lundi 19 mars 2018

Ali Saidi Sief (13), Entre les deux, mon cœur….


Malgré l’écoulement du temps et l’éloignement de sa famille,  Abdi Youcef, bien qu’il ait payé le prix fort du dépaysement, estime qu’il a réussi son aventure australe. Il dit avec pudeur : « je vis très bien et (….) rien ne me manque ». Quand le mal du pays le tenaille, il prend l’avion (avec femme et enfants) pour venir humer l’odeur du genêt.
D’autres athlètes plus âgés, dans la plénitude de leurs capacités athlétiques, ont choisi de tourner leurs  regards vers d’autres horizons, vers le « Vieux continent » ou le « Nouveau Monde » où ils s’installèrent définitivement. Gatte Ryad, ancien membre du  groupe constitué autour de Hassiba Boulmerka, en fait partie. Il s’est installé, aux Etats-Unis où il a fait sa vie en épousant une Cubaine (réfugiée à Miami) rencontrée au cours des stages organisés sur l’île castriste.
Ce furent des émigrants au sens plein du terme. Ils préfigurèrent les « athlètes migrateurs » d’aujourd’hui.
Ces anciens athlètes se distinguent toutefois des athlètes appartenant à la nouvelle génération. Ces derniers ont, pour l’heure, contrairement à leurs aînés auteurs d’un choix cornélien. Ils font le grand écart entre les deux rives de la Méditerranée. Un pied est sur le sol du pays qui les a vus naître et un autre là où se déroule la majeure partie de leurs existences sportives. Là où ils concourent régulièrement et où ils tentent de réaliser les minima de participation aux compétitions internationales, en tant que représentants algériens.
Ils attendent (on ne doit pas en douter) des jours meilleurs perçus par le truchement d’un changement de nationalité sportive. D’ailleurs, ces derniers mois, il n’y a plus aucune gêne à exprimer cette tentation (motivée, expliquent les concernés ou leurs proches, par les mensonges et les déclarations dilatoires, l’indifférence générale des responsables et la déliquescence du mouvement sportif national) sur les réseaux sociaux.
Les tabous d’hier n’ont plus court. Ils ont été brisés par les norias d’universitaires de tous profils, de médecins et par les hommes politiques évincés ou les opposants au régime, et leurs proches familles.
Ce qui n’est pas dit, c’est que dans les pays d’accueil, où les autochtones éprouvent les pires difficultés à vivre, les athlètes vivotent sous un statut peu reluisant qui souvent n’est guère éloigné de celui de SDF.
Ils y échappent parfois grâce à la générosité et à l’assistance multiforme apportée par d’autres sportifs émigrants, leurs aînés, leurs prédécesseurs plus ou moins bien installés. Ces derniers reprennent le flambeau porté par les premières générations d’émigrés. Ils se comportent en une sorte de relais, en acteurs de la filière de l’entraide traditionnelle qui a accompagné les vagues migratoires successives comprises entre l’après-seconde guerre mondiale et la fermeture des frontières à l’émigration.
Le phénomène des « athlètes migrateurs » est apparu, dans sa forme organisée que l’on connait aujourd’hui, vers 2012. Il y a lieu de comprendre qu’il s’agissait alors d’une émigration temporaire ayant pris deux aspects. 
Le premier est celui emprunté par des athlètes perpétuant le mode organisationnel ayant eu cours pendant la période étatique de l’histoire de l’athlétisme algérien.
Ils  s’organisèrent en petits groupes afin de participer à des tournées de compétitions hivernales et estivales leur offrant l’opportunité de se frotter à une adversité prétendument plus forte que celle qu’il serait possible de trouver dans les compétitions du pays, délaissées par les athlètes émergents.
La situation est cocasse. En effet, ces athlètes se retrouvent sur les mêmes pistes d’Europe, participant à des meetings dont le niveau, la qualité ne répond pas toujours à ce qu’ils avaient rêvés. Des compétitions nationales (françaises, allemandes, suisse, italiennes, espagnoles, turques, etc.) à participation internationale dont ils enrichissent le plateau en appauvrissant, dans la foulée, la participation aux meetings algériens.

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