mercredi 20 avril 2016

Statut des SSPA (7), Les supporters dans la marge

D
e tous temps, et avec plus d’acuité lorsque la crise est présente et bouscule les habitudes routinières qui se sont installées, le quatrième élément du paysage sportif, que nous n’avons pas encore désigné, est interpellé de tous côtés, par de multiples voix, souvent chicanières et confuses, afin qu’il prenne parti pour l’une des factions en confrontation, pour l’un des prétendants à une fraction supplémentaire d’autorité et à l’imposition d’une volonté non partagée. Les dirigeants des clubs sportifs, quelle que soit la forme juridique adoptée, associations ou société commerciales, amateurs ou professionnelles, les placent au rang de sauveurs, d’unique et ultime solution à leurs inconséquences, à leurs impuissances.
Ils sont ceux que les hommes politiques, dans les circonvolutions langagières qui sont les leurs, ajoutant au trouble généralisé, appellent le peuple, la référence ultime intervenant en dernière instance. Ce « peuple » que la presse-people-foot (algéroise et leurs correspondants sous d’autres cieux) invite indirectement à soutenir les dirigeants désemparés ou à se positionner en arbitres. Une masse indéfinie renvoyant aux harangues populistes d’hier adressées à des foules massées au pied de la divinité sportive adorée. Un mot qui met en première ligne la force populaire que l’on appelle en soutien, dont on sait qu’elle est capable d’édifier des barricades ou de les abattre, selon les situations. Une puissance que l’on redoute, dont on dit qu’elle a voix au chapitre alors qu’il n’en est rien, des citoyens sans droit de vote. Ni électeur, ni éligible.
Ce sont les supporters dont les surnoms « Chenaoua » (Chinois) pour ceux qui ne vivent que pour le MC Alger, « Sanafirs » (Schtroumpfs) pour les adorateurs de l’équipe du CS Constantine ou les « Crabes », accompagnateurs du MO Bejaïa renvoient à la multitude, à une taille réduite et à l’agitation frénétique qui seraient la caractéristique de la jeunesse.  Ce sont eux qui sont les composants des marches, sit-in et autres actions populaires qui, selon la volonté des déclamateurs, seront soit révolutionnaires soit partisanes de la préservation du statu quo. Dans presque toutes les dissensions, entre sociétaires, entre associés, entre sociétaires et associés, leur arbitrage est sollicité.  Bien entendu, lorsque la phase extrême est dépassée, ils retourneront à la place de majorité silencieuse qui leur est dévolue, dont la voix est inaudible car quasiment inexistante.
Dans la définition juridique des sociétés sportives par actions, il n’est fait aucune place aux supporters. Si ce n’est marginalement lorsqu’il est question de ressources et de billetterie, de droits d’entrée aux spectacles. Ce statut de spectateurs évacue adroitement le droit, accordé par les discours partisans, à peser sur la prise décision, sur la gouvernance de la SSPA. Les supporters, les spectateurs n’ont quasiment aucun droit dans le cadre juridique organisant le fonctionnement des SSPA et des associations sportives.
Tandis que le sport professionnel, symbolisé par la SSPA dans la forme retenue par les pouvoirs publics ne l’autorisant pas à faire appel à l’épargne publique, ne peut pas admettre en son sein les supporters car ceux-ci ne disposent pas du statut d’associés, l’association sportive amateur lui concède une place peu représentative de son importance quantitative. Le comité des supporters, le regroupement juridiquement formalisé des amoureux de l’association, fait certes partie de l’assemblée générale du club sportif mais n’y est représenté que par la seule voix délibérative de son président.
Une lecture attentive de l’article 13 du décret exécutif 15.74 montre que seul UN comité de supporters est admis à en faire partie. Celui-ci les représente tous sans distinction de mouvance, sans considération pour les différences qui font qu’ils se distinguent en groupes ou groupuscules. On ne sait trop s’il s’agit d’un résidu de la pensée unique unissant dans un conglomérat des factions rivales ou une perception centralisatrice d’une vision tendant à noyer l’opinion des masses populaires.

Pourtant les supporters, en dehors du cadre délibératif et de leurs statuts dans la société sportive, ont un rôle essentiel dans la survie du club dépendant de leur apport financier aux guichets devant lesquels ils s’agglutinent par milliers et dizaines de milliers. 

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