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la veille du Mawlid
Ennabaoui, quelques supporters du Mouloudia d’Alger, doyen des clubs algériens,
club emblématique s’il peut en être, qui dès sa création s’est donné une
perspective innovatrice en investissant dans les forces vives populaires d’une
nation en attente du recouvrement de sa souveraineté et se plaçant, selon ses
partisans, dans une dimension d’opposition au pouvoir colonial en exhibant sa
prévalence religieuse, se sont retrouvés pour montrer leur exaspération en
perturbant une nouvelle fois une séance d’entraînement. Une réaction qui pour
toute personne douée de raison est inexplicable dans un contexte où l’équipe
qu’ils chérissent plus que tout, après une longue période de résultats mitigés,
revient – suite au changement des staffs directionnel et technique effectués
dans la tradition sportive de ces chocs psychologiques destinés selon les
stratégies de perpétuation de leadership à permettre le redressement des
groupements sociaux en plein désarroi - aux premières loges d’un championnat de
Ligue 1 en perpétuel et impossible équilibre et qui plus est dans une période
où les écarts ne sont pas déterminants y compris entre ceux détenteurs d’une
relative aisance financière et les quémandeurs de subvention .
On ne peut s’empêcher de
toute évidence de lier ce débordement au résultat final de la rencontre qui,
quelques jours plutôt, avait opposé l’étendard historiquement religieux du
mouvement sportif national à son éternel rival local (l’USM Alger) dans un
derby entre deux équipes, d’un seul et même quartier, représentatives de strates
socio-idéologiques divergentes. Un résultat qui n’a pas l’air de satisfaire les
supporters les plus endurcis.
C’est certainement dans
l’humus idéologique, sociologique et populiste qu’il faut rechercher les
racines d’un moment sur médiatisé d’un club porté à bouts de bras par la presse
sportive à sensation à l’affut de ces situations pré révolutionnaires qu’elle
suscite et entretient pour le plus grand bonheur de quelques uns dont ses
commanditaires.
Les mouvements de foule de
ce type au cours desquels des supporters surexcités demandent des comptes à des
joueurs et à des entraîneurs livrés à eux mêmes et sans défense devant une
foule déchaînée, les sit-in de protestation devant les sièges d’institutions
sportives et publiques, les marches populaires sans les rues des villes et les
comités de sauvegarde mis en place pour exprimer leurs ras-le-bol et invectiver
font partie de ce que l’on pourrait sans hésitation qualifier de cours normal
des choses dans une société dépourvue de normes, de ces faits sociaux si
courants qu’ils en deviendraient anodins s’ils ne faisaient la
« Une », une preuve itérativement répétée de la gestion des associations
sportives par la rue. D'autres clubs de même stature populaire (CSC, MOB, MCO,
JSK, etc.) vivent des situations identiques, latentes la plupart du temps et
expansives et même explosives en ces occasions de repli identitaire, de retour
à l’authenticité originelle affichés ostensiblement par les
laissés-pour-compte.
Extraordinairement c’est à
l’époque où la gestion des clubs a été confiée (par les pouvoirs publics et la
représentation nationale) à des sociétés commerciales, groupements d’un marqueur
sociétal d’une certaine aisance financière, que la voix populaire se fait
entendre alors qu’elle s’était tue ou faite plus discrète dans un passé récent
lorsque la représentation directoriale des associations sportives était entre
les mains de bénévoles ou de responsables désignés par les entreprises
publiques.
En ces temps nouveaux où les supporters ne devraient
être que des admirateurs, confortablement assis dans des tribunes et des
gradins, d’un spectacle à la hauteur des prétentions managériales, on se surprend
à écouter des déclarations éculées de dirigeants acculés reprenant un discours
(aussi agressif que peut l’être la désapprobation populaire) se référant à
d’autres segments, à d’autres activités
de la vie sociale. Une reprise des
points de vue de leurs prédécesseurs en poste dans un passé récent, détenteurs
d’un pouvoir sans faille, stigmatisant les foules en colère, capricieuses car
éternellement bernées par des promesses non tenues.
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