lundi 6 mars 2017

Sous l’olivier N°32 du 28/24/2015 El "maratoune"de Constantine (2) A la mode du "2 en 1"


"El Maratoune". Voila ce qu’est la course de route de Constantine que l’on affublé pompeusement du qualificatif de semi-marathon alors que sa distance n’effleure que les 15 kilomètres au lieu des 21 kilomètres et une centaine de mètres que prévoit la règlementation internationale. Une course qui s’est mise à la mode du « 2 en 1 » par la fusion de deux courses qui chacune avait son charme (la course entre les ponts et le ₺semi-marathon₺ Abdelhamid Benbadis) et la disparition du plus ancien et du plus emblématique (₺le Benbadis₺).
La langue dialectale, ₺el Derdja₺ que des universitaires s’efforcent de réhabiliter et de promouvoir face à l’impérialisme de la langue enseignée dans les établissements scolaires, est savoureuse, porteuse de la richesse populaire. ₺El maratoune₺ a suscité nombre de réflexions ironiques tout le long du parcours de la course. Des moqueries et des remarques pleines du bon sens populaire que les officiels n’ont pu entendre dans l’espace policé qui leur était réservé à l’arrivée de la course.
Le petit peuple, s’arrêtant un instant, plus ou moins long, pour regarder passer les coureurs, a émis des observations édifiantes qui démontrent que le populaire n’est pas dupe. « ₺Maratoune₺ ? Ils viennent du centre ville, ils retournent au centre ville » pour caractériser la brièveté de la course conçue comme une seule et unique boucle.
« Chouf, le parcours ! Ils leur ont mis une côte qu’une voiture ne peut  monter qu’en deuxième. Ilveulent les tuer ! ».
Jeunes et vieux, tous ont eu la dent dure pour ces organisateurs de ….. ₺pacotille₺ pour reprendre une expression trop souvent entendue. L’expression populaire en dialectal est encore plus expressive et n’est pas rendue par notre traduction.
Sans être des connaisseurs indiscutables de la course à pied, sur le parvis de la mosquée Emir Abdelkader surplombant une partie de la course (près de 500 mètres de pente), des témoins de mariages religieux qui fleurissent avec le retour des beaux jours, passionnés par Internet et les télévisions satellitaires, attendant la célébration des cérémonies,  ont eu des commentaires à faire rougir de honte ₺les techniciens₺ bon teint et bien d’hommes de culture. Des propos qui invalident tous les discours sur… l’inculture populaire.
Certains ont fait des rapprochements avec les ₺courses de montagne₺. Un autre revenant d’un voyage à Lyon (France) raconta qu’il avait assisté à une course dans les rues de la ville qui ne s’appelait pas ₺semi-marathon₺ mais ₺Lyon urban trail₺  qui serait justifié par les successions de pentes et de descentes affrontées par les coureurs.
Toujours sur le même lieu, le changement de nom a fait débat. Nombreux ont été ceux qui ont lié la débaptisation de la course à un autre événement s’étant déroulé quelques jours plus tôt : le déboulonnage de la statue de l’imam Benbadis offerte par un promoteur étranger à la ville de Constantine à l’occasion de la manifestation culturelle « Constantine, capitale 2015 de la culture arabe ».
L’un deux venu d’El Eulma, capitale du commerce, ayant beaucoup voyagé pour ses affaires, dans les pays du bassin méditerranéen, dit avoir vu une statue inesthétique de Christophe Colomb installée au port de Lisbonne regardant vers l’Ouest, l’Océan Atlantique, vers l’Amérique centrale et les Caraïbes. Un autre monde qu’il découvrait pendant que les musulmans débutaient leur reflux d’Andalousie et que les Barberousse régentaient Alger. « Ils n’ont pas cherché la ressemblance mais la symbolique », affirma-t-il. « Colomb représente, quoiqu’on en dise, la découverte de l’Amérique. C’est ce que les Portugais ont retenu. Pas que la statue est moche ou inexpressive ! ».
Un autre, à l’accent caractéristique des frontières orientales du pays numide où subsisterait encore ce qu’un homme politique avait qualifié d’ « archaïsmes sociétaux », commence par un « Loukane fi bledna… » pour terminer par « on n’aurait jamais retiré la stèle d’une personnalité locale, d’une personne représentative de la localité ».

C’est du pays chaoui qu’est venu le coup de grâce : « l’imam Ibn Badis, avait placé l’islamité et l’arabité avant l’amazighité. Il a placé, dans son triptyque, l’authenticité des racines de la population algérienne après les apports extérieurs. Voila ce qu’il advient lorsqu’on oublie ses origines. On commence à effacer son existence. On enlève sa statue à peine érigée et on retire son nom à un non-événement sportif». 

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