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a fonction de président de
club, a fortiori professionnel, n’a jamais été (et ne sera jamais) une
sinécure. Surtout dans l’environnement dans lequel évolue ces clubs de football
en crise financière permanente, à la recherche éperdue de ressources de plus en
plus inaccessibles dans une économie en perte de vitesse ne pouvant plus
compter sur la rente pétrolière, confrontés à une inflation non contenue des
charges où celles de l’HTR (hébergement, transport et restauration) rivalisent
avec la surenchère salariale et autres avantages financiers.
Ces courageux (?)
dirigeants –au sujet desquels on se demande a posteriori s’ils ont conscience des
risques encourus, transcendés par la passion éperdue et sans limites qu’ils portent aux couleurs vénérées, sont
pris (chaque jour qui passe le confirme avec plus d’acuité) en otage entre les
pourvoyeurs de fonds que l’on affuble de temps à autre d’expression
sémantiquement similaires (détenteurs principaux ou majoritaires des actions du
club, bailleurs de fonds, commanditaires, sponsors, mécènes, etc.), les
actionnaires (propriétaires souvent mineurs des sociétés sportives par actions
mais activistes notoires propulsés sur le devant de la scène au moment de la
transition et prétendument porteurs d’une légitimité historique acquise sur les
gradins et une assise financière prétendument saine), les coachs fragilisés par
un statut et une réglementation qui en ont fait des « intermittents du
foot », recrutés au gré des réactions maniaques et épidermiques des uns et
des autres, les joueurs avides (issus des périphéries sociologiques, urbaines
et rurales, très souvent précocement exclus des systèmes scolaire et
professionnel) transformés, par la force des choses et la mécanique du système
en mercenaires en quête d’un dinar de plus, formatés à la mobilité par
l’illusion généralisée de compétence et la recherche à tout prix de la victoire
qui en font des marionnettes entonnant des chansons mille fois répétées au gré
des illusionnistes.
Ces mêmes présidents de
clubs sont, par leurs propres fautes et leurs actes initiateurs, enserrés dans
les rets du populisme outrancier qu’ils ont créé en promettant victoires et
titres à des supporters issus des mêmes milieux périphériques qui, s’ils ne
sont pas partie intégrante du lumpenprolétariat, semence et ferment de la
révolution populiste, en sont, sur les plans de l’idéologie, de la culture et
de l’éducation, très proches.
Ce sont ces forces
agissantes (activistes quelquefois) qui font et défont les présidents. Partout,
à Alger, Tizi Ouzou, Constantine, Oran et dans toutes les villes qui hébergent
un club professionnel (ou qui prétend l’être) sont en action y compris en
envahissant la rue dans une démonstration se voulant spectaculaire de la
démocratie populaire que vante à n’en plus finir les marionnettistes patentés
accédant au pouvoir sportif par ce piédestal notoirement incontrôlable,
superficiel dans ses intentions, profondément rétif à l’ordre établi tout en
étant constant dans l’obligation de faire respecter des promesses qui, à un
moment donné, ont résonné comme des promesses électoralistes dont ils savent
pertinemment qu’elles ne seront pas tenues. Le pacte sportif dans toute sa
clarté et nudité.
Comme dans les autres
sphères de la société auxquelles cette mécanique a été empruntée, le moteur de
la dynamique de la gestion sportive est la harangue à travers une presse (qui
se délecte des voltes faces et s’acoquinent avec tous les prétendants) et la mise en œuvre de réseaux de communication
informelle.
Comme dans les mouvements
ouvriers et les révoltes sociales, c’est la conjonction des « forces
d’opposition » qui fait et défait
les présidents et leurs staffs directionnels, assemblages de conceptions et d’appétits en
permanence désunis et en recherche permanente d’équilibres fragiles et de
consensus introuvables pour se pérenniser ad aeternam.
C’est sous cet éclairage
que l’on se doit de comprendre les manifestations discursives répercutées sans
retenues des présidents de clubs en détresse. Acculés dans leurs derniers
retranchements par l’inassouvissement d’espoirs trop fortement ancrés dans les
esprits à la suite d’une propagande démesurée et incompatible avec les moyens
disponibles, il ne leur reste plus qu’à provoquer la désunion. Si ce n’est
l’implosion quand décision est prise (de leur propre initiative ou contraint et
forcé) de quitter les rênes du pouvoir sportif. C’est dans cette perspective
qu’il faut inscrire les déclarations intempestives (inutilement agressives) du
président du CA du CSC démis de ses fonctions de PDG par l’actionnaire
majoritaire ou celles du président du CA du MCO poussé dans une impasse par son
entraîneur et les supporters. Une véritable
politique de la terre brûlée.
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