La captation d’athlètes par le Mouloudia d’Alger (essentiellement dans
la seconde partie des années 80 et le début des années 90) a été facilitée par
les facteurs sociaux de l’époque. Quelques entraîneurs d’Annaba (ceux qui
furent dans le staff de Prosider plus particulièrement) s’en souviennent avec
une sensation d’amertume, d’autres avec un goût prononcé d’inachevé. Vingt-cinq
ans après, la polémique à propos de jeux olympiques de Rio aidant, certains
(dont quelques-uns ont pris la voie de l’exil) n’ont pas manqué de le rappeler
dans des commentaires publiés sur des sites d’informations générales.
Nous noterons ici que, le phénomène de la captation étant ce qu’il est
(avec tous les avantages et les inconvénients que nous avons déjà signalé et
bien d’autres), le Mouloudia d’Alger a fait œuvre d’utilité publique en permettant
à beaucoup d’athlètes de persévérer (à l’abri des regards indiscrets) dans la
pratique sportive d’un certain niveau. Le Mouloudia était devenu l’antichambre
des équipes nationales quand elle n’était pas l’équipe nationale. Cela nous
l’avons déjà écrit.
N’oublions pas qu’en ce temps-là, la vision du sport n’était pas celle
que nous en avons aujourd’hui, que la culture du running ne faisait pas partie
de la société et que, passé un certain âge, le sportif était un être…… anormal.
La réalisation sociale par le sport n’était pas encore intégrée dans les
esprits. Elle le sera par une voie perverse lorsque le salaire des footballeurs
dépassera des milliers de fois celui des métiers de prestige socialement marqué
(médecins, pharmaciens, avocats, ingénieurs). Le regard de la société a alors
changé.
Jusqu’au début de la décennie 1990, les relations entre les clubs de
l’intérieur du pays et le Mouloudia d’Alger étaient plutôt tendues. Le club
algérois étant celui qui pouvait prétendre (par sa puissance financière) à
l’excellence, beaucoup ont fait contre mauvaise fortune bon cœur ont accepté de
se faire dépouiller des athlètes qui auraient pu permettre une amélioration de
leur ranking national et du montant des subventions locales déterminées
justement par ce ranking institué comme critère. D’autres se sont engagés (avec
les moyens du bord) dans des challenges dont l’objectif premier était de faire
mordre la poussière au dragon de l’athlétisme algérien. Beaucoup d’entraîneurs et de dirigeants ont critiqué
le Mouloudia mais autant (si ce n’est les mêmes) sollicitaient le club.
Au tournant de la décennie 90, la donne a complétement changé. La
fédération (voir la contribution de Saïd Lounnas) a modifié les règles du jeu,
l’organisation antérieure. En se voulant détentrice de ce concept
d’ « excellence » nouvellement apparue comme un
leitmotiv dans le discours économique et sportif, s’est érigée en rivale directe
du Mouloudia sans avoir les moyens de sa politique, sans que cela ne soit sa
mission première.
Dans la catégorisation de Saïd Lounnas, le Mouloudia d’Alger (nous
évoquons ici le Mouloudia dont le lien avec Brahmia est évident alors que la
problématique vaut pour les grands clubs algérois en tête de la classification
nationale) appartenait indubitablement à la base de l’organisation athlétique,
celle des clubs et des ligues chargés d’approvisionner le « club
FAA » en talents dégrossis à mettre à la disposition
d’entraîneurs n’ayant pas fait leurs preuves.
Les lecteurs des bilans nationaux se limitant à ce fameux « Top
10 » auront remarqué certainement l’apparition d’un sigle curieux
faisant apparaitre la fédération (ou une ligue) comme structure d’appartenance
de l’athlète. Nous reconnaissons ici que, pour ce cas particulier, nous avons
une vision passéiste et que nous sommes restés à la notion d’ « athlète
individuel » indiquant, il y a des décennies, que l’athlète -
n’étant pas affilié à la fédération via l’appartenance à un club - se faisait
établir une licence par sa ligue de rattachement et qui, par obligation
réglementaire, lors d’une compétition, devait porter un maillot noir. Le comble
est que les « mutations » d’athlètes ne répondent pas
aux règles qui, décidées par la fédération, s’appliquent aux ligues et aux
clubs mais pas à elle. L’accord du club quitté n’est pas dans ce type de
situation indispensable.
Le Mouloudia a été, quoiqu’on puisse prétendre aujourd’hui, dans un
contexte précis, un vecteur du développement sportif et social. Le Mouloudia
(via le parrainage de Sonatrach) apportait un plus à des athlètes issus de
milieux le plus souvent démunis et dont l’avenir social était fortement bouché.
Structure de gestion de l’athlétisme sur l’ensemble du territoire
national, la fédération s’est donc mise sur le même plan que les clubs. Avec un
statut et surtout un budget de fonctionnement insuffisant pour la bonne marche
de ses ambitieux projets sportifs.
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