationales qui ont continué à fonctionner comme avant le 5 juillet 1962, avec une organisation, fondée sur les associations sportives créées selon la loi de 1905. Un mode d’organisation qui reste dans les esprits comme étant le « sport civil » que porteront haut, du moins dans les discours populistes en direction des masses populaires, le fameux « peuple » mis en avant par les anciens dirigeants (essentiellement ceux des  gros clubs – à savoir le MCA et le CSC -  revendiquant et se disputant, par médias interposés, une légitimité et un leadership s’inspirant de l’histoire de la guerre d’Indépendance et le primat accordé aux « historiques ») qui reviendront prendre les rênes des clubs après que la parenthèse ouverte en 1976 soit légalement refermée.
Le mouvement sportif connait comme ce fut, dit-on, en des temps bien lointain pour la planète Terre un déplacement des pôles provoquant ce qui deviendra ce qui est appelé « la théorie de la dérive des continents de Wegener ». Progressivement, les repères idéologiques et organisationnels léguées par la loi dite de 1901 que, par une simplification outrancière, nous qualifierons de l’ « ère de la débrouillardise », laissent place à un système dans lequel les entreprises publiques (sociétés nationales puis entreprise publiques socialistes et enfin entreprises publiques économiques lorsque la réforme sportive connaitra son extinction), envisagées comme une excroissance de l’Etat participant à la prise en charge des activités sociales (les soins, la pratique sportive, les loisirs, la distribution des biens et services, via les centres médico-sociaux, les œuvres sociales  et les coopératives, etc.).
Comme dans les pays de l’Europe de l’Est, la réforme sportive a porté à son paroxysme le « sport corporatif » d’antan (resté vivace dans la nouvelle organisation en tant que « sports et travail » aux côtés des sports scolaires, universitaires) Le « sport de performance » est parrainé par ces entreprises et par les municipalités. Celles-ci permettent aux sportifs d’élite (formant un véritable  corps social) à la fois de pratiquer au plus haut niveau leur sport favori, et - selon les situations individuelles - de poursuivre leurs études ou d’exercer une activité professionnelle qui permet aux sportifs de haut niveau d’occuper des postes de travail le plus souvent fictifs pendant la carrière sportive et se concluant, à l’issue de celle-ci, par une intégration professionnelle effective.

Ces considérations (pourtant liminaires) expliquent la prise de position des dirigeants des clubs omnisports rejoints (depuis la première chronique sur cette problématique) par les sportifs qui, par le décret décrié, estiment qu’ils sont désavantagés par les concepteurs du nouveau régime sportif.  Cela fait partie des « acquis sociaux » que l’on disperse aux quatre vents.

mardi 23 février 2016

Athlétisme en crise (2), En dépit de toutes les ressources financières

I
l y a quelques années, lorsque le 20ème siècle laissa la place au 21ème , Abderrahmane Morceli - grand coureur de 1 500 mètres devant l’Eternel, avant que ne vinrent Rachid Kram et Noureddine Morceli, puis bien plus tard Toufik Makhloufi - de passage à Alger (qu’il avait quitté à contre cœur pour rejoindre le staff du Riverside Collège en Californie où son cadet Noureddine avait arasé ses « pointes ») avait déclaré en substance dans cette langue toute empreinte de simplicité qui appartient en propre à ceux qui sont proches du terrain, de la nature nourricière - de la terre et de la mer- comme peuvent l’être les techniciens d’athlétisme à la base du système pyramidal, les paysans, les montagnards et les pêcheurs) que le mode d’expression de l’athlétisme était celui que font vivre le chrono et le mètre.  Abderrahmane Morceli se désolait déjà de la régression connue par l’athlétisme national qui pourtant, à l’époque de cette déclaration, était encore florissant.
Il ne fait aucun doute que l’appréciation d’Abderrahmane Morceli a une base tout à fait subjective en s’appuyant sur l’aspect qualitatif (transcrit dans les mémoires par le niveau de performance réalisée par les athlètes du 21ème  siècle) comparativement à ses propres performances (3.36.26 au 1500) que l’on ne peut écarter ou celles de son frère Noureddine qui figurent, vingt ans plus tard, sur toutes les tablettes. En premières lignes, SVP. 
Dans ce registre des performances d’antan, l’appréciation d’Abderrahmane Morceli s’appuie également sur une densité chronométrique (en demi-fond) sans égale dans les classements africains (les compilations des athlètes et des  performances africaines publiés dans les « Athlétisme africain » des statisticiens Yves Pinaud et Walter Abmayer enregistrant une bonne vingtaine d’athlètes algériens de tous âges parmi les 100 meilleurs continentaux de l’année considérée.
En ces temps bénis, l’administration fédérale, malgré l’inexistence des outils technologiques actuels, était capable, par la seule volonté de bien faire des « permanents » et des « bénévoles » (souvent mis en opposition depuis cette belle époque), de compiler d’abord l’ensemble des résultats réalisés sur le territoire national et dans les compétitions internationales et de proposer ensuite des classifications jusqu’à une cinquantaine d’athlètes dans toutes les épreuves du programme et dans toutes les catégories d’âges.  
Aujourd’hui, le site de la fédération ne livre qu’une classification dite « Top 10 » qui reflète l’indigence actuelle que les résultats en dents de scie de Toufik Makhloufi (et de quelques autres athlètes de moindre envergure internationale mais en devenir) ne peuvent dissiper.
Hassiba Boulmerka, la grande athlète de la fin du 20ème  siècle, la première athlète arabe médaillée de vermeil dans les courses de demi-fond des championnats du monde et des jeux olympiques, s’est inquiétée  quant à elle de la diminution quantitative. Elle prétend, avec l’autorité que lui octroie son statut, que les effectifs de licenciés ont considérablement diminué. La fédération s’est tue à ce sujet. On ne saura rien sur la courbe des effectifs que nous n’avons pu trouver sur son site géré, nous a-t-on dit, par un partenaire spécialisé dans la communication.
Mais, Hassiba possède un atout que ne détient pas Abderrahmane Morceli. En sa qualité de fondatrice, de présidente et de commanditaire partielle d’un club d’athlétisme affilié à la ligue constantinoise d’athlétisme, le M.A. Constantine (Mawaheeb Athlétic Constantine), elle sait que son tout récent (2011) petit club représente près de la moitié des athlètes licenciés dans cette ligue et un bon tiers des participants aux compétitions locales et régionales d’athlétisme et de cross-country. Avec un classement plus qu’honorable (dans le classement national des clubs) pour une association qui recrute dans les petites catégories et axe son projet sportif sur la formation et le développement du demi-fond.

Pendant ce temps-là, la FAA - riche de quelques 25 milliards de centimes de ressources annuelles - organise une multitude de stages et de compétitions à l’étranger en faveur de quelques athlètes soigneusement choisis dans sa proximité. La même politique que les fédérations du foot et du cyclisme. 

lundi 22 février 2016

Athlétisme en crise, Pour la détention des moyens


L
es  « regards » que nous avons porté (juste avant l’interruption de la publication de cette chronique) sur l’athlétisme, nous a valu un courrier inattendu qui dépasse en nombre les échos que nous avons pu recevoir à propos de nos chroniques consacrées au football et au mouvement sportif national tout en n’atteignant pas toutefois le nombre de lectures de nos amis du sport pour handicapés.
Deux « regards » ont marqué les esprits : le premier de ces « regards » qui se voulait comme une sorte d’un survol temporel et factuel très rapide de la discipline sportive ayant donné les plus grandes satisfactions en matière de titres et de médailles aux championnats du monde et aux jeux olympiques  et la dernière chronique sur cette thématique qui nous a incité, à notre corps défendant, à nous arrêter (plus qu’il n’aurait fallu) sur cet acteur de l’athlétisme national, mi- ange et mi- démon, qu’est le sulfureux Ahmed Mahour Bacha semblant être l’objet d’une répulsion nettement affirmée.
A ceux (très nombreux) qui nous reprochent « de tenir le bâton par le milieu », nous dirons simplement que c’est le plus bel hommage qui puisse nous être fait. Le portrait que nous avons tracé de ce personnage controversé serait donc assez équilibré, présenterait une certaine forme d’objectivité qui n’aurait pas l’agreement de ses détracteurs et de ceux du bureau fédéral et/ou de la DTN dont il serait l’éminence grise. Comme si nous devions nous impliquer directement dans des combats qui ne sont pas les nôtres en lieu et place des membres des assemblées générales et des acteurs directs de l’athlétisme national qui eux se plaisent dans la position des majorités silencieuses.   
Ahmed Mahour Bacha se présente aujourd’hui comme l’alter ego plus qu’édulcoré d’Amar Brahmia (aussi décrié en son temps). Celui-ci,  aux inestimables talents de négociateur, de discoureur et d’animateur sut, en dépit (ou en raison) de son opposition idéologique permanente aux bureaux fédéraux qui se sont succédés, mettre toutes ses qualités intellectuelles, sa connaissance de l’athlétisme national et international, sa position au sein de Sonatrach et du MCA (GSP) au service de la promotion, du développement et de la réussite de la première discipline olympique.
De par sa position de soutien indéfectible des fédérations passées, Ahmed Mahour Bacha aurait été un opposant déclaré d’Amar Brahmia dont il n’a malheureusement pas atteint le succès…..malgré les moyens mis à sa disposition par les fédérations successives.
En vérité, c’est le principal reproche qui lui est fait. En plus d’avoir étouffé le potentiel des entraîneurs de la base privés de l’accompagnement, jusqu’à leurs limites cognitives, des talents par eux découverts. Il aurait par des pratiques dictatoriales et népotiques, empêché la percée de jeunes sportifs et le perfectionnement de leurs entraîneurs.
Le défoulement de cette passion entravée et ne pouvant être dévoilée dans les augustes assemblées générales de la FAA - puisque les acteurs principaux (ou du moins ceux qui pourraient en parler en connaissance de cause n’y ont pas accès -    se manifeste par des propos vulgaires, des insanités indignes de ceux qui sont présentés comme « éducateurs » entendus dans les abords des compétitions sportives, montre que la limite réellement supportable par eux  est atteinte, si ce n’est dépassée.

Plus que par le passé, les dirigeants de clubs et, avec plus de force,  les entraîneurs se plaignent  d’une politique qu’ils qualifient de « des deux poids et deux mesures » écartant des stages nationaux (et surtout internationaux) de préparation les entraineurs présentant quelques qualités, privant les jeunes athlètes de talents de l’intérieur du pays de l’aide fédérale s’ils ne rejoignent pas la capitale et précipitant dans le précipice de la dérive sociale ceux (les plus fragiles) éblouis par le miroir aux alouettes que l’on agite devant leurs yeux émerveillés par les promesses.

dimanche 21 février 2016

Préparation en Ethiopie, Athlètes en danger !

L
e stage de préparation en haute altitude (faisant partie des nouvelles normes d’entraînement des athlètes préparant  les championnats du monde ou les jeux olympiques) auquel participe quelques-uns des meilleurs coureurs de demi-fond algérien dont Amina Bettiche, la spécialiste du 3 000 mètres steeple, et trois des meilleurs coureurs de 800 mètres (Belferrar, Hattat et Abdenouz  Ramzi) a enfin débuté. Les athlètes ont rejoint les hautes terres d’Ethiopie et le groupe d’athlètes Qataris et  de diverses autres nationalités (dont des athlètes Ethiopiens de très haut niveau mondial) coaché par l’entraîneur américano-somalien Adem Djamaa (ou Aden Jama, selon une autre orthographe).
Nous sommes en droit d’attendre de ces athlètes une progression des performances au courant de l’été prochain. La proximité d’athlètes, auteurs très hautes performances, ne peut que servir d’émulation à nos représentants qui se frottent ainsi quotidiennement à la crème de la crème. Nous n’oublierons pas que les athlètes éthiopiens ont pour objectif la conquête de médailles aux J.O de Rio 2016 et que les Qataris ont en vue de briller aux championnats du monde d’athlétisme qu’ils organiseront à Doha en …2019. Dans ce contexte, les partenaires d’entraînement ne peuvent que tirer profit de leurs présences respectives et les Algériens plus que les autres  à condition que….certaines précautions soient prises. En particulier, en ce qui concerne l’entraînement en haute altitude (plus de 2 000 mètres) et les risques potentiels de dopage.
Même, si les athlètes Ethiopiens ne sont pas placés sur le même plan que les athlètes Kenyans ou Russes, il n’en demeure pas moins que le niveau chronométrique atteint par les athlètes de demi-fond et de fond de ce pays ont fait naître des doutes dans l’esprit de nombreux observateurs….occidentaux qui ne se gênent pas pour entretenir la suspicion d’autant que des athlètes éthiopiens ayant choisi une autre nationalité sportive (Turquie, Pays du Golfe) sont enregistrés sur l’inventaire des athlètes pris en flagrant délit de dopage ou d’anomalies sur leurs passeports biologiques. Tout comme le sont aussi les athlètes marocains ayant choisi de changer de nationalité sportive en optant pour le Qatar qui ratisse large, les autres pays du Golfe.
Genzebe Dibaba, détentrice depuis l’été dernier du record du monde du 1 500 mètres dames, appartient à  ce groupe d’entrainement. Elle est aussi suspecte que peuvent l’être les Kenyanes. D’abord par le chrono établi (3.50) qui vient se substituer, sur les tablettes de l’IAAF,  à une performance, vieille d’un quart de siècle, détenue par une Chinoise de cette «armée de Ma Juren » qui revient sur le devant de la scène avec la réédition d’un livre qui raconte des péripéties peu plaisantes et rappelle que de nombreuses athlètes chinoises furent dopées. Aucun lien direct cependant avec Dibaba, si ce n’est qu’une suspicion remplace une autre et que, quelques semaines avant l’établissement de ce nouveau record du monde, elle fut au cœur d’une controverse alimentant allégrement les doutes, déjà fort nombreux. A la fois sur sa progression et surtout sur la présence de Djamaa à ses côtés. En route (depuis Barcelone) pour rejoindre Font Romeu, elle aurait fait demi-tour en apprenant la présence sur le site de son stage d’une équipe de contrôleurs. On ne dit pas toutefois si elle fut considérée en « no show » ou pas.
Parmi les athlètes qui furent coachés par Djamaa on trouve (au moins) deux noms d’athlètes suspendus pour raison de dopage, la franco-marocaine (d’origine sahraouie) Layla Traby (épinglée à Font Romeu pour possession d’EPO et ensuite pour un contrôle positif à l’EPO) et l’athlète qatari (d’origine marocaine) Hamza Driouche  (champion du monde junior et recordman junior du 1 500 m en 3.33) à la suite d’anomalies sur son passeport biologiques. Les deux coureurs ont été suspendus au début de l’année 2015.  

Aden Jama fut aussi (nous ne devons pas l’oublier) celui qui mena Taoufik Makhloufi (qui fut un coureur de 800 avant de percer sur la distance supérieure) à la médaille d’or du 1 500 mètres des Jeux Olympiques de Londres (2012) et qui entraîna un superbe coureur de  800 mètres soudanais Aboubaker Kaki (1.42), malheureux rival de David Rudisha. 

samedi 20 février 2016

«Kheirro » Merzougui, Mise à l’écart de la justice

K
heirredinne Merzougui est au cœur d’une tourmente, d’une tempête dont il ne voit pas le bout. Même s’il espéra, pendant une courte période, l’indulgence des instances footballistiques nationales qui l’on sanctionné d’une suspension de quatre pour avoir consommé une substance prohibée par le code de lutte contre le dopage. Un espoir qui ne fut pas entendu malgré les révélations tardives qu’il fit. 
Depuis quasiment la fin de la « phase Aller » du champion national de football de Ligue 1, les cas de dopage s’accumulent. Celui de Merzougui ouvre une autre ère. Une ère nouvelle, celle de l’ingestion de compléments alimentaires, ces fameuses vitamines qui font partie du discours des sportifs de toutes envergures (professionnels et amateurs) et de tous âges…et depuis toujours.
Depuis quelques temps (cela remonte à plus d’un quart de siècle), la complémentation alimentaire fait partie des mœurs sportives, en particulier au sein de ces nations en voie de développement où la ration alimentaire est considérée comme insuffisante ou pour le moins inadaptée à la pratique sportive intensive. Une pratique consistant à compenser les carences nutritionnelles par la consommation de pilules multicolores qui, dans leur grande majorité, sont en vente libre. Y compris, dans certains pays consuméristes, dans les superettes et les hypermarchés. Chez nous, ces pilules, ces « vitamines » sont disponibles, exposées et ont été longtemps vendues sous le manteau dans les salles de sports privées où les arts martiaux et l’acquisition de force ou de volume musculaire sont les principaux créneaux d’activité.  Au nom également de la sacro-sainte récupération inscrite dans les programmes d’entraînement.
La première explication de Merzougui (dont la valeur est seulement anecdotique puisqu’elle est aujourd’hui niée par l’intéressé lui-même qui est revenu sur sa déclaration initiale, celle que l’on a pu découvrir dans les colonnes de la presse et qu’il aurait soutenue devant les membres de la commission de discipline qui l’a auditionnée sur cette infraction à l’éthique sportive) est qu’il en a fait l’acquisition dans une salle de sports d’Ain Defla, une ville moyenne de l’Algérie profonde, un chef-lieu de wilaya, un des fiefs de la culture de la pomme de terre et de l’agriculture maraichère.  La preuve s’il en est que le produit en question est disponible partout y compris en ces lieux où on s’y attend le moins. La confirmation s’il peut en être que le dopage cause des ravages à tous les niveaux de la pratique sportive et dans toutes les régions du pays (voir le cas du footballeur de la JSM Skikda). A l’Est comme à l’Ouest.
Après que la CD ait prononcé une sanction lourde (4 ans de suspension), mais au diapason avec le durcissement des sanctions telles que réglementées par les instances internationales, Merzougui modifia son témoignage en impliquant dans sa dérive le médecin du club qui lui aurait accordé son feu vert pour la consommation du produit incriminé et qui lui aurait dicté les termes de sa déclaration initiale et incité à ne pas demander l’analyse de l’échantillon « B ». Pour faire bonne mesure, des joueurs du MCA (son club employeur) ont témoigné en sa faveur en corroborant ses nouvelles déclarations. Un rebondissement qui n’a pas été pris en compte.
Bien que les déclarations de Merzougui aient toutes les apparences d’une procédure dilatoire le conduisant à faire appel devant le TAS  (tribunal arbitral du sport), on ne peut s’empêcher de penser que le cas Merzougui, expression d’un acte individuel, est aussi une forme laxiste et collective de la transgression de règles sportives. On ne peut qu’être tenté de conclure à la possibilité d’une forme d’association de malfaiteurs qui aurait investi le domaine sportif algérien. Une hypothèse que les instances sportives ne veulent pas envisagée par ce qu’elle les obligerait à faire appel aux services de sécurité et judiciaires pour en démêler l’écheveau. Une possibilité que les fédérations se refusent au nom de l’indépendance des fédérations nationales vis-à-vis des pouvoirs publics et de leurs soumissions aux règles maffieuses des fédérations internationales.