Rachid Mekhloufi, celui que l’on considère comme le «
footballeur des deux rives » de la Méditerranée pour avoir émerveillé les
passionnés du ballon rond (et les autres) de la planète foot et fait partie des
équipes nationales française et algérienne, comme un génie, un feu follet de la
balle et certainement le plus doué et le plus attachant des footballeurs
algériens est sorti de l’ombre dans laquelle il est confinée à l’occasion d’un
article que lui a consacré la référence du journalisme sportif de langue
française : « L’Equipe ». Un article d’une page correspondant à
deux pages de nos tabloïds
Nul n’a relevé que cet article est le plus bel hommage qui puisse être
accordé à un joueur de football algérien jouissant d’un très grand respect au
Nord et au Sud de la « Mare Nostrum », cette mer que les Romains
avaient fait leur. Pourtant, Rachid Mekhloufi aurait pu ne pas voir son talent
reconnu par les Français. Lui, le ₺Stéphanois₺ venu de Sétif, un jeune joueur
prometteur et promis aux plus grandes destinées qui a fait faux bond à l’équipe
de France se préparant à disputer la Coupe du Monde de 1958 pour rejoindre ce
qui deviendra l’équipe du FLN, l’équipe représentative des moudjahidine et des
fellagas, des rebelles algériens montés au maquis pour lutter contre le système
colonial.
Des hommages, le vénérable Rachid Mekhloufi en a reçu tout au long de
sa carrière de joueur, d’entraineur et de dirigeant. Ici et surtout ailleurs.
Mais, celui-là est le plus grand. Un hommage des adversaires d’hier, d’il y a
plus d’un demi-siècle signifiant que quelque part, une page nostalgique a été
tournée. Mais, pour Rachid, elle l’a été dès le recouvrement de la souveraineté
nationale avec un retour dans les rangs des « Verts » de Saint
Etienne tout en portant le maillot des « Verts » d’Algérie.
Le gamin de Sétif revient donc dans les pages d’un grand quotidien
sportif à l’occasion d’un 8 mai, date symbolique d’une double commémoration
d’un 70ème anniversaire.
Celui sur la rive Nord du retour de la paix après plusieurs années de combat et
la défaite des nazis. Mais, aussi sur la rive Sud, celui des massacres de
Sétif, Kherrata et Guelma.
Rachid Mekhloufi est un moudjahid dans l’âme. Un éducateur comme le
furent ses pairs et ses ainés combattants et politiciens. Son combat il l’a
mené des années durant balle au pied ou sifflet (signe distinctif des
entraineurs) aux lèvres. L’éducation est la chose la plus importante qui soit.
Avec des mots simples, il le dit : « Quand tu as des joueurs qui ont quelque
chose dans la tête, tu peux leur faire réussir et comprendre beaucoup de
choses. Mais quand ils ne savent pas dire deux mots de suite et que l’argent
leur tourne la tête, c’est un malheur. C’est pour ça qu’il n’est pas question
de pinailler avec l’école et l’éducation ». Nous comprenons qu’il
soit déçu par ce qu’il voit sur les terrains d’aujourd’hui.
La France avait été traumatisée par le départ incompréhensible de
Makhloufi, Aribi, Kermali (joueurs professionnels formés à Sétif), Maouche,
Zitouni, Boumezrag, etc. dont le statut social était meilleur que celui de la
majorité de leurs compatriotes du « bled ». Elle l’est toujours.
Chaque joueur franco-algérien qui rejoint l’équipe des « Fennecs »
est ressenti comme un autre outrage ravivant des souvenirs, des douleurs qui
malgré les ans ne veulent pas s’effacer. Les similitudes sont si nombreuses. La
question identitaire demeure posée.
Le choix de Rachid Mekhloufi est connu, accepté, respecté. Ceux des
Franco-algériens l’est moins. Encore une similitude même si Rachid Mekhloufi
observe qu’ils ne sont ni tout à fait Français, ni tout à fait Algérien, rendant
le choix encore plus difficile. Il ne pouvait ne pas évoquer le cas de Nabil Fekir
dont il comprend le choix «à partir du moment où il est né en France,
qu’il y habite et y joue» mais dont l’hésitation lui a déplu. Il dira à
ce sujet « Ça n’a été que du marchandage » avant
d’ajouter « on n’a pas le droit de marchander son pays
». Il aurait pu ajouter quelque soit le pays choisi. Rachid Mekhloufi ne l’a
pas fait mais a du le penser.
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