Alberto Salazar et Aden Jama forment un duo d’entraîneurs d’athlétisme
dont la réputation est entourée par une multitude de controverses. Tous les
deux sont régulièrement dénigrés par leurs pairs qui ne supportent pas
leurs réussites insolentes et voient en elles les effets d’une pratique
perverse dont bien évidemment, en première ligne des récriminations qu’ils suscitent,
le dopage.
Les méthodes d’entraînement sont taxées de révolutionnaires bien qu’on
en sache très peu à leurs sujets, de ce côté de l’Océan Atlantique s’entend.
Une certitude cependant, leurs athlètes défraient la chronique par leurs
performances. Depuis février 2011, le groupe NOP s’est internationalisé. En
plus de Mo Farah, il comprend le Canadien Cameron Levins (13. 15.19 au
5 000 et 27.07.51 sur le 10 000) et le Japonais Suguru Osako (13.08.40 et
27.38.31).
Aux Etats Unis, ses méthodes surprennent. Quand elles ne provoquent
pas l’étonnement, l’irritation, des polémiques interminables et, cela va de
soit, une montée de suspicions chaque fois que les athlètes du groupe connaissent
le succès ou réalisent des performances. Au-delà de tout cela, reconnaissons
que - pour le grand public - la méthode Salazar a du bon, fait provisoirement
taire les jalousies, lorsque Farah et Rupp montent ensemble sur le podium des
jeux olympiques de Londres.
Dans les milieux de l’athlétisme américain, les excès de Salazar et de
ses athlètes agacent. Surtout lorsqu’ils
se donnent en spectacle. Le 27 janvier 2014, sur la piste de l’ « Armory
Track Club » de New York, Galen Rupp bat d’abord le record américain
du 2 miles en salle en 8.07.41 puis enchaîne une séance mettant en ébullition
les esprits : 5 fois un mile en 4.21, 4.20, 4.20, 4.16 et 4.01 avant de
terminer par 3 x 150 mètres.
Les coaches et les athlètes n’ont pas laissé passer sans réagir un tel
enchaînement qui ne répond pas aux normes de l’orthodoxie de l’entraînement,
des pratiques humainement connues tandis qu’Alberto Salazar n’a pas fourni de
justifications à une telle séance que son assistant Steve Magness, conseiller
scientifique au sein du Nike Oregon Project, avait expliqué, trois ans plus tôt,
dans un article publié le 25 octobre
2011 dans « Running Times ».
Un an plus tard, presque jour pour jour, lors du même meeting, sur la
même piste, dans une sorte de séance de rappel, Cameron Levins enchaîne un mile
et 2 miles séparés par moins de trente minutes. Le coureur canadien de 29 ans, classé
à la 11ème place aux J.O. de
Londres sur 10 000 mètres et médaillé de bronze lors des Jeux du Commonwealth de
Glasgow, s’attaque à un programme qui, comme celui de Rupp, une année plus tôt
est qualifié de « ridiculous ».
Les rires et sourires n’atteignent pas Cameron Levins, un forçat de
l’entraînement qui alignait jusqu’à 300 kilomètres par semaines et s’entraînait
parfois jusqu’à 4 fois par jour avant qu’Alberto Salazar ne le remette dans le
droit chemin avec des charges et des intensités jugées «normales». En 2013, Levins confiait ne courir que 180
kilomètres par semaine, sans compter le travail en piscine.
Sur la piste new yorkaise, « Cam » Levins
court le mile en 3.54.74 (à 52 centièmes du record national canadien) et, 32
minutes plus tard, il s’élance pour les 2 miles courus en 8.15.38 (7.36.96 au
3 000).
En 2011, Steve Magness, auteur du best-seller de l’entraînement de la
course à pied « Science of Running » avait validé
ce type d’enchaînement (qu’Alberto Salazar a depuis modélisé) dont l’utilité se
situerait uniquement en début de préparation hivernale pour travailler les
points faibles.
L’ancien assistant de Salazar (qui depuis a quitté le NOP) explique
l’intérêt de la super-compensation.
Après une course de 5 000 mètres, les taux hormonaux sont tels
qu’ils permettent de travailler sur des seuils de fatigue (et de bénéficier
d’effets) qu’il ne serait pas possible d’obtenir dans des circonstances
normales. Les taux d’endorphine sont à un niveau élevé et le système cérébral
se trouve dans une situation d’hyper-sollicitation favorable pour supporter une
telle intensité.
Si encore aujourd’hui, d’une manière générale, le scepticisme l’emporte
sur l’intérêt réel de tels schémas d’entraînement considérés comme dangereux pour la santé des
athlètes, certains estiment que la mise en avant de cette méthode est un
subterfuge pour occulter une préparation plus complexe et plus obscure.
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