Saïd Lounnas, ancien DTN, ancien président de la FAA, ancien directeur
central au MJS, nous a fait l’immense honneur d’apporter sa contribution -
ayant pris la forme d’un commentaire à « Polémiques (5),La migration
sportive » - à ces chroniques de la présente série qui tente de
comprendre l’agitation des médias et des réseaux sociaux avant, pendant et
après les épreuves d’athlétisme (une discipline dont le grand public, les
médias et les pouvoirs publics attendaient beaucoup) figurant au programme des
jeux olympique de Rio 2016.
Le texte de la contribution de Saïd Lounnas :
« Rien à redire sur la qualité de l'écriture d'un texte bien
construit et réfléchi.
Pour autant, je ne partage pas cette vision manichéenne de
l'histoire récente de sport et de l'Eps en Algérie
Les termes sont forts pour certains, voir abusifs et s'inscrivent
même à contre sens de l'histoire mais il faudrait bien plus qu'un post sur
Facebook pour épuiser le sujet. Toutefois je ne saurais laisser dire que
Monsieur Bouras Ammar aurait spolié l'entraîneur de Boulmerka avec en sus la
complicité de la FAA
La Faa avait fait des choix tant en matière d'organisation que de
prise en charge des talents
Ces choix étaient clairement orientés vers l'atteinte de
l'excellence et le haut niveau.
Dans cette vision, le système national des compétitions comme les
ligues et clubs avaient pour principales missions la détection et la
confirmation de jeunes talents
Cette approche s'inscrivait d'autant plus en rupture avec les
pratiques antérieures qu'elle intégrait dans sa mise en œuvre la mobilisation
d'un encadrement national de haut niveau formé sur les bancs des Instituts de
formation nationaux tels que L'Ist et les Its.
Second point de rupture: il s'agissait de rompre la aussi avec une
approche conceptuelle du sport qui posait comme postulat que le sport de haut
niveau n'était qu'un sous-produit du sport de masse. A ce prix là pour faire
dans la caricature, la Chine devrait depuis longtemps posséder les meilleurs
cyclistes du monde. Il est aisé de constater que ce n'est toujours pas le cas
Pour conclure, j'assume totalement ces choix et ces orientations.
Ils nous ont permis d'atteindre à l'excellence sportive ce qui était clairement
le but que nous nous étions collectivement assigné en accord avec l'AG de la
Faa (pour rappel 400 personnes et deux jours de travaux pléniers)
Enfin je ne saurai terminer sans remercier tous ceux qui ont pris
part à la réalisation de ce programme, entraîneurs de clubs, dirigeants et
officiels (au sens de juges et arbitres) ».
Le premier souvenir que nous avons de Saïd Lounnas se rapporte à une assemblée
générale tenue au Centre familial de Ben Aknoun (fin 89-début 90) aux cours de
laquelle deux des piliers (passés et présents) incontournables de l’athlétisme
algérien (Ahmed Mahour Bacha et Kamel Benmissi) eurent des propos si
passionnés, étaient si échauffés par leurs diatribes que nous avions vu le
moment où ils sortiraient les couteaux ou les épées de leurs fourreaux pour
porter le coup fatal à l’antagoniste.
La scène était si violente que nous avions cru que, pour notre
première AG de la FAA, nous allions assister à un étripage à la sortie. Que
nenni. Un peu plus tard, nous les retrouvâmes tous les deux, au Parc zoologique
et des loisirs de Ben Aknoun, en train de se désaltérer, l’un assis en face de
l’autre. Comme si rien ne s’était passé.
Saïd Lounnas est aussi passionné que le duo Mahour Bacha/Benmissi.
Mais, il ne le laisse pas paraître. D’apparence glaciale, il est pourtant
chaleureux (lorsqu’il laisse tomber le masque) sans être emporté par
l’agitation qui marque la sphère athlétique. Saïd Lounnas est l’adversaire des
excès. Il est la représentation, l’incarnation de l’Administrateur, rouage
d’une Administration (celle d’antan) froide, rigide, conditionnée pour être au
service du public, sans parti-pris, quelque fois même en totale déconnection de
la réalité.
Nous avons eu la chance de rencontrer Saïd Lounnas et d’avoir pris
part, au printemps 1990, lors de la première édition du Cross de la Jeunesse
(Bouira), à une très longue et enrichissante discussion privée sur
l’ « objectivité de l’information » au cours
duquel il a milité pour un autre concept, celui de « neutralité ».
Une notion qui, nous a-t-il semblé, expurge le discours de tous les éléments
énonciatifs qui donnent vie et consistance à un article journalistique.
Rétrospectivement, nous sommes amenés à écrire que l’objectivité telle
qu’appréhendée par Lounnas, la neutralité du discours s’inscrirait dans une
accumulation de données brutes qui, comme un discours de l’ancien premier
ministre, Ahmed Ouyahya, conduirait à la Vérité qui est celle de la machine administrative ou celle que l’on
trouve dans une dépêche de l’APS réduisant l’information journalistique à un
seul genre d’écrit, le compte rendu. Une perception de l’information qui s’en tient
à la première fonction des médias (informer) et l’ampute des autres dont celle
ayant un lien avec les aspects pédagogique et cathartique. Une fonction qui est
secondaire lorsqu’on lit un hebdo ou un blog.
Cette dualité entre l’écrit administratif (dans lequel Saïd Lounnas a
atteint une certaine maîtrise) et un écrit à prétention journalistique,
caractérisé par des termes « forts » et « abusifs », exerçant
une attraction sur le lecteur ennuyé, lassé par le premier, permet toutefois
une tentative de tempérer une vision du sport national battu en brèche.
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