La conséquence de l’alinéa 2.1.1 est que la violation des
règles antidopage est établie sans qu’il ne soit « nécessaire de
faire la preuve de l’intention, de la faute, de la négligence ou de l’usage
conscient de la part du sportif ». La preuve est contenue dans les
résultats des analyses. Dans l’organisme du sportif dévoilant la
responsabilité.
De fait, par la simple et automatique application de cette
disposition, Samira Messad est fautive. En réalité, elle l’est à double titre. Elle ne sait pas (ou elle n’est
pas consciente de l’enchainement qui va la conduire dans la situation dans
laquelle elle se trouve actuellement) que l’alinéa 2.1.2 (dont elle n’a pas
connaissance) augmente le niveau de sa responsabilité en faisant du renoncement
à l’analyse de l’échantillon B quasiment
un aveu. Plus exactement la reconnaissance d’une faute, d’une infraction à la
règle.
En effet, cet alinéa 2.1.2 stipule que (en plus des
dispositions prévues en vertu de l’article 2.1) la violation d’une règle
antidopage est également (nous sommes tentés de dire mécaniquement ou
irrémédiablement) établie dans le cas où la présence d’une substance interdite
ou de ses métabolites ou marqueurs a été décelée dans l’échantillon A du
sportif et…. que le sportif renonce au droit accordé par les dispositions
réglementaires à faire procéder (à titre contradictoire) à l’analyse de
l’échantillon B.
De facto, le renoncement du sportif à ce droit fait que l’échantillon
B n’est pas analysé et que les résultats de l’analyse de l’échantillon A sont
confirmés ou plus exactement maintenus en l’état. En outre, cette renonciation
a pour effet de se draper dans une posture d’acceptation, de reconnaissance du
résultat de l’échantillon A.
Renoncer à faire analyser l’échantillon B est en soi un acte
d’empêchement à confirmation (ou à infirmation) du résultat initial. Au bout du
compte, l’athlète reconnait implicitement (selon le point de vue développé par
la CNAD, les autres agences nationales de lutte contre le dopage à la suite de
l’AMA) qu’il était dopé, qu’il a enfreint les règles.
Nous appuyant sur les préceptes des religions monothéistes proche-orientales
que nous connaissons, l’AMA, considérant qu’une « faute avouée est à
moitié pardonnée », dispose donc d’un système de pénitences
salvatrices.
En nous penchant sur le cas de Samira Messad, nous devons
aussi avoir à l’esprit le ressenti d’une athlète (placée dans la même situation
que cette athlète), pratiquant une discipline sportive dans un pays émergent,
lorsqu’elle est confrontée au statut de la science (et de ses représentants emblématiques
que sont les médecins, les pharmaciens, les biologistes et autres porteurs de
blouses blanches) dont il lui est difficile (impossible ?) de contester le
savoir et la puissance sociale qui en découle et à laquelle, dans sa faiblesse cognitive
et de la succession d’échecs multiformes, elle ne peut guère s’opposer.
Dans le portrait que nous avons précédemment dépeint, nous
avons mis en exergue que Samira Messad fait partie de ces milliers athlètes
démunis, ignorés par le système ne se penchant que sur une élite numériquement
extrêmement limitée, ceux et celles auxquels le système algérien de la
performance n’accorde que peu d’attention.
Orpheline de père, vivant avec une mère malade et un frère
aîné livré lui aussi à la précarité sociale, se mouvant dans un milieu familial
animé par les traditions agnatiques faisant le lit à l’intention d’accaparement
du peu de biens légués par le défunt chef de famille, elle est quasiment
sans ressources financières si ce n’est les modestes subsides qui lui ont été accordés
par les clubs au sein desquels elle a été signataire. Dans des déclarations le
plus souvent rageuses, à fleur de peau, elle admet son statut de sportive de
second plan dans une formule dont la traduction approximative donne :
« Pourquoi me doperai-je ? Je n’irai jamais aux jeux olympiques
ou aux championnats du monde qui sont l’ambition suprême d’un athlète !».
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