vendredi 29 avril 2016

Préparation olympique (3), Retards et avances se mêlent

N
ous avons vu dans nos deux précédentes chroniques que la FAA maîtrise très mal sa communication. Cela est connu depuis bien longtemps. En fait, depuis le début de ce mandat. Pourtant, il semblerait que la fédération se soit associée avec une agence de communication pour prendre en charge ce volet. De notre point de vue, cette association n’a pas été à la hauteur des attentes. Si ce n’est du point de vue sponsoring. Encore que……
Pour revenir à la « polémique Lahoulou », la FAA reproche au journal incriminé de ne pas « protéger ces athlètes véritables potentiels des prochains jeux olympiques pour leur permettre de se préparer sereinement en mettant tous les moyens nécessaires à leur disposition ». Les faits, tels que présentés par la FAA elle-même, nous montre au contraire que le journaliste en question n’a pas eu tort de dénoncer le préjudice porté à l’athlète en constatant qu’il n’a pas disposé des conditions adéquates à la réalisation de son programme de stage.
Le libelle de cette fédération (qui n’a pas froid aux yeux) se prolonge avec une affirmation désolante en affirmant que le journal qui a publié l’article a ouvert ses colonnes à ceux qui critiquent les entraîneurs ayant obtenu des résultats d’une part et participe, d’autre part, à la destruction de la discipline. Une remarque qu’il faut replacer dans l’ambiance générale. Une appréciation déplacée puisqu’il s’agit seulement de la critique d’un dysfonctionnement. Mais, nous savons qu’évoquer un raté est considéré comme une atteinte au système entier.
Abdelmalek Lahoulou s’est lui aussi fendu d’une étonnante mise au point publiée également sur la page Facebook de la FAA. Une surprise, l’athlète n’est concerné en rien par cette polémique. Les cibles sont, on a voulu nous le faire oublier, la fédération et, si on veut chercher des poux dans la tête d’un chauve, l’entraîneur rentré au pays avant l’heure. Le plus remarquable est que les deux mises au point semblent avoir été écrites par une seule personne. Les mêmes arguments donnent le sentiment désagréable que la « mise au point » (publiée aussi sur Facebook) a été commandée ou rédigées en concertation et qu’elle a été publiée (à une heure tardive de la nuit du 23 avril) quelques minutes avant celle de la fédération sur la page «  officielle » de la FAA.
En intervenant dans cette polémique, Lahoulou (il n’en a pas conscience) fait acte de diversion. Sans qu’il le veuille, par sa correspondance, il conforte l’impression que la fédération s’inscrit dans un jeu de manipulations. L’inopportune intervention épistolaire de Malek Lahoulou prépare le terrain aux arguments qui seront présentés s’il n’atteint pas les objectifs en faisant valoir, rétrospectivement, que la préparation de l’athlète a été perturbée par des facteurs externes, ces interventions étrangères souvent mises en avant lorsqu’il s’agit de travestir la réalité, celle qui se bâtit sur l’incompétence et l’incapacité des structures de soutien à respecter un programme.
La polémique s’est prolongée par un second article qui apporte des « précisions » à propos de la « mise au point » fédérale.  Un commentaire qui remet chacun à sa place. On apprend ainsi que la « mise au point » de la fédération, censée être adressée au journal, a circulé « avec 24 heures d’avance sur les réseaux sociaux ».
Les « précisions » du journaliste sont intéressantes à lire. On rappelle que l’athlète n’était pas incriminé par l’article publié mais au contraire que ce dernier prenait (du moins dans l’esprit du journaliste) sa défense puisqu’il s’était retrouvé seul à Doha, sans entraîneur et sans kiné « alors que son stage n’était pas terminé ».
L’explication au retour prématuré justifié par l’insuffisance de ressources est battue en brèche. Le journaliste indique que des cas similaires (épuisement de l’enveloppe budgétaire) ont été précédemment enregistrés et ont réglés par les fédérations concernés par l’envoi des sommes demandées ou par le COA lorsque deux athlètes ont souhaité prolonger un stage de préparation en Ethiopie.

« Quand on cherche la petite bête, on trouve » dit le populaire. Alors qu’une autre maxime, également populaire, affirme que parfois « il ne faut pas soulever le couvercle qui couvre le puits », au risque certainement d’être surpris par les découvertes que l’on pourrait faire. La surprise est que l’entraîneur et le kiné auraient rejoints Doha avec une semaine de retard. Ce duo est parti une semaine en retard et est revenu avec quelques jours d’avance. On ne risque rien à affirmer que le stage a été écourté, écorné, que la préparation a été raccourcie.    

jeudi 28 avril 2016

Préparation olympique (2), La FAA sur le sentier de la guerre

E
n réponse à un article d’un confrère dont elle a retenu le caractère agressif,  la fédération algérienne a transmis « une mise au point » qui, après vérification, n’a pas été publiée intégralement. Ceci relevant de la politique éditoriale du titre de presse, nous interviendrons par sur ce point. Cette publication partielle a été détournée  par  une mise à disposition au public sur la page Facebook « officielle » dont la lisibilité n’a pas été le point fort.
Nous nous sommes toutefois intéressés à l’ensemble du texte fédéral en remarquant que d’ailleurs, ce qui importe pour la fédération est que le public prenne connaissance de son point de vue : la publication de l’essentiel et de l’accessoire qui est ici malheureusement le plus important. Nous noterons également que depuis quelques mois, la fédération est sur une position défensive et est tenue de prendre l’initiative. A tout prix. Quel qu’en soit le prix ! Elle devait redorer son image édulcorée par l’absence de résultats et les polémiques avec Toufik Makhloufi qui ont laissé des traces. Sans compter les histoires de dopage avérées ou pas.
Sur le plan de la forme, nous observerons que la réponse à la question posée par nos confrères a été fournie par le courrier lui-même. Une correspondance sur papier à-en-tête, avec le cachet de la fédération, sans aucune indication de l’expéditeur (président de la fédération, avocat de la FAA, secrétaire général, chargé de la communication, etc.) sans aucun des indices administratifs qui officialise un courrier de cette importance. Du point de vue des apparences, l’interrogation de notre confrère a trouvé sa réponse : la FAA est une structure virtuelle et anonyme. Le courrier a été rédigé et saisi par un être évanescent, insaisissable.
Sur le fond, nous remarquons que le sujet principal de l’article était le retour précipité de l’entraîneur (non identifié tant par le journaliste que par la FAA) d’Abdelmalek Lahoulou, un athlète spécialiste du 400 mètres haies, se préparant pour les championnats d’Afrique et les jeux olympiques et prétendant sérieux, selon les pronostics de l’instance fédérale, à une place en finale des jeux et candidat à une médaille africaine. L’entraîneur aurait abandonné son athlète à Doha (Qatar).
La fédération avait préparé le terrain au dévoilement d’une énormité proférée par le journaliste. En fait, toute l’introduction agressive a eu pour but de préciser qu’ « à aucun moment le coach n’avait laissé seul son protégé » et que des circonstances malheureuses avaient conduit celui-ci à être « dans l’obligation d’écourter son séjour pour insuffisance financière allouée à ce stage ». On apprend également que « cette décision a été prise afin de permettre à l’athlète de bénéficier d’un contrôle médical approfondi à Aspitar, sous le suivi de médecins algériens sur place ».
Dans le texte fédéral, le sujet qui a exacerbé la relation (apparemment tendue depuis quelque temps) entre l’instance sportive et le quotidien a été réglé en cinq lignes. Celles qui ont certainement été prises en considération par le journal pour la publication de « la mise au point».
Nous retiendrons que dans les faits, cette fameuse « mise au point » n’est qu’une « précision », qu’elle apporte des éléments d’informations supplémentaires, écartés par le journaliste ou dont il n’avait pas connaissance.  L’effet de ce courrier est (de notre point de vue) contraire à ce qui est attendu. La FAA a prouvé que (à quelques éléments près) l’information était véridique. Elle a communiqué les arguments motivant le retour anticipé de l’entraîneur.
Pour ce qui nous concerne, cette « mise au point » démontre que la FAA est une coquille vide incapable de prendre en charge correctement un stage de préparation à l’étranger et éventuellement de trouver une solution rapide et efficace à un quelconque problème (financier) susceptible de survenir. Emportée par son impétuosité à remettre le journal à sa place, la fédération n’a pas indiqué la durée du raccourcissement du stage et le coût des soins prodigués à Lahoulou.

Dans des situations de ce genre, il est nécessaire de trouver un bouc émissaire. La diatribe fédérale se poursuit en assénant que « votre journaliste verse dans le dénigrement à l’encontre de la FAA» puis qu’à travers l’article il s’agit de « déstabiliser la préparation de nos athlètes en prévision des jeux olympiques » et enfin de « campagne manifestement orchestrée par des commanditaires mal intentionnés ». Un argumentaire que nous avons l’habitude de lire sur des sujets relevant de la politique politicienne.

mercredi 27 avril 2016

Préparation olympique, Le grand jeu médiatique de la FAA

L
a fédération algérienne d’athlétisme vacille sur ses fondations. Des signes annonciateurs de débandade apparaissent montrant que certaines des structures qui firent le bonheur et l’honneur de cette discipline sont sérieuses ébranlées. On ne peut (ni ne doit) oublier que pendant les temps difficiles, elle (l’athlétisme) sut, envers et contre tout et tous, se maintenir à flots malgré les coups qui lui furent portés. Des attaques qui visèrent particulièrement les sportives obligées de se dissimuler pour courir, sauter ou lancer. En ces temps où la vie des hommes et des femmes étaient en jeu, les sportives et les sportifs (Hassiba Boulmerka et Noureddine Morceli en locomotives) tout comme les hommes et femmes de progrès et de culture, porteurs d’une dimension de modernité haïe, ont su résister à la vague iconoclaste.  
En ce temps-là, des hommes et des femmes de valeurs dirigeaient les institutions. Ils accompagnaient, dans des expéditions périlleuses, des délégations sportives se rendant dans toutes les régions du pays.  Cela ne les empêchait pas de tirer des plans sur la comète, d’élaborer des stratégies pour le développement de la discipline, de réfléchir, de discuter, de débattre, de polémiquer, de se disputer, de se déchirer pour la passion d’une vie…..puis de se retrouver autour d’une table. Nous avons le souvenir d’une assemblée générale où deux membres, chacun défendant farouchement ses idées, faillirent en venir aux mains, difficilement séparés par les présents ……et de les retrouver une demi-heure plus tard attablés, deux bières les séparant, au jardin zoologique. Aujourd’hui, ils cristallisent toujours aussi férocement les débats.
Actuellement, tandis que des ligues de wilayas organisent des championnats locaux, régionaux et nationaux (interclubs et épreuves combinées à Bejaïa) ou des compétitions nationales (Tlemcen en guise de clôture du stage de préparation des juniors potentiellement sélectionnables pour une participation aux championnats arabes de la catégorie des – de 20 ans qui se disputerons dans cette même ville dans une quinzaine de jours) et que les athlètes de tous âges et de différents niveaux s’entrainent en vue des compétitions régionales, continentales, mondiales et olympiques, la fédération n’a pas trouvé mieux que de démontrer que les dirigeants d’antan, après s’être retirés leurs missions dignement accomplies, n’avaient pas laissé d’héritiers…. dignes de ce  nom.
La démonstration de cette affirmation, que nous n’aurions pu imaginer dans nos moments les plus fous, se trouve dans une correspondance pompeusement intitulée « mise au point » que la fédération d’athlétisme a adressée à des confrères qui ont égratigné ce que nous désignerons par le vocable de « susceptibilité mal placée ». La « mise au point » ayant été publiée sur Facebook, nous nous permettons d’apporter notre grain de sel. L’affaire le mérite. A vrai dire, en d’autres circonstances nous hésiterions.
Pour éviter d’emblée toute équivoque, nous soutenons que nul ne peut dénier à la FAA le droit de ne pas apprécier le contenu ou le ton d’un article journalistique. Il ne s’agit non plus pour nous de nous engager dans un corporatisme de bas étage qui ferait que nous prenions de facto la défense d’un confrère.
L’athlétisme national que nous avons longtemps côtoyé mérite mieux que ces polémiques pestilentielles qui prennent racines ailleurs que dans l’article lui-même. Des polémiques qui rabaissent au final une discipline sportive qui a fait honneur en apportant des titres et des médailles mondiales et olympiques dans l’escarcelle nationale et en plaçant, en des temps où les conditions de vie et sécuritaires étaient difficiles, l’élite nationale sur des podiums disputés à des nations aux économies et aux finances plus saines et évoluant dans un cadre pacifique.

La fédération le reconnait. Elle déclare tout de go en effet avoir évité de s’engager dans des « polémiques stériles » mais qu’elle n’en peut plus face à des « diffamations », des publications d’ « informations non fondées », une focalisation sur ce qui au journal « semble sensationnel », le tout résumé dans une phrase qui exprime le ras-le-bol de la  « FAA, de ses structures et de son président » confronté à des « informations fausses et toujours inventées par votre journaliste ». Il est également reproché au journal « un titre tendancieux », interrogatif se demandant s’il existe une fédération d’athlétisme. Les mots sont dits, sont écrits. Le sens en est incompris.

mardi 26 avril 2016

Statut des SSPA (12), Un enjeu multidimensionnel

L
a folie dépensière des supporters alimente et enrichit les réseaux occultes de l’économie souterraine. Une économie, un système bien plus fort, bien mieux organisé et pour le moins mieux démultiplié que le système bureaucratique de contrôle. Une organisation tentaculaire à l’affut du moindre événement sportif qui puisse booster ses dividendes.
Son chiffre d’affaires est difficile à déterminer car réalisé en dehors des circuits habituels de commercialisation. Des estimations officieuses laissent entendre qu’il serait supérieur à celui du commerce réglementé. D’ailleurs, les supporters adorent acquérir à des prix défiants toute concurrence (car n’intégrant pas aux grand dépit des commerçants les taxes et impôts, cotisations auxquels l’activité est assujettie quand de plus la marchandise, très souvent importée d’horizons lointains, de Chine ou de Turquie, franchit les frontières en catimini, dans des containeurs esquivant habilement les poses de douane) tous les gadgets qui sont proposés par le marché.
Même s’il ne peut être quantifié, même s’il n’a pas fait l’objet d’études sérieuses, le budget consacré par les supporters à l’assouvissement de leur passion est énorme.
Les supporters, nous l’avons vu, considèrent qu’ils ont leur mot à dire dans la gestion de leur club favori. Une opinion qui n’est prise en considération, qui n’est entendue par les pouvoirs publics que lorsque la colère risque de déborder dans la rue, porter atteinte à la sécurité publique, avec pour solution l’ouverture sédative des robinets distributeurs de subventions. Cela les dirigeants et les supporters (mais essentiellement leurs leaders) le savent et l’exploitent à qui-mieux-mieux.
Les sociétés sportives par actions auxquelles la gestion des clubs professionnels de football est dévolue n’accordent aucune place aux supporters. Seul, le président du comité de ces mêmes supporters occupe un strapontin au sein de l’assemblée générale du club sportif amateur géniteur de la SSPA. Pour être portée à la connaissance des managers de la SSPA, la voix des supporters transite donc par au moins deux écluses qui sont le président du comité des supporters et le représentant du CSA à l’assemblée générale ou au conseil d’administration de la SSPA. Elle a donc le temps de s’adapter aux discours ambiants et de faire l’objet de tractations.
La législation algérienne s’inspire grandement de la législation française qui à travers son système démocratique indirect donne la primauté à la responsabilité populaire via ses représentants élus, de peu de poids décisionnel comparativement à celui des managers. Le système dévoile ainsi une représentation encadrée. Ne le cachons pas la présence des supporters dans les institutions est dérisoire quantitativement, symbolique et avant tout protocolaire !
A travers la mise en place des SSPA dans leur configuration actuelle, il est fait place aux forces détentrices de cet argent, (idole  valorisante et valorisée des sociétés modernes), éditrices des normes et règles sociales et sociétales, tentant par tous les artifices de conserver la main mise exercée sur tous les segments de la société.
Ailleurs, en Europe, plus particulièrement dans la péninsule ibérique, il a été adopté une organisation qui donne une plus grande place aux supporters, aux « socios » participant directement à l’élection du président et à la vie du club. En somme, la perpétuation du vieux débat socialiste (celui du 19ème siècle) mettant face à face les tenants d’un « socialisme autoritaire » d’inspiration marxiste et ceux d’un « socialisme libertaire » proche des thèses de Bakounine, Proudhon, Fourrier et des collectivistes yougoslaves de la première moitié du 20ème siècle.

La SSPA repose sur un concept qui fait que chacun des actionnaires partagent à la fois les dividendes et les pertes au prorata des actions détenues. La participation des supporters au capital social a pour avantage de répartir sur une plus grande masse les résultats (de les enrichir (?) petitement en présence de gains et d’atténuer l’impact des résultats négatifs). Cela a aussi pour effet (cela semble être l’inconvénient majeur et primordial) de disperser les capacités de réactivité de l’organisation, de diluer les responsabilités que certains voudraient accaparer et d’inciter à communiquer avec des actionnaires passionnés, turbulents et peu enclins à s’insérer dans les rouages artificiels et souvent ésotériques. On comprend donc que les textes régissant le fonctionnement des SSPA ne seront pas amendés. Les enjeux sont trop importants.

lundi 25 avril 2016

Statut des SSPA (11), La primeur aux intérêts particuliers

L
es pouvoirs publics ont bouleversé le mouvement sportif national lorsqu’ils ont accepté d’admettre en premier lieu un volet professionnel dans la pratique sportive et en promulguant ensuite une législation et une réglementation sportives faisant la part belle au financement privé et enfin en disposant que le sport professionnel pouvait s’organiser légalement sous trois personnalités juridiques distinctes (Eurl, Sarl et Spa).
Pour donner une assise de respectabilité à cette révolution et pour rendre invisible le mouvement de ce qui est indubitablement une privatisation (auquel sont réticents certaines associations politiques et syndicales et qui de plus anime l’ensemble de la société algérienne) ils ont mis en avant la société sportive par actions, une Spa particulière, adaptée au secteur du sport.
Bien que transférée du patrimoine public/collectif au domaine privé, la société par actions conserve cependant un caractère de propriété collective et associative acceptable par les plus rétifs (et les moins informés) à ce changement qui bouleverse les modes de pensées et de perception de la société. Une privatisation déguisée qui permet de surmonter (si cela est possible) le souvenir extrêmement déplaisant, plein d’amertume ayant accompagné la privatisation de tout un pan de l’économie nationale à l’instigation des organisations (FMI, Banque mondiale, Club de Paris, Club de Londres, etc.) dont la conséquence a été la fermeture/dissolution d’une multitude de petites et moyennes entreprises publiques, de nombre de manufactures des secteurs du textile et du cuir et la mise au chômage (ou en retraite anticipée) de plusieurs centaines de milliers de travailleurs ainsi que l’apparition d’un mouvement de prédation dont l’animateur principal a été la bourgeoisie naissante qui s’est construite sur les ruines de l’Etat socialiste.
Ainsi que nous avons pu le voir précédemment, supporter, encourager une équipe de football est un comportement qui pourrait s’apparenter à une addiction et conduire à toutes les folies. Jusqu’à présent, rien n’a été fait pour canaliser le flux pécuniaire qui est engendré par cette accoutumance en direction de l’équipe soutenue.
Bien au contraire. Tout semblerait mener vers une seule direction, les poches de barons de la contrefaçon (billets d’entrée aux stades, équipements sportifs, autres articles merchandising tels que casquettes, écharpes, compilations de chansons, etc.) et de leurs intermédiaires regroupés en une pieuvre aux multiples et immenses tentacules atteignant les localités les plus reculées quand, les résultats sportifs aidant, l’équipe nationale sert de support. La preuve que, plus que l’intérêt commun, le gain des particuliers excite l’imagination, l’intelligence, le sens de l’organisation et de la logistique.
Le club sportif professionnel, bien qu’affublé de la spécificité de société sportive qui la distingue des autres sociétés par actions, est, du point de vue juridique, une entreprise commerciale comme une autre pouvant se décliner, au moment de sa constitution, soit comme une société par actions faisant « appel à l’épargne publique », soit comme une société à « capitaux privés » ou « mixtes » (privés/publics, dont le MC Alger, le CS Constantine, la JS Saoura sont les exemples en attendant la concrétisation du projet inabouti du MC Oran et celui, annoncé pour la prochaine rentrée sportive,  de la JS Kabylie).
Dans le premier cas, il est primordial d’avoir à l’esprit que n’importe quelle personne physique ou morale (sans distinction de nationalité ainsi que le stipulent les derniers textes promulgués pour à nouveau être en phase avec le contexte politico-économique) peut acquérir (en fonction de ses capacités financières) un nombre illimité d’actions émises par la société en se présentant aux guichets des agences bancaires agréées par la Bourse d’Alger en qualité d’intermédiaires en opérations de bourse (I.O.B.), une fonction du système financier mise sur le devant de la scène par les « traders » impliqués dans de nombreux cafouillages et autres scandales financiers. Une sorte d’OPV (offre publique de vente).
En ce qui concerne,  la seconde variante de Spa, seuls quelques investisseurs, triés sur le volet par les fondateurs, sont autorisés à se porter acquéreur (devant un notaire) d’un nombre défini d’actions. On remarque que la première procédure se déroule à ciel ouvert, en toute transparence alors que la seconde s’accomplit dans l’intimité d’un cabinet notarial.

Le code du commerce introduit une seconde distinction (toutes les autres dispositions étant applicables à l’une et à l’autre des variantes), relative celle-là au capital social minimal qui est de 5 millions de dinars pour une Spa faisant appel à l’épargne publique et à seulement 1 million pour celle qui n’y fait pas appel.

dimanche 24 avril 2016

Statut des SSPA (10), La foire aux affaires

L
es supporters du MCA, ces Chenaoua dont une frange s’est organisée pour former des groupes d’ « Ultras» qui pour l’un des plus importants serait constitué d’universitaires et qui pour un autre s’exhibe torse nu, quelles que soient les conditions climatiques, ont - à l’occasion du match de demi-finales de la Coupe d’Algérie opposant leur équipe à celle de l’US Tébessa (une équipe évoluant dans le championnat inter-régions, le quatrième niveau de la hiérarchie nationale) - brandi une gigantesque banderole de 100 mètres de longueur qui, dans leur jargon, serait un tifo. 
Ils étaient 60 000 Chenaoua à encourager leurs chouchous sur lesquels ils mettent en permanence une pression qui ne fait pas de mousse mais fait exploser les ciboulots et les cœurs des milliardaires des stades. Une pression telle  que la présence de ces supporters aux abords des lieux d’entraînement (après un résultat décevant leurs espérances) se transforme allégrement, quand tout va mal et que les résultats ne sont pas présents, en agressions verbales et quelquefois physiques.
Le tifo a été exhibé lors de l’apparition d’Omar Ghrib qui faisait sa réapparition sur la main courante du temple du football algérien. Cela se passa moins d’une semaine après sa réintégration dans le staff dirigeant du MCA et moins d’un mois après sa réhabilitation par l’assemblée générale de la Fédération avec l’assentiment des pouvoirs publics qui avaient poussé à son bannissement à vie du mouvement sportif national. Après un coup d’Etat administratif au sein du CA, les membres représentant de l’actionnaire principal réticents à son retour furent démis de leurs mandats par les responsables de la compagnie pétrolière
Il faut ici indiquer que les pouvoirs publics, pour bien dévoiler l’importance du crime de lèse-majesté commis par le sieur Omar Ghrib en 2013 lorsqu’il fut l’instigateur du refus des joueurs et des staffs de se rendre à la tribune officielle pour la remise des médailles destinées aux finalistes de la Coupe d’Algérie, firent ajouter un alinéa à l’article 3 du décret exécutif 15.73 stipulant que le club sportif professionnel est dans l’obligation d’ «observer les règles solennelles et protocolaires inhérentes aux compétitions et manifestations sportives ». La réconciliation nationale dans toute sa splendeur avec aussi l’effacement de toutes les horreurs comme la dissimulation d’un audit financier défavorable pour le sieur Ghrib sur fond de factures inexplicables et inexpliquées.
60 000 supporters ont assisté au match MCA-UST. 40 000 étaient présents le jour de la rencontre de Coupe d’Afrique ayant opposé le CSC et l’équipe nigériane de Nasawara. 50 000 spectateurs (à raison de 25 000 supporters pour chacune des équipes finalistes) sont attendus pour la finale de la Coupe d’Algérie entre le NA Hussein Dey et le MCA. Sans compter les places qu’il faudra réserver aux officiels et autres spectateurs.
L’an passé, à ce même stade de la compétition, 10 000 « Vikings », adorateurs du RC Arbaâ au surnom historiquement, culturellement inapproprié et dont le sens devrait faire l’objet d’une étude,  côtoyaient 10 000 « Crabes » de Bejaïa lors de la finale 2015 de cette même Coupe d’Algérie au stade Mustapha Tchaker de Blida, un stade de capacité moyenne (25 000 spectateurs)  accueillant régulièrement, depuis des années, les Fennecs. Il y a quelques jours, c’était plus de 25 000 Crabes qui ont rempli leur stade de l’Unité Maghrébine lors du match retour ayant opposé MO Bejaia au Zamalek du Caire.

Les billets d’entrée vendus aux guichets à respectivement 300 et 500 DA sont disponibles (lorsqu’on s’en éloigne un peu et que l’affiche est attractive) pour les retardataires à 500 et 1 000 DA. Il est alors possible de conclure que les clubs reposent sur un véritable filon d’or. Un gisement d’affaires qui profite essentiellement aux contrefacteurs de tickets d’entrée et aux fabricants d’équipements sportifs également contrefaits en vente aux abords des stades (en très grande quantité, à des prix défiants toute concurrence, avec bien évidemment une envolée comme dans une économie de marché où les règles sont fixées par la loi de l’offre et d’une demande démultipliée par l’organisation d’un événement exceptionnel comme peut l’être un match de la Champion’s League africaine). 

samedi 23 avril 2016

Statut des SSPA (9), Le retour des héros populaires

L
es supporters ont une manie fâcheuse et déroutante de ne pas fonctionner, de ne pas réagir comme des êtres humains normaux, comme ces gens qui forment la majorité silencieuse, confortablement (mais pas toujours) installés dans la vie casanière, rythmée par ce « métro-boulot-dodo » (qui fit fureur dans les discours soixante-huitards), devenu une expression figée ayant cours même dans les villes (y compris chez nous) où le métro ne circule pas et qui ne s’intéressent guère ou plutôt qui se fichent éperdument du football comme de leurs premières paires de chaussettes. Le football n’est pas leur préoccupation première et ne le sera sans doute jamais ! Surtout que ce sport véhicule une image désastreuse (faite de vulgarités et de chants inaudibles et incompréhensibles, de débordements trop souvent accompagnés d’actes de délinquance causés par des meutes sans brides) ne correspondant pas à leur mode de vie.
La foule (ainsi qu’il en est de toutes les rassemblements humains) des supporters est influençable, malléable comme l’est la pâte qui sert à modeler. Elle prête attention à toutes les rumeurs. Surtout aux plus folles, les moins crédibles que certains, doués pour la manipulation, se plaisent à propager. En particulier, les informations dont l’objectif est de porter atteinte à son statut de force vitale circulant, monopolisant son âme, son esprit conditionné par des discours qui la flatte dans le sens du poil et lui fait perdre la tête.
La foule des supporters est véritable mélange explosif des forces vives de la société, une jeunesse (et des moins jeunes) souvent en rupture de ban ou du moins qui sont en marge d’une société officielle dans laquelle ils n’ont pas trouvé leurs repères. Les cireurs – qu’Ahmed Ben Bella, le premier président de l’Algérie indépendante, au sortir de la guerre de Libération, ne voulait plus voir dans les rues d’Alger et des grandes villes du pays - ont été remplacé par les vendeurs à la sauvette s’égayant comme des moineaux à la vue des policiers en tenue faisant leurs rondes, les traquant dans la perspective de l’éradication du commerce informel. Ce sont eux qui forment l’essentiel des bataillons qui occupent les stades comme ils ont été (et seront) le noyau dur des émeutiers d’hier et de demain.
Dans les derniers évènements qui ont animé les deux « grands » clubs professionnels, les rivaux de la doyenneté (MCA et CSC), ils ont été en première ligne pour saluer le retour d'Omar Ghrib à la fonction de coordinateur général du MCA et demander le retour de Mohamed « Soussou » Boulhabib à la tête du CSC.
S’inspirant sans doute des rebondissements dont les séries télévisées égyptiennes, syriennes et turques sont friandes, l’appel émanant du « peuple » a concerné deux des clubs financés par Sonatrach et une de ses filiales (c’est-à-dire deux SSPA financièrement stables), branchés directement sur le pipe-line déversant des milliards de centimes dans les stades ou plus exactement dans les cercles gestionnaires du remplissage des tribunes. Ces deux leaders, ces deux meneurs de troupes, appartiendraient, si l’on en croit les propos rapportés à leurs sujets, au même milieu que les supporters. Ils seraient issus de cette matrice de ce que nos parents nommaient le « marché noir » et que nous avons mis au niveau linguistique avec d’abord le « trabendo » et, depuis que le phénomène est devenu un fait social de grande ampleur examiné par chercheurs de l’université algérienne et intégré dans la perception politicienne des exécutifs nationaux et locaux, l’ « économie souterraine ». Ils en auraient gravi les marches conduisant aux sommets de la hiérarchie

Ghrib et Boulhabib sont, dans le mode de pensée des Chenaoua et des Sanafirs, l’équivalent moderne des illustres héros populaires, ces  « chevaliers » issus des rangs du peuple (Robin des bois, Cartouche), défenseurs de la veuve éplorée, des enfants et des pauvres contre l’aristocratie bureaucratique dévorant ses propres enfants ou ces « bandits d’honneur » qui, dans les montagnes de Kabylie et des Aurès, prirent les armes contre les suppôts de la colonisation. Une auréole encore plus lumineuse depuis qu’ils ont obtenu gain de cause devant les tribunaux inféodés à la raison d’Etat et ont fait plier les fondations du pouvoir.

jeudi 21 avril 2016

Statut des SSPA (8), Une passion proche de l’addiction

L
es supporters remplissent les stades. Comme des fourmis, chaque week-end, ils se dirigent vers les gradins et les tribunes des stades dont certains n’offrent que les conditions minimales d’accueil. Des enceintes sportives qui ne peuvent recevoir des compétitions footballistiques qu’après bien de palabres avec les commissions d’homologation des infrastructures sportives diligentées par les instances faîtières du football national.
Certaines rencontres attirent des dizaines de milliers de spectateurs, se jouent à guichets fermés. Une expression qui, dans cet univers (comme dans celui des salles de cinéma ou de théâtre d’hier mais désertés aujourd’hui) signifie que l’affluence est si nombreuse que des candidats à une place n’ont pas trouvé de billets. Un phénomène, souvent cité dans les colonnes de la presse, incitant à la réflexion lorsque l’on constate que lors des grandes affiches on (la presse) rapporte que des centaines de supporters n’ont pu accéder bien qu’ils tiennent entre leurs mains ce fameux sésame soi-disant salvateur mais inutile devant les portes fermées et l’impossibilité de trouver le moindre espace pour poser son séant.
 On raconte, comme lors des veillées hivernales d’un passé pas si lointain où la télévision et les NTIC n’existaient pas encore, que les grands événements du football, les fameux derbies algérois (en particulier) devenus, l’imagination fertile et débridée aidant, des classiques se parant de l’hispanisme (classico) mis à la mode par les matchs entre les deux grands d’Espagne, le Réal de Madrid et le FC Barcelone (références planétaires s’il en est) les matchs entre les grands clubs du pays sont une opportunité pour la fabrication et l’émission de faux billets vendus au marché noir à des prix défiant l’imagination.
La désorganisation est encore plus manifeste lorsqu’on apprend, par la presse, le lendemain des rencontres continentales que, bien que les travées furent bondées, seulement un tiers des spectateurs est passé à la caisse. Le dernier exemple (très récent) est celui de ce match joué au stade chahid Hamlaoui (un des grands stades du pays pouvant accueillir jusqu’à 50 000 spectateurs depuis sa rénovation et sa mise en conformité avec les normes alors qu’il atteignait les 70 000 et même 80 000 spectateurs debout dans les années fastes du football national quand l’équipe nationale y disputait ses rencontres au titre des qualifications pour les coupes du monde et d’Afrique des années 80) par le CS Constantine contre une équipe nigériane où ne furent décomptés que 10 000 billets vendus alors que 40 000 spectateurs auraient été présents.
Pour cette situation invraisemblable,  ce furent d’autres maux qui furent évoqués. La resquille bien sur qui s’appuierait sur la complicité des guichetiers laissant pénétrer leurs connaissances mais aussi le détournement, vers d’autres destinations (que les comptes du complexe sportif, du club et du service des contributions) de carnets entier de tickets. Pour ce seul match, des confrères ont estimé la perte (en recette brute) à plus de 900 millions de centimes.
La passion des supporters pour leur équipe ne s’exprime pas seulement quand elle joue sur son stade. Certains ont acquis la réputation d’être des routiers infatigables, traversant le pays dans tous les sens, empruntant toutes les routes et tous les moyens de transport quelques soient les conditions.
En tête de liste, on trouve évidemment et constamment les Chenaoua du MCA, les Sanafirs du CSC et les Crabes du MOB qui très souvent sollicitent une augmentation des quotas réservés aux supporters des équipes visiteuses (10% de la capacité du stade) et ne se suffisent pas des compléments accordés. Ce qui n’empêche des villes de se vider totalement de sa population juvénile et masculine pour remplir le stade du 5 juillet (ou un autre) quand leur équipe atteint un stade avancé de la Coupe d’Algérie. Pour le dernier match des demi-finales, il y a quelques jours, ce sont quelques 6 000 habitants de Tébessa qui se sont déplacés depuis la zone frontalière Est.

Cet engouement, souvent déraisonnable, confinant à l’addiction, se fait aussi remarquer chez les Chenaoua et les dirigeants du MCA quand, portés par une série de résultats flatteurs, ils exigent la modification des règles de domiciliation tentant (y compris sous la menace à peine voilée de troubles à l’ordre public) de faire perdre à leurs adversaires algérois le maigre avantage de recevoir dans leurs jardins minuscules, souvent vétustes, homologués à grand peine.      

mercredi 20 avril 2016

Statut des SSPA (7), Les supporters dans la marge

D
e tous temps, et avec plus d’acuité lorsque la crise est présente et bouscule les habitudes routinières qui se sont installées, le quatrième élément du paysage sportif, que nous n’avons pas encore désigné, est interpellé de tous côtés, par de multiples voix, souvent chicanières et confuses, afin qu’il prenne parti pour l’une des factions en confrontation, pour l’un des prétendants à une fraction supplémentaire d’autorité et à l’imposition d’une volonté non partagée. Les dirigeants des clubs sportifs, quelle que soit la forme juridique adoptée, associations ou société commerciales, amateurs ou professionnelles, les placent au rang de sauveurs, d’unique et ultime solution à leurs inconséquences, à leurs impuissances.
Ils sont ceux que les hommes politiques, dans les circonvolutions langagières qui sont les leurs, ajoutant au trouble généralisé, appellent le peuple, la référence ultime intervenant en dernière instance. Ce « peuple » que la presse-people-foot (algéroise et leurs correspondants sous d’autres cieux) invite indirectement à soutenir les dirigeants désemparés ou à se positionner en arbitres. Une masse indéfinie renvoyant aux harangues populistes d’hier adressées à des foules massées au pied de la divinité sportive adorée. Un mot qui met en première ligne la force populaire que l’on appelle en soutien, dont on sait qu’elle est capable d’édifier des barricades ou de les abattre, selon les situations. Une puissance que l’on redoute, dont on dit qu’elle a voix au chapitre alors qu’il n’en est rien, des citoyens sans droit de vote. Ni électeur, ni éligible.
Ce sont les supporters dont les surnoms « Chenaoua » (Chinois) pour ceux qui ne vivent que pour le MC Alger, « Sanafirs » (Schtroumpfs) pour les adorateurs de l’équipe du CS Constantine ou les « Crabes », accompagnateurs du MO Bejaïa renvoient à la multitude, à une taille réduite et à l’agitation frénétique qui seraient la caractéristique de la jeunesse.  Ce sont eux qui sont les composants des marches, sit-in et autres actions populaires qui, selon la volonté des déclamateurs, seront soit révolutionnaires soit partisanes de la préservation du statu quo. Dans presque toutes les dissensions, entre sociétaires, entre associés, entre sociétaires et associés, leur arbitrage est sollicité.  Bien entendu, lorsque la phase extrême est dépassée, ils retourneront à la place de majorité silencieuse qui leur est dévolue, dont la voix est inaudible car quasiment inexistante.
Dans la définition juridique des sociétés sportives par actions, il n’est fait aucune place aux supporters. Si ce n’est marginalement lorsqu’il est question de ressources et de billetterie, de droits d’entrée aux spectacles. Ce statut de spectateurs évacue adroitement le droit, accordé par les discours partisans, à peser sur la prise décision, sur la gouvernance de la SSPA. Les supporters, les spectateurs n’ont quasiment aucun droit dans le cadre juridique organisant le fonctionnement des SSPA et des associations sportives.
Tandis que le sport professionnel, symbolisé par la SSPA dans la forme retenue par les pouvoirs publics ne l’autorisant pas à faire appel à l’épargne publique, ne peut pas admettre en son sein les supporters car ceux-ci ne disposent pas du statut d’associés, l’association sportive amateur lui concède une place peu représentative de son importance quantitative. Le comité des supporters, le regroupement juridiquement formalisé des amoureux de l’association, fait certes partie de l’assemblée générale du club sportif mais n’y est représenté que par la seule voix délibérative de son président.
Une lecture attentive de l’article 13 du décret exécutif 15.74 montre que seul UN comité de supporters est admis à en faire partie. Celui-ci les représente tous sans distinction de mouvance, sans considération pour les différences qui font qu’ils se distinguent en groupes ou groupuscules. On ne sait trop s’il s’agit d’un résidu de la pensée unique unissant dans un conglomérat des factions rivales ou une perception centralisatrice d’une vision tendant à noyer l’opinion des masses populaires.

Pourtant les supporters, en dehors du cadre délibératif et de leurs statuts dans la société sportive, ont un rôle essentiel dans la survie du club dépendant de leur apport financier aux guichets devant lesquels ils s’agglutinent par milliers et dizaines de milliers. 

mardi 19 avril 2016

Statut des SSPA (6), L’invisible quatrième élément

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epuis 1962, repère du recouvrement de la souveraineté nationale, le mouvement sportif algérien, devenu mouvement sportif national, a considéré que la pratique sportive relevait d’associations agréées en maintenant la réglementation héritée de la période coloniale qui ne contrevenait pas dans le fond avec l’idéologie dominante s’appuyant sur les concepts de solidarité, de communauté, de collectivité et de collectivisme. Bien au contraire. Puisque tous en étaient issus et à ce titre marqués par la philosophie véhiculée.
De plus, le mouvement sportif ne pouvait échapper au contexte d’identité fédérative très prégnant renvoyant aussi bien aux traditions ancestrales et musulmanes qu’aux idéaux contemporains importés de ces nations d’Europe de l’Est dont l’apport, pendant la guerre de libération et plus tard, ne fut pas négligeable sur le plan idéologique et matériel.
Les nationalisations des biens des anciens colons et de la bourgeoisie algérienne ont renforcé, dans la société, l’effacement de la notion de propriété privée et a consolidé celle de propriété collective, que formule sans cesse les discours politiques populistes, conduisant entre autre aux occupations des logements laissés vacants par leurs propriétaires et à la création de coopératives de gestion des biens, manufactures et propriétés agricoles.
Dans l’ambiance festive des premières années de l’Indépendance, nous noterons que deux actions sportives furent et sont glorifiées. La première est celle de la constitution de l’équipe de football du FLN formée par une trentaine de joueurs expatriés évoluant dans les clubs  professionnels de l’Hexagone (certains jouèrent en équipes de France) et le retrait des compétitions sportives organisées sur le territoire algérien et l’appel à rejoindre les maquis à l’instigation encore une fois du parti unique révolutionnaire. Indéniablement, ces deux actions, se traduisant sur le terrain par des actes individuels, revêtent un caractère symbolique dépassant l’individualisme et fortifiant par leur multiplicité l’appartenance à un mouvement collectif solidaire. 
Le caractère collectif préservé des associations sportives se transforme (à partir de 1976) lorsqu’elles deviennent des associations à caractère public consécutivement à leurs prises en charge financière par les entreprises étatiques et les collectivités locales et par le changement de dénominations qui à la fois s’inscrit dans la politique nationale d’arabisation et dans un processus d’implication symbolique des entités de parrainage dans la nomination.
Appliquant à la lettre l’adage olympique sur l’apolitisme, le sport algérien ne fait pas de politique (même si il fut souvent impliqué dans des activités politiques et quand bien même les actions accomplies pendant la guerre de libération nationale aient ce caractère. On remarquera que l’Algérie, territoire colonisé, n’était pas membre du CIO, de la FIFA et des autres fédérations internationales et pouvait en tant que pays à la recherche de sa libération. Il s’y insère et s’adapte logiquement à toutes les mutations que la sphère politicienne connait.
Le sport professionnel (tel que nous le constatons actuellement) n’aurait pu être appréhendé par la législation nationale si l’environnement politico-économique n’avait évolué depuis 1988. Au cours de la dernière décennie du 20ème siècle, la propriété privée (en voie de disparition et ne subsistant que par les petits commerces) a cherché à se faire une place aux côtés de la propriété publique et a postulé à son éviction. La création des SPPA n’est que la forme sportive de la privatisation du patrimoine étatique.
Jusqu’à présent nous avons perçu le mouvement sportif national à travers 3 acteurs essentiels de la mise en œuvre de la politique sportive : les pouvoirs publics et leurs représentants (entreprises publiques et/ou collectivités locales) les membres adhérents de l’association sportive se perpétuant aujourd’hui dans les clubs sportifs amateurs et, depuis cinq années environ avec l’insertion du sport professionnel affichée ouvertement dans la législation algérienne, les associés de la SSPA, plateforme juridique des clubs sportifs professionnels.
Un quatrième élément n’a pas fait partie de notre réflexion. Un élément fondamental et incomparablement plus nombreux que les trois autres et tout aussi important dans le fonctionnement des mécanismes et du système qui se mettent en place. Un élément invisible aux yeux des observateurs et pourtant si présent.


lundi 18 avril 2016

Statut des SSPA (5), Les clivages historico-sociologiques

P
endant l’entre-deux guerres mondiales, la colonisation prend une forme moins guerrière, moins ségrégationniste. C’est la période où les maitres-mots des discours, prononcés par les hommes politiques des deux bords, sont « intégration » et « assimilation ».
Le sport, aux côtés de l’enseignement et du service militaire obligatoire (les guerres mondiales de 14-18 et 39-45 nécessitèrent de la chair à canon) tend à encourager la dépersonnalisation de la population, sur encore le vieux fonds des rivalités religieuses et de la survenue de ces deux phénomènes nouveaux que sont la Nahda (la Renaissance musulmane)  et une nouvelle grille de lecture des rapports sociaux.
 Sur les éléments de la guerre coloniale (entre une population locale défendant son patrimoine matériel et immatériel et une autre étrangère désireuse de s’emparer de nouveaux territoires et à apporter une civilisation se voulant être supérieure à toutes les autres) se greffe celle de la lutte des classes sociales chère aux marxistes.
Les deux communautés ne sont pas (contrairement à la croyance populaire fortement répandue et entretenue) cohérentes. Les deux communautés sont traversées par des courants idéologiques fortement antagonistes. Les élites des deux (trois, si on insère la communauté juive au statut social également ambivalent, intermédiaire entre celui de la population européenne et de la population algérienne, à la fois historiquement proche de la population locale qui l’a accueilli au début du 16ème siècle et le caractère à la fois citadin et la prétention élitique sur laquelle se fonde ses valeurs qui la rapproche des haute sphères de la population européenne) communautés s’accolent dans le cadre de cette politique intégrationniste-assimilationniste et s’éloignent ostensiblement de leurs classes populaires respectives au profil plus révolutionnaire, constamment alimenté par de nouvelles arrivées de colons, l’exode rural et la rurbanisation, ce phénomène social qui regroupe les populations venues de l’intérieur du pays dans la périphéries des cités, éblouies par la modernité, voulant la copier tout en conservant leurs modes de vie antérieurs. Une forme de socialisation que l’on a trouvée en Europe au Moyen Age autour des châteaux-forts, pendant la période ottomane avec les populations algériennes, les janissaires démobilisés et leurs enfants sous les remparts des citadelles (Casbah) et bien plus tard avec les bidonvilles.
Le mouvement sportif algérien (dans son volet indigène), malgré la dénégation et la volonté du mouvement olympique rénové qui aurait souhaité le préserver de la présence des manants (hors aristocratie et apparentés) en le réservant à une élite sociale, économique et culturelle, est éminemment politique et s’inscrit manifestement dans les schémas d’analyses marxistes.
Bien que l’inspiration originelle soit religieuse, la partition de la société en nantis et démunis, en population marquée par la religion et une autre luttant pour la survie, explique certainement la multiplication de clubs sportifs et le partage (dans une localité donnée), sans frontières matérielles réellement définies, d’aires géographiques, de zones d’influence dans un habitat, dans un quartier qui est le plus souvent la vieille ville arabe, la casbah, située au centre névralgique de la cité européenne, faisant nettement apparaitre les strates sociales et idéologiques fondatrices des rivalités historiques entre MCO et ASMO, USMA et MCA, CSC et MOC, etc. Cette distinction n’occulte pas que tous les clubs ont porté la flamme révolutionnaire et ont fourni des milliers de martyrs et de combattants à la guerre de libération.
Ces rivalités entretenues jusqu’à présent plongent leurs racines dans cet humus. Nous ne pouvons oublier de citer (c’est un élément d’analyse à ne pas écarter) la caractéristique de certains de ces clubs (JS Kabylie, US Chaouia) s’étant dotés (ou s’étant vu octroyer) du statut et des attributs de représentants symboliques de régions réputées rebelles à l’autorité centrale dont les  revendications politiques et identitaires sont amplement affirmées.

Ces clivages historiques et sociologiques proposent des éléments d’appréciation sur la perception que nous avons actuellement de la notion de propriété des SSPA.

dimanche 17 avril 2016

Statut des SSPA (4), L’ambiguïté en arrière-plan

L
orsque le mouvement sportif algérien nait, dans les dernières années du 19ème siècle, la population algérienne a été dépouillée de ses possessions, de ses biens de peu de consistance d’ailleurs. Les insurrections avortées l’appauvrissent encore plus. Les expropriations et les sanctions collectives sont érigées en règle. Parallèlement, les propriétés des colons se développent alors que les supplétifs (caïds, bachaghas, chefs de zaouïas) tentent opportunément de se maintenir, en tant que représentants de leurs ouailles auprès des autorités militaires puis civiles. Au prix d’innombrables concessions.
Dans les villes, la petite bourgeoisie n’est pas encore apparue. Les petites échoppes, les petits ateliers dans les ruelles tortueuses des casbahs continuent d’exister comme du temps où les janissaires s’occupaient des activités manuelles auxquelles leurs apprentissages au sein du corps militaire ottoman les destinaient leurs temps de service achevés. Leur descendance (celle des janissaires, des corsaires et de leurs chefs), fruit le plus souvent de mariages mixtes, formait une classe sociale intermédiaire entre la population indigène et la caste dominante qui refusait de les intégrer et les abandonna définitivement après le 5 juillet 1830 lorsque la majorité d’entre eux s’en alla rejoindre Constantinople, Istanbul et Ankara. 
Le mouvement sportif naissant lui aussi est fondé sur les ambigüités du système colonial pris entre les  mécanismes économiques du capitalisme également naissant et en expansion (en Europe) dans la seconde moitié du siècle (grandes propriétés agricoles et industrielles) et les idées socialistes (marxistes, saint-simoniennes, proudhoniennes, bakouniniennes) faisant de l’Algérie un laboratoire en grandeur nature, les tentatives de conversion de la population au christianisme et d’affaiblissement de l’Islam, du pouvoir des chefs religieux et des grands propriétaires autochtones, dont quelques-uns s’unirent pour prendre la tête d’insurrections qui firent trembler (pendant quelques mois) une des armées les plus modernes d’Europe avide de revanche et d’en découdre après la débâcle de 1870. Elles furent réduites dans un bain de sang et au prix de décapitations des chefs (cheikh Aheddad et El Mokrani) et de la déportation de centaines de leurs partisans vers les bagnes de Cayenne alors que concomitamment les mouvements laïcs ou athées accroissaient leurs importances, renforçaient leur présence idéologique dans un contexte politicien tendant à amoindrir l’influence religieuse et la montée de l’antisémitisme (affaire Dreyfus).
Le mouvement sportif algérien (parmi la population autochtone, faut-il préciser) est né dans la mouvance religieuse, ferment de l’esprit de révolte, presque toujours dans les lieux de culte. Alors que la laïcité était le crédo de l’Administration hexagonale et locale, les associations sportives algériennes affichaient leur référence religieuse. A travers leurs dénominations subtile telles que les « Mouloudia »  renvoyant à la commémoration du Mawlid, Mouloud Ennabaoui, naissance du prophète Mohamed, tandis que d’autres revendiquaient explicitement leurs origines en s’appelant « JSM » (Jeunesse sportive musulmane), « ASM » (association sportive musulmane) ou «USM » (union sportive musulmane) suivi du nom de la localité : Mouloudia d’Alger, d’Oran, de Constantine, de Bejaïa ; JSM Bejaïa, Skikda ; ASM Oran ; USM Alger, Sétif, Oran, Annaba.

Le laxisme de l’Administration sur ce point a été compensé – pour empêcher, nous semble-t-il, l’apparition d’un communautarisme sportif qui aurait inévitablement déplacé le conflit colons-colonisés des champs de batailles vers les terrains de sports – par l’obligation d’intégrer dans ses formations des joueurs des autres communautés essentiellement les citoyens français. Comme on peut le supposer et ainsi que le décrivent les récits des contemporains, ce fut un mouvement sportif à deux vitesses avec d’une part les colons et leurs sympathisants et d’autre part les Algériens et les plus défavorisés des immigrants français, Espagnols, Italiens à la recherche de l’Eldorado en terre nord-africaine, sans compter également les nombreux exilés politiques, une population que l’on retrouvera certainement (si l’on se penche sur la question) parmi les Français d’Algérie qui intégrèrent les rangs du PCA et (pendant la guerre de Libération) du FLN. 

samedi 16 avril 2016

Statut des SSPA (3), Un terreau hospitalier et réfractaire

L
e mouvement sportif algérien est dès sa conception un mouvement social révolutionnaire. Sa naissance, dans les limites des frontières d’un territoire colonisé, intervient à la fin du 19ème siècle. Durant la dernière décennie d’un intervalle temporel de plus d’un demi-siècle qui voit se  succéder, quasiment sans interruption, les luttes et les soulèvements populaires contre les armées ayant débarqué à Sidi Ferruch (1830). Une période où se multiplient les expropriations des meilleures terres agricoles, les crimes coloniaux et les escarmouches menées par la population indigène en fonction de considérations (labours, semailles, moissons, récolte des olives, etc.) sur lesquelles les chefs de guerre n’avaient aucune maîtrise.
Cette décennie est aussi celle de  l’ascendant de l’Administration sur le pays avec la mise en œuvre de l’Etat-Civil, enregistrant les mouvements familiaux (naissances, décès, mariages). Un mode d’organisation qui supplante (ici comme là-bas) une organisation sociale s’appuyant sur les structures organiques de deux religions apparentées mais en confrontation ininterrompue depuis un millénaire et demi : Chrétienté et Islam.
C’est en 1898 que serait né l’ancêtre du CS Constantine, le premier club algérien. Cette création intervient alors que s’achève un processus de colonisation militaire et que débute une valorisation intensive de territoires.
La Mitidja, dont on dit (dans l’histoire de la colonisation) qu’elle était en 1830 un vaste marais, aurait été, selon les narrations des visiteurs et des autorités consulaires du Nord de l’Europe, au cours du 18ème siècle, un vaste chantier de mise en valeur des terres engagé sous la direction des aghas et autres raïs.
Dans la poursuite de cette œuvre gigantesque (ayant débuté au 16ème siècle avec l’arrivée massive des Maures dans la région de Blida), il fut fait appel aux forçats (délinquants de droit commun de longue durée) et aux opposants politiques aux régimes despotiques français de la Restauration, du Second Empire et de la révolution de 1870 (Commune de Paris).
La population algérienne présente, du point de vue sociologique, deux spécificités que l’on retrouve dans toutes les sociétés humaines. La première fraction est cosmopolite. Elle l’est bien avant l’arrivée des armées françaises. Elle occupe la bordure côtière depuis que les navires voguent sur les eaux de la mer Méditerranée, depuis que les commerçants Phéniciens et Grecs, Carthaginois et Romains longent les rives de la mer intérieure et ouvrent des comptoirs dans les escales, les ports qui deviendront (d’Est en Ouest) El Kala, Annaba, Skikda, Collo, Jijel Bejaïa, Dellys, Alger, Cherchell, Ténès, Oran, etc.
Plus à l’intérieur des terres, Constantine, capitale  de l’empire numide de Massinissa, rivale ou alliée de Rome et de Carthage selon les circonstances et les alliances contractées par les mariages, puis plus tard les capitales des royaumes berbères (Tlemcen, Tihert, etc.) accueillent tout au long des siècles les colonnes des prosélytes musulmans, la croyance en un Dieu unique qui en est parti, avec les armées libyques de Sheneq 1er , pour élever en terre égyptienne le culte pharaonique d’Aton, précurseur selon Freud du culte hébraïque.
Ce sont ces mêmes cités et les anciennes villes de garnison (Souk-Ahras, Tébessa, Guelma, Sétif, Bouira, Sour El Ghozlane, entre autres) qui abriterons (à l’époque où les marins de la péninsule ibérique se lancent à la conquête du Nouveau Monde) les colonnes de réfugiés (musulmans et juifs) d’Andalousie apportant dans leurs bagages les richesses, le Savoir de l’Age d’Or musulman tandis que de la partie orientale de la Mare Nostrum débarquent les soldats recrutés, enfants achetés ou prisonniers des guerres balkaniques et anatoliennes, embrigadés pour devenir des militaires d’élite (janissaires et corsaires), soldats « retournés » des nouvelles croisades entre les chrétiens et l’Empire ottoman, venus secourir ce qui sera la Régence d’Alger des frères Barberousse et leurs successeurs.
A cette population essentiellement citadine (ou en voie de citadinisation) s’oppose la population rurale, celle qui fut aux premiers rangs de toutes les batailles contre les envahisseurs, refluant dans les contreforts montagneux (Djurdjura, Bibans, Babors, Aurès, Ouarsenis) lorsque le sort des combats est contraire, se repliant en permanence derrière son identité vécue comme un rempart constant  contre les invasions déferlant sur le grenier de l’Europe. Une population autochtone (numide, berbère, amazighe) dont l’irrédentisme, l’esprit rebelle à toute forme d’autorité étrangère fut souligné, par l’historien Charles-André Julien, comme une caractéristique traversant les âges depuis la préhistoire.
C’est sur ce terreau à la fois hospitalier et réfractaire que s’est construit le mouvement sportif algérien.

  

jeudi 14 avril 2016

Statut des SSPA (2) Contrat entre les anges et les démons

D
u point de vue du droit des affaires dont les textes sont regroupés dans le « Code du commerce », la société sportive par actions appartient à ses propriétaires. En  affirmant cela, par cet aphorisme, nous avons tout dit et en même temps nous n’avons rien apporté de nouveau à ce débat qui régulièrement (plus qu’on ne le voudrait) agite l’univers du football.
En stipulant que le nombre d’associés d’une société par actions (Spa) ne peut être inférieur à 7, le code du commerce confirme (si cela devait être car la société est immergée dans le libéralisme économique dans sa version la plus récente de la financiarisation débridée) qu’il s’agit d’un groupement d’associés dont il est précisé qu’ils peuvent être soit des personnes physiques soit des personnes morales sensées (toutes les deux) avoir le statut de commerçant. Le but de ces associés de la Spa est de mutualiser les moyens dont chacun dispose en vue de dégager des bénéfices à partager au prorata des participations détenues dans la société.
La constitution de la SSPA répond aux mêmes critères bien qu’elle incorpore un nouvel associé (par dérogation à la règle générale) qui n’a pas ce statut de commerçant, le club sportif amateur au statut d’association à but non lucratif. La SSPA intègre donc des personnes physiques (des individus) et des personnes morales (sociétés commerciales et associations sportives).
Elle est en cela une « propriété collective » devenant « privée »  puisque le statut des associés qui la constituent fait qu’elles (les SSPA) relèvent majoritairement du secteur privé à l’exception de 3 d’entre elles. Il s’agit des SSPA dont l’actionnaire majoritaire appartient au domaine privé de l’Etat à travers la prise de participation de Sonatrach et de ses filiales (MC Alger, CS Constantine et JS Saoura) qui font qu’elles sont des « propriétés collectives à capitaux majoritairement publics». Une seule SSPA, celle qui s’est formée autour de l’USM Alger, serait celle qui se rapproche le plus d’une « propriété individuelle à capitaux  majoritairement privés».
Nous noterons aussi que le choix de l’Administration de privilégier la SSPA en tant que mode d’organisation du club professionnel n’exclue pas l’option (dans l’optique d’un élargissement de la réflexion) légalement possible de la société sportive à responsabilité limitée (Ssarl) et de l’entreprise unipersonnelle sportive à responsabilité limitée (Eusral), formules sportives de la Sarl et l’Eurl. L’Eurl serait dans le débat qui nous préoccupe un club sportif professionnel privé appartenant à une seule personne, soit la représentation idéale de la « propriété privée individuelle ». Les deux autres formes de personnalités juridiques se voient attribuées le statut de « propriété privée collective ».
Dans une société commerciale, la composition humaine (les actionnaires) est sélectionnée selon des critères qui semblent les plus pertinents à ceux qui la composent et qui attendent « un retour sur investissement », un gain à partir des activités commerciales ou industrielles engagées. L’entrée dans le capital est certes le fruit d’un consensus, d’une entente entre les associés mais avec une demande exprimée par la société.
Il n’en est pas de même pour l’association sportive dont on sait qu’elle ne partage pas des bénéfices (en fait ce ne sont pas des gains au sens habituel du terme ni des plus-values mais des restes-à-dépenser ou des économies réalisées sur les budgets prévisionnels d’opérations conduisant à un résultat positif) qui pourraient clôturer l’exercice comptable. L’association accepte parmi ses membres des personnes physiques (partageant un idéal immatériel) pour qui l’appartenance à l’association est la conclusion d’une démarche administrative matérialisant un acte volontaire exprimant la volonté du membre adhérent à devenir sociétaire.
La SSPA est entente, convention entre le(s) représentant(s), à l’assemblée générale et au conseil d’administration de la société, des sociétaires d’une association qui n’attendent (de prime abord) aucune rétribution aux efforts consentis pour la bonne marche de l’association et les actionnaires en attente d’une augmentation de leurs richesses.  Elle est une alliance entre les anges et les démons.

 Elle est également une entité caméléonesque, un hybride faisant la transition entre le tout public et le tout privé. Un univers qui perd le patrimoine immatériel qui a présidé à sa fondation.

mercredi 13 avril 2016

Statut des SSPA, Le passé illuminant

L
ors d’une récente vente-dédicace, Amine Zaoui, écrivain algérien contemporain d’une notoriété certaine, aurait déclaré, selon une relation de l’évènement partagée sur les réseaux sociaux, qu’une partie numériquement, sociologiquement, géographiquement et idéologiquement très dominante du lectorat algérien (qu’il définit avec pertinence) confondait les genres littéraires, les romans avec la propagande et les textes religieux et que pour ce motif le lecteur lambda se permettait de pérorer et d’assener des vérités foncièrement marquées par l’Histoire.
Il semblerait que la confusion des genres fasse partie des gènes de nos leaders d’opinions, du moins et surtout, ceux qui occupent en permanence les tribunes médiatiques proposées par les titres de la « foot-people-presse» qui, dans les deux langues parlées dans ce pays, envahissent les étals.
Les observateurs du mouvement sportif national ont pu remarquer que, dans les contextes de forte contestation de la gestion des clubs emblématiques des cités représentées dans le football professionnel, les dirigeants en place - confrontés aux crises multiformes rythmant la vie d’un groupe social (difficultés financières, relations internes et/ou externes conflictuelles, déficiences managériales, modes de gouvernances, etc.), exacerbées par les crises de résultats - font appel, dans un mimétisme remarquable avec l’univers de la politique politicienne, au soutien populaire pour atténuer, pour remédier aux effets néfastes que leurs actions antérieures ont pu avoir sur la vie du groupe social qu’est le club.
Depuis que le football algérien porte avec ostentation le costume du professionnalisme, à chacune des situations préjudiciables au bon fonctionnement de la SSPA, les responsables du club, empêtrés dans un turn-over qui impressionnerait (par sa constance et sa répétitivité) le plus placide des experts en gestion des ressources humaines ou des entreprises, scandent, à qui veut bien les entendre, que le club n’est pas une « propriété privée ». De toute évidence, ces orateurs passionnés relèvent de la minorité d’actionnaires et de l’incapacité à faire progresser des idées dans l’esprit de la part dominante de l’actionnariat dans une approche démocratique.
Il s’agit, si l’on s’intéresse de près à la question, d’une minorité agissante inspirant diverses formes d’actions telles que la contestation populaire, les appels à la rébellion, aux regroupements sur les lieux d’entraînement, aux insultes proférées par des supporters manipulés et surexcités à partir des tribunes lors des rencontres, aux tentatives d’agression des joueurs et des membres du staff technique, des entreprises de déstabilisations et de redressements inspirées par l’histoire révolutionnaire, aux sit-in devant les institutions publiques et aux marches des supporters dans les rues de la ville, les réunions d’anciens joueurs et dirigeants porteurs d’une expertise fortifiées par les assemblées des sages ressuscitant les pratiques ancestrales de règlement de conflits…jusqu’à la mise en place d’un comité de sauvegarde renvoyant à un univers historique qui n’est pas le nôtre mais celui de la Révolution française de Robespierre, Danton, Marat et…Guillotin. 
Depuis les temps immémoriaux, le concept de « propriété », en commençant par les territoires de chasse, les terres agricoles et les points d’eau de l’humanité préhistorique, a été au cœur de tous les différends familiaux, d’héritages, des conflits, des guerres tribales ou entre nations. Une longue série de récits qui jalonnent l’Histoire et les mythologies où se bousculent les déplacements de limites, de balises matérialisées par des pierres ou des rochers, un olivier ou un figuier, le cours de ruisselets ou de fleuves, etc. 
Un très long chapelet où la « propriété privée » s’oppose d’abord à la « propriété collective » (celle qui nait de l’indivision, de l’appartenance au clan dans lequel on se reconnait) et ensuite à la « propriété publique », une notion nouvelle, apparue avec les administrations ottomane et française (via le cadastre et les impôts) et la mainmise sur les patrimoine individuel, le patrimoine collectif tribal ou clanique (biens aârch) ou le patrimoine collectif religieux (habous), spoliés par les envahisseurs et dévolus à une entité inexistante (invisible, immatérielle mais concrétisée par les gens d’armes, les garde-champêtres, l’administrateur et le percepteur) dans la conception de l’univers de nos ancêtres, l’Etat dans sa perception beylicale de représentant d’un pouvoir étranger rejeté. Une vision du monde conduisant à la défense de la « propriété privée » et aux tentatives de réappropriation de la « propriété publique », anciennement « propriété collective » (tribale et religieuse). Avec en surimpression les vestiges mémoriels du collectivisme importé de l’Europe marxiste. Mais, qu’en est-il vraiment. Quel est le statut de la SSPA?       


mardi 12 avril 2016

Fonctionnement des SSPA (6), Les enfants prodigues du MSN


L
orsqu’une société sportive par actions (SSPA) est en difficultés financières, ce qui est le cas de quasiment tous les clubs professionnels algériens - dont les dirigeants, pour reprendre une expression populaire « ont les yeux plus gros que le ventre » ou « prennent leurs rêves pour la réalité » - la solution est, en cela nous rejoignons le législateur, l’apport d’argent frais par les associés (et autres « bienfaiteurs ») qui couvrira les salaires, cotisations sociales et impôts impayés, les dettes de fournisseurs (factures d’hôtellerie, de restauration, de transport, d’agences de voyages organisatrices de stages de préparation ou servant d’intermédiaires entre la SSPA et les opérateurs de services touristiques), permettra de surmonter une crise de trésorerie en transitant par le compte « Apports des associés », avant, à moyen et à long terme, d’être convertis (en cas de nécessité impérieuse) en fraction du capital social. Il faut bien faire payer les enfants prodigues du football.
Ces situations sont censées être des dettes à très court terme, payables dans la semaine, le mois, avec exagération dans le courant du trimestre qui suit. Elles sont comparables aux situations dans lesquelles sont immergés les modestes citoyens quand les  fins de mois se font difficiles que les salaires ne sont pas encore virés au compte bancaire ou postal et qu’ils sont dans l’obligation d’avoir recours au « crédit » auprès des commerçants de la rue ou du quartier. Un crédit auquel nos aïeux (le plus souvent campagnards et montagnards), dépendant de l’incertitude climatique, de l’influence sur l’activité agricole en découlant, répugnaient car connaissant l’impact sur les rentrées financières. Dans ce contexte, nos ancêtres se « serraient la ceinture » le temps de franchir la « mauvaise passe » et évitaient de se rendre chez le boucher et de manger de la viande (produit de luxe) qui ne serait pas celle de la bergerie, du poulailler ou du clapier. Un geste de préservation de l’épargne accumulée pour faciliter justement le passage des mauvais jours.
90 jours est la durée maximale du crédit qui pourrait être accordé par un établissement bancaire pour ce type d’opérations commerciales. Mais quelle est la banque qui pourrait accorder à son client un escompte, une avance sur le montant des factures lorsque qu’il de notoriété publique que l’émetteur du chèque n’est pas fiable tout en sachant qu’en arrière-plan se trouve la première entreprise publique nationale ?
L’impécuniosité des SSPA (qui jouent pourtant aux grands seigneurs affichant la libéralité de ceux qui n’ont fourni aucun effort pour se constituer une trésorerie) confine à l’indélicatesse puisqu’ils ne sentent pas concernés par les difficultés de trésorerie que peuvent rencontrer ceux, qui par cet euphémisme qui sied si bien au train de vie mené, sont leurs « partenaires économiques» qu’ils traînent vers la faillite.  
En tant que sociétés commerciales, les SSPA, les clubs sportifs professionnels sont en droit de se rapprocher des établissements bancaires afin de bénéficier des avantages proposés en matière de crédits bancaires pour les opérations engagées en matière de financement du fonctionnement d’abord et d’investissements ensuite.

Nous remarquerons cependant que, même dans le contexte de surliquidités qui prévalaient il y a quelques années, il aurait été véritablement ardu pour un établissement bancaire de leur accorder un crédit. Selon les règles universelles d’octroi de crédits bancaires l’activité du club n’apporte aucune garantie de remboursement. De plus, les mécanismes de couverture des crédits par des garanties réelles (hypothèques et nantissements) sont inapplicables car les clubs ne disposent quasiment pas d’infrastructures (à l’exception des véhicules de transport en commun acquis, lorsqu’ils l’ont été, avec l’aide d’une dotation financière ministérielle. Des véhicules dont la valeur initiale doit être diminuée de l’amortissement). Pas de stade, pas de terrains, pas de siège social, pas de centre de préparation et d’entraînement. Rien qui puisse servir de garanties à présenter aux banquiers puisque ces biens appartiennent à l’Etat et aux collectivités locales qui les ont concédés aux clubs sportifs amateurs qui les ont (éventuellement) rétrocédés aux clubs sportifs professionnels à l’heure de la création de la SSPA.