Le phénomène de l’accaparement d’athlètes tel qu’il a été pratiqué par le
Mouloudia et les clubs de performance n’a pas été totalement nuisible. Nous
serions même tentés d’écrire que, pour beaucoup d’athlètes, elle fut
socialement bénéfique.
Pour les clubs et les entraîneurs
qui participèrent à la formation de ces athlètes, elle fut négative et
conduisit, par la force
des choses, à la disparition des clubs consécutivement à la dégradation de
leurs situations financières étroitement dépendantes des subventions accordées
par les autorités locales et dont la détermination s’appuyait, en grande
partie, sur les résultats sportifs obtenus. Cette disparition des clubs,
fondation de l’ensemble de la structure sportive, résulte également du
désengagement et la démotivation des éducateurs sportifs en activité sur les
terrains de sport. Une catégorie sociale dont nous dirons qu’elle comprend
aussi bien des enseignants d’EPS, des entraineurs bénévoles (une espèce en voie de disparition) que des
techniciens et des cadres du sport
formés par les ITS et l’ISTS.
Dans la vision « élitiste »
que nous a présenté Saïd Lounnas, au niveau de la cellule de base que sont les
clubs, la rivalité entre les « bénévoles » (ceux qui ne
sont pas liés par un lien de subordination direct avec le MJS et les DJS) et les « professionnels »
(les entraîneurs rémunérés par ce secteur ministériel) n’est pas aussi nette
que ce que nous avons pu l’écrire jusqu’à maintenant. Nous pouvons même nous
aventurer à dire qu’elle fut quasiment nulle. A l’exception bien sur des cas
particuliers naissant de la rencontre d’énergumènes que l’on a pu trouver aussi
bien chez les « qualifiés » que chez les « diplômés ».
Sur le terrain, le diplôme (quel
qu’il soit) n’a pas sa place. Il est remisé dans un tiroir des administrations et
ne sert qu’à définir un statut administratif et un niveau de rémunération. Ce
qui compte le plus c’est le niveau de compétence de l’entraîneur. Une
compétence qui se définit, quantitativement et surtout qualitativement, par « son »
palmarès qui est en réalité (on a tendance à l’oublier souvent par facilité
intellectuelle) la somme de ceux des athlètes qu’il a accompagnés au cours de
sa carrière. Ces palmarès d’athlètes prenant la forme de titres et de
performances conquis et/ou réalisés à différents niveaux de compétitions. Cette
compétence est aussi la vitrine, la transcription discursive, qu’il a su se
construire (ou qu’on lui a construite) à partir d’un seul résultat
exceptionnel.
On nous reprochera bien
évidemment la comparaison qu’à nouveau nous faisons malgré nous entre Abboud
Labed et Amar Bouras. Cette comparaison illustre justement la situation décrite
précédemment où la structure fédérale n’a pas valorisé les nombreux titres et
records nationaux de l’un, obtenus et réalisés (avec les moyens trop souvent
dérisoires dont dispose un entraîneur du pays profond à classer parmi les
entraîneurs « qualifiés") par une multitude d’athlètes
pendant toute une carrière et les titres et records d’une athlète (exceptionnelle
à tous points de vue) pendant une période relativement brève par un entraîneur
"diplômé", de surcroit considéré comme le leader de
l’excellence. A juste raison, on devrait s’interroger sur ce que cette même athlète
(Hassiba Boulmerka) aurait pu fournir comme satisfactions avec son premier
entraîneur si la fédération lui avait procuré les moyens qui ont été mis à la
disposition du second. La réponse ne sera pas connue puisque l’on ne peut
réécrire l’histoire.
C’est aussi la même question que
nous devons nous poser au sujet de Toufik Makhloufi dont l’entraîneur (Ali
Redjimi, un "diplômé" de l’ITS) est félicité par
l’entraîneur français (Philippe Dupont) pour son travail préliminaire et lui
reconnait une certaine compétence pour avoir amené à 3.30 au 1 500 mètres l’athlète
qui lui a été confié par le biais d’une convention avec la fédération. A la fin
de l’année 2014, ce même entraîneur (Ali Redjimi), sous une fédération dirigée
par Amar Bouras, aurait été écarté par l’administration sportive algérienne
(FAA ou MJS) de l’encadrement d’un stage programmé à l’étranger (Etats Unis) de
son protégé (revenu provisoirement dans son giron) pour ne pas détenir les
titres requis. A ce moment-là, Makhloufi était en quête d’un entraîneur après
avoir quitté successivement Amar Brahmia (printemps 2012) et Aden Jama (automne
2014). Makhloufi est parti seul, sur ses propres fonds, accompagné par un kiné
et deux sparring-partners qui ne purent achever le stage. Un cadre de la
fédération, plus exactement le DTN (que les instances voulaient imposer à tout
prix) fut ensuite dépêcher pour
transporter les fonds finalement décaissés et contrôler l’usage qui en était fait.
Conservons ce fait dans un coin de notre mémoire.
Deux exemples d’une situation où
des entraîneurs de talents se sont vus couper les ailes, ont été empêchés de
donner leur pleine mesure, de mettre en valeurs leurs compétences, pour
permettre à des Icare de s’envoler vers le firmament de la gloire. Combien
d’autres pouvons-nous en recenser ?
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