lundi 22 mai 2017

Samira Messad (16) Au pays de Kafka

Nous nous devons d’admettre que, par certains des aspects dont elle est porteuse, la logique de la lutte contre le dopage aurait sa place dans la vision juridico-bureaucratique des disciples de Kafka qui se seraient installés dans les rouages concepteurs de la réglementation définie par la CNAD et bien avant par l’AMA. Sans doute en prévision du juridisme pointilleux à l’extrême que l’on trouve chez les champions de la défense de sportifs ayant l’indélicatesse de présenter des résultats d’analyses anormales.
Confortant ce que nous avons appréhendé dans la précédente chronique, le comité d’audition et de décision désigné au sein de la CNAD estime qu’ « il est difficile d’évaluer et d’apprécier à juste titre le degré de la faute » qui pourrait bien prendre naissance dans la  consommation d’une viande qui n’appartient pas au us et coutumes de la société algérienne.
Tout en reconnaissant cette difficulté d’appréciation, le comité engage cependant la responsabilité de l’athlète Samira Messad. Il lui impute également une « certaine négligence » consistant en la consommation d’une viande sur laquelle pesaient de fortes probabilités de contamination. Il lui reproche (en particulier et surtout) de n’avoir pas sollicité au préalable « l’avis de son entraîneur ou de son médecin ».
Le raisonnement (ou l’argumentation) du comité d’audition et de décision nous semble quelque peu singulier. Ou pour le moins trop précautionneux. Il nous incite à nous interroger sur la possibilité (éventuellement existante) d’anticiper une probable contamination de la viande chevaline achetée chez un boucher, certainement connu dans la localité de résidence de l’athlète, et dont il est loisible pour les connaisseurs de la localité de situer le magasin en un endroit précis. Cette singularité interpelle.
Par ailleurs, envisager d’inscrire sur le « formulaire de contrôle du dopage » la consommation de viande chevaline conduirait indubitablement à penser (dans un univers où les suspicions sont légions) que l’athlète aux résultats anormaux, malgré les doutes qu’il y aurait pu pressentir sur une possible contamination par un produit prohibé, en a malgré cela ingéré.
On pourrait alors déduire qu’il a intentionnellement fait fi des dispositions réglementaires et tente donc de se prémunir des effets de cette infraction consciente, vis-à-vis des autorités, en obtenant d’abord l’adhésion de son entraineur et de son médecin. Nous devons supposer également que ces derniers (qui ne verraient normalement aucun inconvénient à la consommation de cette viande chevaline) auraient cautionné cette dérive et seraient donc devenus complices de la violation des règles. L’aboutissement de cette démarche insoutenable est l’inscription sur la feuille de contrôle de dopage que l’athlète, selon la réglementation, doit renseigner.
De toute évidence, dans un cas similaire à celui décrit ci-dessus qui serait (nous devons l’admettre) celui de l’extension aux limites possibles du raisonnement, il ne s’agirait plus de circonstances atténuantes mais au contraire de circonstances aggravantes. Celles qui mettraient en évidence la préméditation conduisant inéluctablement à un alourdissement de la peine à prononcer.
Ce cas d’école ne correspond pas au cas Samira Messad. Alors que l’audition est sensée se dérouler en une seule séance, la spécialiste des haies et des épreuves combinées s’est présentée à de multiples reprises devant le comité. Dont au moins une pour présenter le justificatif de consommation (d’achat ?) de la viande invoquée vraisemblablement lors de la séance inaugurale. Un document dont l’obligation de le rapporter (dans les meilleurs délais) au comité la conduisit à retourner à Bejaïa.
Samira Messad s’est présentée à plusieurs reprises (quelque fois avec une journée d’intervalle) devant le comité d’audition et de décision. Nous avons le souvenir qu’elle ne cesse de se plaindre des fréquents, couteux et fastidieux déplacements Bejaïa-Alger qui lui ont été imposés. Souvent à des horaires contraignants : départs matinaux et retours tardifs.

A l’époque, les quelques 250 kilomètres du trajet étaient parcourus en plus de 5 heures dont au moins 3 heures pour parcourir le tronçon de 110 kilomètres entre Ahnif (ex-Maillot) et la capitale des Hammadites. Un exaspérant voyage dans l’interminable Vallée de la Soummam réputée pour ces innombrables ralentisseurs et pour ses localités s’étirant sur des kilomètres de la « Nationale 26 », le cauchemar des automobilistes et des chauffeurs de poids lourds devant l’emprunter.

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