samedi 11 juillet 2015

Motivation des joueurs, L’argent comme unique instrument


Depuis la nuit des temps, la précarité est la constante de la société algérienne. Les relations tendues entres les différentes strates sociales ont aussi été permanentes, traversant les siècles quels que soit les pouvoirs en place, quelles que soient les couches dominantes, nationales ou étrangères.
Dans les faits, et tout au long de l’Histoire plurimillénaire, les Algériens ont été conditionnés à croire qu’ils ne peuvent s’en sortir que grâce à un seul et unique moyen, l’accumulation des pièces d’or ou d’argent  ou des liasses de billets, des appartements, des lots de terrains, ou des titres. A juste raison d’ailleurs puisqu’il s’agit du mécanisme primaire d’enrichissement et du premier moyen d’intrusion dans la couche sociale immédiatement supérieure.
Vers le milieu du 20ème  siècle, un psychosociologue s’est intéressé à la question de la motivation des êtres humains et avait dressé une carte des besoins se trouvant à l’origine des mécanismes de dépassement de soi. Cette carte ou hiérarchie de besoins comporte trois niveaux  dénommés  et définis simplement en tant que besoins primaires, besoins secondaires et besoins tertiaires. Les besoins primaires ou aussi besoins de sécurité sont ceux qui permettent aux êtres humains de survivre dans la jungle qui les entoure et qui ne peuvent être satisfaits que par la possession, que par la détention de plus en plus importante d’argent permettant de se nourrir, de vêtir, de se loger, d’acquérir, lorsque cela n’est pas possible, les automobiles les plus rutilantes.
Il est compréhensible que l’élévation dans la hiérarchie sociale, l’emprunt de l’ascenseur social ne puisse effacer les affres de la précarité connue ou expérimentée antérieurement, pendant la période de la prime enfance ou de l’adolescence. C’est ce sentiment diffus qui explique les comportements, les habitudes des dirigeants de clubs mais aussi de la majorité des joueurs professionnels recrutés justement dans la catégorie sociale la plus dépourvue de tout. Le football professionnel algérien, plus que dans d’autres pays en particulier occidentaux, fonctionne sur la base d’un moteur fonctionnant avec l’argent comme seul et unique moyen de promotion dont la manifestation essentielle est l’augmentation permanente de la rémunération et des avantages octroyés ainsi que l’inflation des montants des bonus universellement admis tels que les primes de victoires différenciées entre prime ₺à domicile₺ et à ₺l’extérieur₺, primes de matchs nuls, primes de titres (championnat ou coupe) jusqu’à la toute récente innovation de ₺prime de maintien₺.
Le monde du football algérien a aussi organisé la précarité des joueurs par l’octroi de primes conséquentes de signatures ou d’avances sur salaires au moment de la signature du contrat qui les ont remplacées, suivi de longues périodes sans rémunération. Les salaires en retard, devenant à l’heure du paiement décalé de plusieurs mois « régularisations de salaires », sont aussi une source de motivation (ou plutôt de chantage) puisque versée à condition de…..remporter une victoire, surtout en période de crises de résultats, de famine. L’épargne est organisée dans les poches des dirigeants et les caisses des clubs. Le fait est si bien intégré par la société (dirigeants, joueurs, supporters et même la presse) que cela ne surprend plus et appartient au domaine de ce ₺normal₺ figurant dans les discours des Algériens y compris dans les situations incongrues.
Dans les déclarations des joueurs, en période de ₺mercato₺, une expression revient sans cesse « être considéré à ma juste valeur » renvoyant sans aucune équivoque au montant du salaire. Une façon très élégante de dire « je vais chez ceux qui payent le mieux ».

Dani Alves, le défenseur brésilien du Barça, lassé d’entendre et de lire qu’il était motivé par l’argent, ce qu’il appelle « beaucoup de bêtises », déclare avoir « atteint ses limites » et vouloir seulement se défendre. Il dit à ce sujet « j’entends que je penses à l’argent. Ce n’est pas vrai. Je vais respecter mon contrat, et ensuite je suis dans l’inconnu». Il poursuit comme ses confrères algériens « Je ne pense pas que le club me considère à ma juste valeur » avant d’expliquer « aujourd’hui je suis impliqué à 200% avec l’équipe, mais à seulement à 10% avec le club » signifiant par là qu’il fait partie intégrante des joueurs mais que sa relation avec les dirigeants, avec le club est réduite à sa plus simple expression. Alves aimerait « rester au Barça mais pas à n’importe quel prix ». Le prix dont il question ici n’est pas monétaire mais se mesure en respect accordé : « s’ils ne me respectent pas, le chercherai un club où on me respecte ». 

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