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près que les médias eurent eu connaissance du changement de nationalité
sportive de David Torrence la question qui lui fut posée marque distinctement
la surprise des journalistes américains. En effet, dans leur inconscient
collectif, il est très difficile d’accepter, en vertu de l’image de puissance
que dégage cette nation, qu’un citoyen américain, présentant les apparences
d’une intégration parfaite ( ?) à la société dans laquelle il vit, puisse
acquérir une nationalité sportive autre et, qui plus est, d’un des pays
sud-américains véhiculant une image de déconsidération.
Ne soyons pas naïfs. Si nous avions tendance à l’être, un élu français
dans le Sud du pays des droits de l’homme, anciennement premier responsable
d’une ONG internationale, s’est chargé de nous rappeler que le patronyme est un
marqueur identitaire, ethnique. David Torrence a, par bonheur dans cette nation
où les « hispaniques » sont aussi bien vus que le sont
les maghrébins en Europe, la chance de ne pas détoner.
La première question qui lui fut posée est : « Pourquoi
courir pour le Pérou plutôt que d'essayer de faire partie l'équipe des États -
Unis? » suivie par un appendice qui prouve bien que les apparences
sont trompeuses et qui situe la place qu’occupe le pays (Etats Unis) à la fois
dans l’esprit de ses citoyens et dans l’univers du sport. Ce changement de
nationalité sportive est perçu comme une forme de régression dans la hiérarchie
des nations : « Parce que vous avez participé à des
compétitions internationales avec l’équipe des Etats Unis l’été dernier ».
Pour mémoire en juillet 2015, David Torrence non seulement participé aux jeux
panaméricains, avec la « bannière
étoilée » pour étendard mais y remportait aussi une médaille
d’argent.
David Torrence, comme dans une partie de pétanque fleurant le Pastis
de l’édile languedocien, pousse le bouchon un peu plus loin en notant qu’il
avait représenté son pays (les Etats Unis) à plusieurs reprises. Les
explications données nous semblent manquer de netteté. Sans doute les
conséquences d’une traduction très approximative dont nous avons pu tirer que
ce changement de statut sportif est la conséquence d’ « un peu
d’introspection » à laquelle se sont ajoutés la possibilité
d’aller au bout de soi-même et d’être un modèle pour trois catégories de
personnes : « les athlètes, les non-athlètes et les enfants ».
Il réalise aussi que les États - Unis peuvent remplir les quotas de
places autorisés par la réglementation aussi bien dans les épreuves auxquelles
il peut participer mais aussi dans les autres épreuves et les autres
disciplines sportives. Ce n’est pas le cas du Pérou qui ne peut aligner
qu’une « une poignée d'athlètes » qu’il estime à
une vingtaine.
Dans sa réflexion qui stupéfait par sa rigueur, sa logique, sa
froideur, l’impact d’une participation à une finale aurait un impact beaucoup plus important sur la
population péruvienne et apporterait un changement de la culture sportive du
pays (possédant de bons marathoniens) en introduisant l'idée de parcours
professionnel permettant aux coureurs de demi-fond d’exploiter leurs qualités.
On retrouve, en y prenant garde, le côté bon samaritain des Américains
et un égo surdimensionné qui perce lorsqu’il dit : « Je me sens
plus "percutant" (représentatif ?) en qualité d’athlète péruvien
que comme athlète américain ». Il a conscience des commentaires
que cela va entraîner dont celui du choix de la voie de la facilité pour
l’obtention du ticket pour Rio.
Devenir Péruvien implique dans l’esprit du journaliste l’obligation de
parler la langue du pays sportivement rejoint, l’espagnol : « Parles-tu
espagnol? », lui a-t-il était demandé. On apprend que c’est sa
langue maternelle, qu’il la parle presque couramment, que c’était le moyen de
communication avec sa mère et les membres de sa famille péruvienne qu’il
retrouvait presque tous les deux ans. Dans ses explications, on sent comme une
forme de communautarisme qui trouve son origine dans le décès de son père
américain lorsqu’il était âgé de 6 ans et l’entourage maternel qui l’a pris
sous son aile : « Quand j'avais environ six ans, mon père est
décédé. Mon père était américain, ma mère était péruvienne. Quand il est
décédé, j’ai été recueilli par le côté péruvien de ma famille. Chaque jour
après l'école, j’allais chez ma grand - mère pendant que maman travaillait.
Là-bas, c’était comme un petit Pérou. Elle me parlait espagnol. Nous avons
mangé la cuisine péruvienne, écouté de la musique péruvienne. J'ai un lien très
fort avec mon patrimoine péruvien. Par cette éducation, je me suis toujours
considéré comme péruvien-américain et non pas seulement américain ».
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