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remière Algérienne à courir le 400 en moins de 53 secondes (2009), Zahra
Bouras ne fut pourtant pas une athlète hors du commun. Touhami Nahida, de
quelques années son ainée, avait autant de talent mais ne put franchir la barre
des 2 minutes aux 800. Les spécialistes de la distance expliqueront, s’ils en
ont le temps et si cela vaut pour eux la peine de se pencher sur la question,
le pourquoi de ce qui s’apparente à un échec relatif. Ce chrono de 2 minutes (qui
sonne si bien aux oreilles) est encore le minimum situant le niveau
international féminin.
Si Nahida fut incapable de franchir cette barrière, Zahra réussit la
gageure en 2010. En descendant de quelques dixièmes (1.59.54) en dessous de ce
chrono si rond (que beaucoup d’athlètes masculins ambitionnent) qui la classa à
moins d’une seconde du record national de Hassiba Boulmerka.
Cette même année 2010 vit Zahra Bouras remporter le titre africain de
la distance qui fut détenu 22 ans plus tôt par la même Hassiba Boulmerka. Une
Hassiba qui est là toujours présente dans les esprits des amateurs de course à
pied et que jusque-là personne n’a pu détrôner. Alors que dire parmi ceux qui
firent partie de son entourage très proche. Dans la périphérie d’Amar Bouras et
de Mahour Bacha avec qui il forme, depuis toujours un duo inséparable.
Des déclarations de Dadi (Ahmed Mahour Bacha), dans les colonnes de la
presse de cet été 2010 (après les championnats d’Afrique), laissent penser que
l’objectif non déclaré du duo Zahra Bouras-Ahmed Bacha est bien de faire
oublier la Constantinoise dressée en tant que référence, icône indéboulonnable.
Dadi est euphorique. Comment ne pas l’être lorsque deux des athlètes
que l’on entraine sont champions d’Afrique (Zahra Bouras sur le 800 m dames et
Larbi Bourraâda au décathlon). Toutefois, il assure que la page doit être
rapidement tournée. « La victoire doit être vite oubliée »
affirme-t-il. On ne sait trop qui est visé par la suite de ses propos (Bouras
ou Bourraâda) mais il poursuit en observant que « le plus gros du
travail reste à faire, ce n’est que le début d’un long et difficile
parcours ».
Propos éminemment prémonitoires puisque le parcours des deux athlètes
sera difficile. Deux ans plus tard, en juin 2012, tandis qu’ils se préparent
pour les jeux olympiques, à la veille de l’édition des championnats d’Afrique,
les deux athlètes sont pris dans un contrôle antidopage : Bourraâda en
Allemagne où il vient de battre le record d’Afrique du décathlon et Zahra à
deux reprises à Paris et à Lille.
En 2010, Mahour Bacha disait de Zahra que « ce n’est pas
son premier exploit » et que, depuis quelques temps, « elle
progresse de plus en plus ». Ayant battu les Kenyanes, Zahra
Bouras est devenue une héroïne, une coureuse sur laquelle dorénavant il faut
compter. D’ailleurs, cet exploit ne devrait pas être le dernier. Pour Mahour
Bacha, elle a « encore beaucoup de réserves ».
Quelles étaient les pensées de
Zahra Bouras à moment de son parcours ? On n’en sait trop rien. Elle ne
semble pas avoir été très communicative. Même avec son entraîneur qui dit, sur
ce sujet, juste après la victoire aux championnats d’Afrique : « sincèrement
Zahra ne m’a jamais parlé de médailles, encore moins d’argent ou autre
chose ». Aucune des motivations habituelles qui émaillent le
discours sportif national. Ce que l’on saura concerne sa préparation qui serait
« spécifique », expérimentale : « la
méthode de deux courses par jour ». Dadi ne l’explique pas mais
affirme qu’elle (la méthode) fut difficile à suivre.
Même sur le plan de la tactique de course, pas de grandes innovations.
Les consignes avant la finale du rendez-vous africain étaient d’une simplicité
extraordinaire. Après avoir produit la rengaine qui veut unanimement que la
tactique est mise en place en fonction des athlètes participants, Mahour Bacha,
s’appropriant la course, déclare que «lors de
notre finale, la tactique était claire et tout simplement, j’ai demandé à Zahra
d’essayer coûte que coûte de s’accrocher à la meilleure au monde, la Kényane
Janeth Chepkosgei, et d’attaquer avant les quatre-vingt mètres derniers ». Une tactique si fortement ancrée dans les esprits
qu’aujourd’hui les jeunes talents nomadisent pour réussir des « perf »,
réaliser les minima imposé par la fédération ou les instances internationales.
On applique les prescriptions d’un ténor, du sachem.
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