La fameuse philosophie de l’excellence, dont se prévalent (dans la
perpétuation de la vision qu’en avait Saïd Lounnas mais sans les qualités de
leader charismatique de ce dernier) les Amar Bouras et ses compagnons, a montré
ses lacunes, son caractère subjectif et, semble-t-il, exclusif.
Abdelhamid Zerrifi, en évoquant le cas d’Abderrahmane Anou, déclare, sans
donner beaucoup de détails, sans
approfondir le sujet, que le jeune coureur de 1 500 mètres «a
réalisé les minimas sur le 1500 m (3'35)
pour les Jeux olympiques de Londres en 2012 ». On comprend
implicitement qu’à Londres, Anou (3ème performer algérien en 2011 et
2ème en 2012 avec des chronos établis en juillet et en juin) aurait
pu être un compagnon de route pour Toufik Makhloufi qui, lors de ces Jeux
marquant le début de son ascension, remporta une médaille d’or que nul n’entrevoyait.
Surtout pas à la FAA. Il n’était pas dans les plans de la DTN. Le jeune Anou n’y
figurait pas non plus.
Une médaille conquise dans des
conditions qu’il serait préférable d’oublier tant elles sont indignes d’une
fédération performante, prétendante à la gloire olympique. Des conditions qui
provoquèrent un débat déprimant pour les jaloux des couleurs nationales. Un
contexte sportif et réglementaire qui fit de cette fédération la risée du monde
athlétique.
Lorsque l’on replonge dans le passé récent, celui de la dernière
olympiade, nous devons préciser qu’aux jeux olympiques de Londres (2012),
prétexte à l’exclusion d’Abderrahmane Anou, Ammar Bouras n’était pas encore le
président de la FAA. Il le deviendra quelques mois plus tard.
Le DTN, pierre angulaire du projet sportif de la fédération, était en
poste. Il est d’ailleurs toujours en place. Si puissant, si incontournable dans
l’édifice fédéral que le président
Bouras, ayant dégommé (unilatéralement, en dépit des règles de nomination des
cadres permanents des fédérations) le secrétaire général de la fédération, l’a
proposé au ministère de la jeunesse et des sports pour assurer l’intérim.
En 2011, Anou avait couru le 1 500 en 3.35.2 à Alger. La meilleure
performance de Makhloufi avait été cette année-là 3.34.4. L’année suivante,
année olympique, il récidivait avec un chrono de 3.35.62. Comme le dit si bien
Zerrifi, « À 21 ans seulement, ils ne l’ont pas emmené sans aucune
raison. Pourtant, il s’agit d’un jeune très prometteur ». Ce n’est
que le point de vue d’un athlète marginalisé, en colère, frustré par ce qui lui
arrive qui devient le défenseur d’un nouveau coéquipier. On dira ensuite que
l’athlétisme est un sport individuel.
Les décisions fédérales changent avec le temps. En 2012, un jeune coureur
au profil relativement consistant (vice-champion du monde junior en 3.38,
membre du « Top 3 » algérien sur sa distance de prédilection
deux années successives qui se révèlent être l’année préolympique et l’année
olympique, auteur au cours de ces deux mêmes années d’un 3.35 le classant autour
de la 50ème place mondiale) n’est pas retenu pour les jeux
olympiques pour courir la distance préférée des Algériens. Quatre ans plus
tard, un autre jeune, du même âge (21 ans) n’ayant pas atteint la maturité du
premier, avec un chrono le hissant à la 62ème place mondiale fait
partie du voyage.
Zerrifi observe que, 4 ans après que la fédération ait pris la décision de le laisser à la maison, Abderrahmane
Anou « est maintenant délaissé ». En réalité, au début de la
dernière saison sportive (2015-2016), Anou avait disparu complètement du
paysage athlétique algérien. Personne ne savait ce qu’il était devenu. Jusqu’à
ce que nous retrouvions sa trace dans un article, paru sur un site français,
indiquant sa présence à Montpellier.
Nous devons supposer que c’est cette situation de rejet qui l’a conduit
sur le chemin difficile de l’exil pour tenter de renaître sportivement. Un
exilé qui a rompu le lien qui l’attachait à la FAA et aux subsides des pouvoirs
publics. Zerrifi qui connait bien le milieu ajoute pour rencontrer régulièrement
ses compatriotes (les athlètes-migrateurs et les coureurs exilés) dans les
compétitions organisées sur le sol français : « … et il n'est pas le seul! ».
Combien sont-ils ? Combien ont-ils été ? Nous ne le savons pas
et nous ne le sauront pas. Les réseaux sociaux indiquent cependant que la
progéniture des champions d’il y a un quart de siècle ont fondé des foyers
féconds en jeunes champions s’exprimant valeureusement en terre d’exil.
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