mardi 28 juillet 2015

Relations algéro-marocaine, Un échange de bons procédés



Il est de notoriété publique que les relations algéro-marocaines, dans les domaines politiques et diplomatiques sont plutôt tendues. Depuis le début des années 70 avec la décolonisation de ce qui fut le Sahara occidental et le Rio de Oro. On pourrait même remonter un peu plus loin, au début des années 60, juste à la fin de la guerre de libération lorsque l’armée royale tenta de s’accaparer une partie du territoire algérien dans ce qui est connue comme la « guerre des sables ». Un contentieux alourdi, sur le plan économique, par le passage à travers la frontière séparant les deux  pays par les trafiquants du cannabis marocain dans le sens maroco-algérien et des produits subventionnés par l’Etat algérien (produits alimentaires, hydrocarbures) dans l’autre sens. 
Selon les échos qui parviennent, le royaume dispose d’installations sportives de qualité, de centres de préparations de haut niveau (Casablanca, Marrakech, Agadir, etc.) qui attirent les plus grandes équipes. En particulier le centre de préparation en altitude d’Ifrane où se rencontrent les meilleurs athlète de demi-fond et de fond européens et…algériens (dont le club financé par Sonatrach dans ces différentes formules, MPA, MCA ou GSP ainsi que des athlètes de l’équipe nationale) ainsi que, depuis quelques années, des clubs professionnels algériens de football (CRB, USMA, JSK) délaissant celles de Tikjda, Chréa dans le cadre de leur préparation estivale. Mais là n’est pas le thème d’aujourd’hui.
Le sport a créé des liens qui dépassent le cadre politique et a permis la constitution d’une union maghrébine sportive qui n’a pas eu besoin des diplomates et des hommes politiques pour se mettre en place. Les grands champions d’athlétisme (les frères Morceli, Ammar Brahmia, Saïd Aouita, Azzedine Brahmi, Nawel El Moutawakel, Moulay Ibrahim Boutayeb, etc.) ont fait fi des discours agressifs, des deux côtés de la frontière, aussi bien d’une population conditionnée et fanatisée que des gens des médias qui y ont trouvé matière à polémiquer sans retenue.
A la fin de l’été 91, Saïd Aouita, grand coureur de demi-fond (un des meilleurs mondiaux des années 80 du 800 au 10 000mètres) était sur le déclin alors que montait l’étoile Nouredinne Morceli, vainqueur quelques semaines plus tôt du titre de champion du monde du 1 500 mètres (Tokyo). Bien sur, les comparaisons (pas toujours amènes) entre les deux coureurs de 15 ont fleuri. A l’hôtel Expo de Barcelone où se déroulait la finale du « Grand Prix IAAF-Mobil », Saïd Aouita fut interrogé par un journaliste algérien présent au QG de la compétition sur cette rivalité naissante. Le multiple champion et recordman du monde, qui n’avait pas l’aisance communicationnelle qu’on lui connait aujourd’hui au micro d’une chaîne de télévision du Golfe où il exerce ses talents de consultant, eut une répartie surprenante, revoyant à un discours très en vogue dans les pays maghrébins et arabo-musulmans en évoquant une passation, à « son jeune frère Nouredinne » du témoin que lui avait transmis « ses aînés » Abderrahmane Morceli, Amar Brahmia qui lui avait permis d’émerger en l’introduisant dans le circuit des meetings européens. Reconnaissant, Saïd Aouita avait coupé court à un débat inutile.
Cet exemple de coopération sportive entre les athlètes des deux pays n’est pas unique. On ne sait pas (ou sans doute veut-on oublier) que l’éclosion de Nouredinne Morceli a été permise par la championne marocaine Nawel El Moutawakel, diplômée d’une université californienne et médaille d’or du 400 mètres haies des jeux olympiques de Los Angeles (1984) qui lui obtint, dans les semaines qui suivirent la médaille d’argent des championnats du monde junior de Sudbury (1988), une bourse d’études au Riverside Collège of California.

Ces cas exceptionnels de relations apaisées à des moments où le demi-fond d’un des deux pays voisins domine celui de l’autre (l’Algérie à la fin des années 70 et début des années 80, le Maroc dans les années 80) sont renforcés par des scènes de la vie de champions en milieu de compétition. Lors de la même finale du « grand Prix IAAF-Mobil », un athlète algérien (Azzedine Brahmi, médaille de bronze du 3 000 steeple des championnats du monde de Tokyo) et un athlète marocain (Moulay Brahim Boutayeb, champion olympique du 10 000 en 1988 à Séoul et médaillé de bronze du 5 000 mètres des championnats du monde de Tokyo, 1991) était inséparables à l’hôtel, dans le bus les conduisant et les ramenant du stade, dans leur promenade à la recherche d’un salon de massage.

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