jeudi 30 mars 2017

Les Algériens et le dopage, La foire aux rumeurs

La proximité en Ethiopie et en Espagne des athlètes d’Amar Benida  et des athlètes de Jama Aden eut une conséquence immédiate : la naissance d’une rumeur qui se propagea à la vitesse de l’éclair. Elle faisait état d’un contrôle positif des deux athlètes. Elle est apparue immédiatement avec la prise de connaissance du raid policier, avec  la médiatisation de l’ « Opération Rial ».
Les deux athlètes (Belferrar et Hathat) étaient dans la ville (nous ne saurions dire s’ils résidaient dans le même hôtel), s’entraînaient sur les mêmes installations sportives, le même stade que les poulains de l’entraîneur anglo-somalien lorsque eut lieu le raid de la police et de la douane catalane. Un raid qui deviendra célèbre sous le nom d’ « Opération Rial » associant la royauté en espagnol et la monnaie des royaumes et émirats du Moyen Orient.
L’opération jumelée des forces de police et de la douane catalane donna, il ne faut pas le nier, de la consistance à un de ces rapprochements dont sont friands le Sato et la forêt de Bouchaoui. Un de ces raccourcis qui font le bonheur et la richesse des débats autour des installations sportives et des lieux de rencontre aux alentours du stade d’entraînement.
Comme le dit si bien l’adage, dans ce milieu, « il n’y a pas de fumée sans feu ». On aura remarqué, à l’instar des petits villages où les commères et les corbeaux foisonnent et espionnent, l’avidité de la communauté athlétique pour toutes les infos (vraies et fausses) susceptibles de déranger, de perturber les ténors de la discipline, ceux qui occupent une belle place dans la hiérarchie fédérale. Ceux qui ont mis la fédération en coupe réglée, exerçant une emprise ayant conduit à de nombreuses dérives mises sous le boisseau.
La rumeur réapparaitra quelques mois plus tard  lorsqu’une nouvelle publiée dans la presse nationale évoqua 5 contrôles positifs parmi les membres de la délégation algérienne ayant participé aux jeux olympiques. Il ne fallut pas longtemps pour que les noms de ces deux athlètes soient à nouveau cités.
Dans un contexte où tout le monde tout  sait tout sur les autres, cette information non vérifiée semblait normale. Pire, l’information est à situer dans un mode pavlovien où l’ébruitement de genre de nouvelles est courant. Elle concourt à ce que la manifestation de ce type de question entraîne une réponse attendue par tous. Manifestement, quand on connait les dessous et les intrigues, la réponse est plus rapide.
Il va sans dire que les deux athlètes et leur entraîneur, depuis le temps, en ont certainement pris l’habitude. En effet, juste après les épreuves du « National Open 2016 » (donc si l’on revisite le calendrier, avant le départ pour les jeux)  les noms de ces deux athlètes furent les seuls à circuler dans le milieu sur une liste de 11 noms prétendument positifs.
Il est à relever qu’au grand jamais ces deux listes n’ont été confirmées par les instances nationales. Aucun athlète algérien n’a été déclaré positif. Depuis 2012 !
Nous devons toutefois affiner notre affirmation en disant qu’en athlétisme, aucun cas ne fut découvert sur le territoire national. Si l’on excepte celui de la spécialiste des haies et de l’heptathlon de Bejaia, Samira Messad qui le fut au « National Open » d’août 2015.
A l’époque, il fut dit que dans cette même compétition, trois athlètes (non identifiés) auraient été pris dans les filets. Deux d’entre eux échappèrent à une sanction. Samira Messad fut la troisième.
L’athlétisme algérien, depuis le début du 21ème, depuis que le dopage est devenu une réalité incontournable, a connu quelques cas de dopage d’athlètes. Ali Saidi Sief, Tayeb Kalloud, Réda Megdoud, Zahra Bouras et Larbi Bouraâda sont les athlètes qui défrayèrent la chronique. Curieusement, ils ont été dépistés à l’étranger. En Europe. Dans des meetings de moyenne importance.

Le quatrième élément du quatuor d’athlètes ayant été en relation avec le groupe d’Aden est Ramzi Abdenouz, un jeune coureur de 800 dont la saison sera interrompue, après le stage, par un accident. Alors que comme nombre de coureurs algériens, il tentait de réaliser les minima de participation aux jeux olympiques en écumant les meetings d’athlétisme français et européens.

mercredi 29 mars 2017

Aden et les Algériens (4), Les athlètes de Benida aux côtés d’Aden

Selon les bravades (publiées sur un compte Facebook aujourd’hui supprimé) d’un des nombreux clones de l’ex-entraîneur de Larbi Bouraâda (suspendu pendant deux années pour usage de Stanolozol), Ahmed Mahour Bacha aurait introduit Amar Benida auprès de Jama Aden. Vrai ou faux ?
La réponse à cette question posée au sujet d’une prétendue relation entre Amar Benida et Jama Aden n’a qu’une importance secondaire. Ce qui doit être relevé c’est que deux des athlètes qu’il entraîne (Amine Belferrar et Yacine Hathat) ont été possiblement au contact des athlètes du groupe Aden à Sulultha (en Ethiopie) puis quelques semaines plus tard à Sabadell (en Catalogne). Sulultha et Sabadell sont deux des trois bases d’entrainement du groupe d’Aden.
Le premier intérêt de cette donnée qui suscite l’interrogation est qu’elle indiqua la proximité entre Mahour Bacha et Benida qui était déjà  sans doute évidente pour les habitués du Sato. Une proximité qui sera dévoilée au grand public pendant « la crise de Rio », à la faveur de l’incident dit de « la voiture officielle » qui fut fortement médiatisé en clôture des jeux.
Un accroc organisationnel monté en épingle, exploité à profusion par Mahour Bacha (pour gêner la CPO et le COA) et dans lequel Amar Benida fit son apparition en étant cité (à son corps défendant) en qualité de témoin des événements (avec d’autres notables de l’athlétisme national) qui se seraient produits à la fin de la première journée du décathlon. Amar Benida fut un des rares membres de la délégation qui, semble-t-il, soutinrent le décathlonien tard dans la nuit brésilienne.
Il a été un témoin qui sut rester discret. A l’inverse de  Mohamed « Moh » Hocine et de Larbi Bouraâda,  premiers concernés par l’incident (car parmi les plus proches d’Ahmed Mahour Bacha  au titre de respectivement d’entraîneur-assistant-accompagnateur à la séance de técarthérapie et d’athlète entraîné), qui démentirent ou atténuèrent les propos (répercutés à n’en plus finir sur les réseaux sociaux) que tint alors le coach principal.
A la fin du stage de Sulultha, pendant qu’Amina Bettiche revenait au pays s’entraîner à Bordj Bou Arreridj, Hathat et Belferrar se rendaient en Catalogne pour optimiser leur préparation. On ne peut affirmer (en l’état actuel des informations en notre possession) qu’ils étaient avec le groupe d’athlètes coachés par Aden. Pourtant, certains indices le laissent penser.
En effet, une liste (rédigée en espagnol et diffusée sur internet) communique la liste des athlètes autorisés à utiliser les installations de Sabadell. Hathat et Belferrar y figuraient en compagnie des athlètes d’Aden et de…… Mohamed Farah. En tête de liste, se trouvaient les deux frères Aden (Jama et Ibrahim, celui qu’aurait connu David Torrence aux Etats Unis et aurait facilité son intégration).
Amar Benida et Amina Bettiche (un temps il avait été envisagé qu’elle rejoigne contractuellement le groupe Aden) étaient absents de cette liste. L’absence de Bettiche est compréhensible. Elle avait privilégié de se préparer (pendant la période du mois de Ramadhan) au pays. Celle de Benida (si elle est vérifiée) donne un sentiment de déjà connu. Quelques semaines plus tôt, l’entraîneur d’Abdelmalek Lahoulou avait rejoint son athlète après quelques jours de stage et l’avait quitté quelques jours plus tôt. Si l’on accorde quelque considération aux commentaires qui pleuvent sur les réseaux sociaux, selon les « amis Facebook de Mahour Bacha », quelques années auparavant, un entraîneur de l’élite nationale se serait rendu en Espagne pendant que son athlète se préparait en Italie.
Nous devons remarquer que la fiabilité de cette liste n’est pas très grande. Il nous faut en effet prendre en compte que Mahour Bacha et Bouraâda se trouvaient alors en pays ibérique. Ils y étaient pour deux raisons.
La première étant de soigner une douleur au dos (contestée après les jeux de Rio par Zahra Bouras) qui empêcha Bouraâda de prendre part aux championnats du monde en salle à Portland (Oregon). Cette raison sera médiatisée un peu plus tard  en étant un épisode de la « crise de Rio » qui permis à Brahmia de dévoiler, à la télévision, au retour de Rio,  la somme de 400 euros que coûta l’injection.

La seconde raison fut la préparation des jeux olympiques à travers un stage dont les préparatifs furent très controversés en raison du montant prévu pour la location d’un moyen de transport et des retards qui en auraient découlés.  

mardi 28 mars 2017

Aden et les Algériens (3), Les Algériens du « second cercle »

Toufik Makhloufi est, jusqu’à l’heure présente, car rien ne prouve le contraire, un athlète « clean ». C’est également (inutile de le nier) un athlète sur lequel pèse de forts soupçons de dopage qui prirent (outre Atlantique) une dimension indescriptible lorsque John Cook (entraîneur de David Torrence avant que ce dernier ne fasse partie du groupe Aden en 2014) a fait part de menaces qu’il aurait reçues de la part d’Aden et de son entourage à la suite des déclarations qu’il a faites après la médaille d’or remportée par Makhloufi aux jeux olympiques de Londres 2012.
Nous devons percevoir que Makhloufi, l’idole nationale, est englué dans un faisceau de présomptions négatives laissant préjuger de ces pratiques hors normes. Ne concluons toutefois pas trop rapidement et attendons la suite des événements dont le retesting de ses fluides vitaux (dont le délai a été porté à 10 ans au lieu de 8 ans précédemment) au cours des années à venir. Un retesting des analyses effectuées lors des championnats du monde et des jeux olympiques a révélé beaucoup de surprises et a confirmé des soupçons conduisant l’IAAF à revoir les podiums de ces compétitions.
D’autres athlètes algériens que Toufik Makhloufi (en petit nombre certes) font également l’objet de suspicion. En particulier ceux qui se sont préparés sous la coupe du coach Aden. Nous leur avons consacré l’année dernière une chronique portant sur les dangers (ne serait-ce que médiatique)  d’une collaboration avec Jama Aden.
Ces athlètes ont certainement fait partie du groupe d’athlètes que Barber a dénommé le « second cercle ». D’après Barber, ce groupe dans le groupe serait un groupe d’athlètes composé d’une sorte d’intermittents, de coureurs ne jouissant pas d’une proximité permanente avec Aden. Des athlètes venant s’entraîner avec lui et repartant dans leurs pays respectifs à la fin de la session avec un programme à respecter.
Des athlètes restant en contact avec l’entraîneur par courriels lorsqu’ils ne sont pas en stage sous sa direction. Cette manière de procéder est décrite dans le récit que fait David Torrence de sa relation avec le groupe Aden. On retrouve également cette approche d’entraînement à distance dans les explications connues sur le cas de l’athlète franco-marocaine Layla Traby qui n’aurait jamais été en contact direct avec l’entraîneur anglo-somalien.
A notre connaissance, quatre athlètes algériens auront pu faire partie du « second cercle ». Nous commencerons par Amina Bettiche. Cette spécialiste du 3 000 mètres steeple était, depuis la fin de la saison 2015, à la recherche d’un entraîneur. Elle venait alors de se séparer d’avec Mohamed Salem qui l’avait emmené à la compétition athlétique la plus importante de la saison, les Championnats du monde de 2015 qui se sont déroulés à Pékin. Elle y a pris part sans toutefois réaliser les objectifs espérés.
Amina Bettiche était soutenue par la fédération et bénéficiait de l’aide de la préparation olympique. Une athlète à qui il fut demandé par la FAA de renouveler les minima de participation aux jeux olympiques et qui, comme tant d’autres (dont Hathat et Belferrar) s’échina à le faire au détriment de sa préparation. Elle est également l’athlète qui ayant bénéficié d’un stage de préparation de  60 jours à Sulultha, sous la coupe d’Aden, (elle était pressentie, selon la presse proche de la fédération, pour rejoindre le groupe au titre d’une convention à signer entre la FAA et l’entraîneur) sollicita et obtint une prolongation de 15 jours accordée  par le COA ainsi que l’affirma son président en pleine «crise de Rio ».
Amina Bettiche répond pleinement aux critères d’appartenance au « second cercle » de Barber. Après ce stage de 75 jours Sulultha, elle revint au pays, pendant le mois de Ramadhan, et s’entraina, selon un plan d’entrainement concocté par Jama Aden, sur les plateaux de moyenne altitude de Bordj Bou Arreridj. Plus tard dans la saison, elle devait rejoindre le camp de base en Scandinavie.

Le quatuor d’athlètes comprenait également un duo composé d’Amine Belferrar et de Yacine Hathat (deux de coureurs de 800 réguliers ces dernières années à 1.45-1.46) qui aussi firent partie de la délégation algérienne ayant participé aux championnats du monde de Pékin. Deux athlètes entraînés par Amar Benida, l’époux et ex-entraîneur de la championne olympique du 1 500 mètres des jeux de Sidney 2000, Nouria Merah contraints de renouveler les minima pour Rio. 

lundi 27 mars 2017

Aden et les Algériens (2), Makhloufi au milieu de la nasse

 Lorsque l’on se plonge dans les événements qui émaillent la décennie en cours de coureur au statut national et international affirmé que vient de vivre Toufik Makhloufi, on remarque que celle-ci a débuté en 2008 avec son intégration au sein du GSP.
Depuis, il  baigne dans un univers dont émanent des remugles, des émanations désagréables. Un univers dans lequel le dopage est présent en permanence. Ne serait-ce qu’en toile de fond. Un arrière-plan qui fait que tout nouveau venu dans les strates les plus élevées des bilans mondiaux est l’objet d’idées préconçues, d’interrogations et de suspicions encouragées par les multiples prises dans les filets de la lutte contre le dopage.
Pour ce qui concerne Makhloufi, il suffit de constater que trois de ses entraineurs ont un lien supposé (et malheureusement inquiétant) avec le dopage pour que la machine à commentaires se mette en marche et fasse des ravages. La notoriété sportive inattendue est sans doute à ce prix.
Amar Brahmia (son entraîneur de 2008 à 2011) a été suspecté de s’y être plongé. Mahour Bacha, qui fut un temps son allié contre les notables de l’époque avant de devenir son adversaire résolu, affirma  que deux des athlètes (non identifiés) qu’il entraîna firent l’objet d’un « no show », qu’il en fut témoin et que, en outre, il en aurait eu entre les mains la preuve revêtant la forme du courrier adressé, par les instances habilitées à le faire, aux auteurs de l’infraction aux règles et procédures du système Adams.
Cette déclaration a une valeur indicative de l’ambiance qui régnait au Sato. Elle est à remettre dans son contexte de luttes intestines au sein des instances sportives nationales (FAA et COA) sur un fond de distribution de privilèges. De conflits menés en sous-main tendant à porter atteinte à l’intégrité morale, à la réputation de l’Autre. Ahmed Mahour Bacha fut l’entraîneur de deux athlètes suspendus en juin 2012 (Zahra Bouras et Larbi Bouraâda) pour utilisation de produits interdits. Une formule allusive et ritualisée qui permet aux instances sportives internationales et nationales d’évoquer le dopage.
La déclaration sur les réseaux sociaux de Mahour Bacha est concomitante à une prise de position de Brahmia (en sa qualité de président de la commission de préparation olympique)  qui l’aurait mené (à titre de revanche ?), au printemps 2016, à semer le trouble dans les projets de Mahour Bacha en épluchant les factures de stages de ses imitateurs et en décortiquant les dossiers de sortie présentés.
Dans une autre déclaration, ce dernier a répliqué, en publiant sur Facebook des documents présentés par Brahmia et des relances de la FAA pour rectifier le tir, qu’il aurait suivi les traces de son aîné sur la piste des voies parallèles à l’éthique sportive et à l’administration des moyens logistique et financier mis à la disposition des athlètes par les pouvoirs publics.
Jama Aden, l’entraîneur qui succéda à Amar Brahmia, est lui aussi suspecté d’être un adepte de ses pratiques répréhensibles, selon la morale sportive. Des preuves flagrantes ont été trouvées dans son environnement immédiat.  Dans les affaires personnelles et professionnelles du kiné du groupe et d’un athlète.
Les athlètes qu’il entraîna et entraîne sont pour l’heure sortis indemnes des analyses subies. Sauf, Hamza Driouch dont le passeport biologique montra des variations inexplicables ayant débuté dès le moment où il quitta les centres de préparations marocains. Ce fait suscita une polémique intéressante que l’on se doit de considérer en se référant aux très nombreux cas de dopage aujourd’hui avérés (listés par l’IAAF) parmi les athlètes qui ont représenté le royaume et leurs compatriotes qui choisirent d’acquérir une autre nationalité sportive et civile (Driouch et Traby en font partie).
Pendant sa période qatarie, Hamza Driouch fut entraîné par un entraîneur marocain avant de revenir, juste avant la sanction, dans le groupe Aden. L’existence d’un système marocain de dopage peut être entrevu au regard des informations liées au statut du centre renommé internationalement de préparation en altitude d’Ifrane qui serait devenu un centre de deal. Un centre de préparation apprécié par Amar Brahmia.

Son troisième entraîneur, celui qui a en charge sa préparation depuis le printemps 2015, Philippe Dupont a marqué l’histoire de l’athlétisme algérien en étant l’entraineur, au tournant du millénaire, de Ali Saidi Sief, vice-champion olympique du 5 000 mètres à Sidney, contrôlé positif aux championnats du monde d’Edmonton (2001). 

dimanche 26 mars 2017

Aden et les Algériens, Plongée dans les cercles de Barber

Selon la description qu’en a donné Kyle Barber, le groupe d’entraînement dirigé par Jama Aden serait structuré en deux cercles. Le premier, le plus important (de son point de vue de chef des investigations de l’IAAF) serait celui dans lequel se trouvent les stars du groupe. Celles qui défrayent la chronique sportive en remportant victoires et titres d’une part et en établissant des performances et/ou des records sortant de l’ordinaire, d’autre part. Ce groupe réduit d’athlètes bénéficierait d’une attention soutenue et particulière d’Aden.
Ce cercle serait inaccessible aux enquêteurs. Il est replié sur lui-même. Comme le serait une huitre. Il serait aussi celui qui connaîtrait l’utilisation de produits illicites (ou suspects) faisant partie de l’arsenal thérapeutique et de préparation sportive en usage dans les milieux en marge de la pratique éthique.
La narration de Torrence (ayant passé quelques mois dans le groupe d’Aden et qui aurait collaboré avec l’IAAF) semble indiquer que ces produits sont utilisés pour la récupération (après l’effort dont il dit qu’il est très important et peu en rapport avec les méthodes majoritairement quantitatives d’entraînement à l’américaine) quand les athlètes sont excessivement fatigués par un entraînement intensif. Torrence aurait fait partie du « second cercle » et il lui aurait été proposé de recevoir des injections de vitamines réparatrices.
Par contre, selon les comptes rendus des services catalans de police sur lesquels se sont appuyées les presses ibérique, américaine, britannique puis française, les produits saisis à Sabadell (flacons d’EPO) démonteraient qu’ils sont un moyen d’augmenter artificiellement les capacités des athlètes.
Le champion olympique du 1 500 des jeux olympiques de Londres 2012, notre compatriote Toufik Makhloufi s’est préparé avec le groupe Aden. Il aurait fait partie du « cercle central ». Du moins, Kyle Barber le laisse supposer. C’est cette position dans le saint des saints et le départ (sans explications connues et/ou médiatisées) du groupe qui l’aurait incité à tenter de le faire parler sans qu’il ne recueille de leurs entretiens des informations probantes (allant dans le sens de ses investigations) sur ce qui se déroule au sein de ce premier cercle.  
Antérieurement, rappelons-nous, Barber avait échoué à convaincre Hamza Driouch à dévoiler ce qu’il connaissait, sur les péripéties ce qui l’avait conduit à présenter un passeport biologique aux résultats erratiques. Notons que l’enfant de Souk Ahras s’est préparé avec le célèbre et controversé coach au cours des mois qui précédèrent sa médaille de vermeil londonienne et que la collaboration avec Aden se serait étalée du printemps 2012 au début de l’automne 2013.
Ainsi que nous avons pu le voir dans nos précédentes chroniques, dans son groupe d’entraînement algérien constitué autour d’Amar Brahmia, alors patron technique du Groupement Sportif des Pétroliers (GSP), club phare de l’athlétisme algérien (cette désignation ayant succédé à celle de Mouloudia d’Alger) parrainé par la compagnie nationale pétrolière, Toufik Makhloufi faisait partie de l’élite mondiale. Il a été le dernier coureur du groupe, du club à avoir couru le 1 500 mètres en moins de 3.32. Avant qu’il ne rejoigne le groupe Aden.
Les rumeurs, les ragots propagés autour du Sato (par des entraîneurs dérangés dans leurs quiétudes et leurs certitudes par les succès du groupe Brahmia) laissent croire que le Mouloudia est un fief du dopage. La rumeur est pourtant démentie par le fait qu’aucun athlète de demi-fond du club n’a été pris dans les mailles du filet pour étayer cette thèse reprise par d’autres entraîneurs et beaucoup d’athlètes dont la caractéristique principale est de ne pas apparaitre en public.
Les leaders successifs du groupe ont fait (ainsi qu’en témoigne les listes de l’AMA disponibles sur le web) l’objet d’une surveillance constante par les instances internationales. Celles-ci, les avaient inclus dans le système Adams. En conséquence de cela, les athlètes du Mouloudia (GSP) suspectés (ou susceptibles d’être tentés) étaient suivis à la trace comme le sont tous les athlètes de niveau mondial attirant l’attention de l’AMA par leurs performances ou la propagation de ces rumeurs insidieuses.

Si Toufik Makhloufi a fait partie du « premier cercle », d’autres athlètes Algériens se sont retrouvés à l’entrainement sous la coupe d’Aden. Ce fut au cours des 6 mois qui précédèrent les Jeux Olympiques de Rio 2016. 

samedi 25 mars 2017

David Torrence (12), Comme dans un film

Aden dispose de plusieurs bases d’entraînement savamment réparties en Afrique et en Europe. La première base d’entrainement du groupe Aden était installée à Sulultha (en Ethiopie). Dans cette Corne de l’Afrique si prodigue en champions de courses à pieds. Une base a acquis une notoriété médiatique pour avoir accueilli, à la même période, sur les mêmes installations sportives de ce centre de préparation en haute altitude,  Hamza Driouch et « Mo » Farah à l’époque où tomba la décision de suspension du premier nommé.

Cette proximité de Farah (déjà suspecté de pratiques illicites et de participation à des expérimentations à la limite de la légalité du simple fait de son appartenance au groupe Salazar) avec les athlètes (plus particulièrement de ce jeune coureur de demi-fond qatari d’origine marocaine qui a fait l’actualité athlétique d’abord par des performances de très haut niveau (3.34) dans la catégorie junior puis pour un passeport biologique anormal lui valant une suspension) du groupe Aden a accru les controverses. Elles  reviennent régulièrement dans les articles de la presse britannique portant sur le thème du dopage au Royaume Uni.

En plus de Sulultha et de Sabadell, le groupe Aden disposait d’une troisième base en Scandinavie utilisée en été, en prévision de l’entame de la campagne des meetings nordiques de notoriété (Oslo, Stockholm, Helsinki).

Une année plus tôt, en juillet 2015, Kyle Barber avait tenté de prendre à défaut Aden et son groupe. Il avait échoué de peu dans son entreprise. Il avait cependant acquis le soutien des autorités espagnoles (agence anti-dopage et les services de police). L’opération ratée avaient permis aux Espagnols d’engager une collaboration avec l’IAAF.

En préparant l’ « Opération Rial », Kyle Barber savait que l’agence anti dopage espagnole et la police espagnole l’appuierait. L’échec de l’opération de juillet 2015 avait montré aux Catalans que les données communiquées par l’IAAF étaient fiables.

La première opération menée en commun avait consisté en l’interception, entre Sabadell et Font Romeu (centre de préparation altitude dans les Pyrénées, montagnes séparant l’Espagne de la France suspecté, au vu de nombreux cas de dopage enregistrés sur place ou au retour d’un stage, d’être une plate-forme de deal de produits interdits) d’une voiture dans laquelle voyageait la championne éthiopienne Genzebe Dibaba.

Les performances de la star du demi-fond défrayaient l’imagination humaine en améliorant les records des athlètes chinoises de « l’armée de Ma ». Les chronos de l’Ethiopienne avaient fait naitre des soupçons qui s’ajoutaient et relançaient les soupçons précédents. Selon son programme de préparation, Dibaba devait rester plusieurs semaines à Font Romeu.

Le véhicule ne fut pas intercepté (comme cela était prévu). Pourtant, finalement, à peine arrivée à Font Romeu, Genzebe Dibaba avait remis le cap sur la base habituelle de Sabadell, dans la banlieue de Barcelonaise, pour poursuivre son programme de préparation à l’issue duquel elle battra un record du monde. Le groupe d’athlètes dont elle faisait partie avait été alerté, dès son arrivée sur les lieux, de la présence de contrôleurs diligentés par l’AMA.

L’opération n’avait pas atteint son objectif consistant à trouver des produits illicites. Malgré cet échec, Kyle Barber préférait rester positif. L’un des aspects qu’il mit en valeur, en tant qu’élément prometteur pour une seconde opération, est que selon ses propos,  « On a déjà collaboré avec eux ». « Eux » signifiant dans le contexte les autorités espagnoles. Pour lui, dorénavant tout serait « plus facile. Ils ont vu qu’on a des bonnes données, des bonnes informations. Les gendarmes et douanes sont prêts à travailler avec nous».

La persévérance est un atout. Près d’une année plus tard, l’ « Opération Rial » permettra de saisir, selon la presse espagnole reprise par la presse américaine puis européenne, des preuves de cette activité que l’on cherchait à prouver.


Selon les rapports des autorités espagnoles il avait été découvert à l’hôtel de Sabadell dans lequel résidaient les athlètes du groupe Aden, dans  le fameux appartement dont avait parlé David Torrence ainsi que dans les bennes à ordures (en dehors des chambres) de l’hôtel, 62 seringues et des flacons d’EPO. Trois différents types d'EPO ! En outre, 320 bouteilles et flacons d'autres médicaments injectables ont été saisis dans l’armoire du kiné du groupe. Les policiers et douaniers s’emparèrent également des documents, des ordinateurs et des téléphones cellulaires.

jeudi 23 mars 2017

David Torrence (11), Projet de démantèlement du groupe Aden

Mais, Kyle Barber (sans qu’il n’ait toute fois exprimé expressément son point de vue sur ce sujet délicat mettant en cause sa hiérarchie) était fort d’une certitude. Son travail d’investigations n’était pas toujours bien accueilli. Y compris paradoxalement au sein de l’IAAF qui l’emploie. Il était même en contradiction avec les actes des responsables de l’association internationale des fédérations d’athlétisme. Pourtant, Kyle Barber se sentait en phase avec la doctrine et avec les discours.

Les réactions des pontes de cette institution sportive mondiale face aux faits de dopage n’ont pas toujours été en symbiose avec les discours sur la lutte contre le dopage. Les agissements des présidents (Lamine Diack), et vice-président (Sébastian Coe dont le rôle semble bien trouble sans avoir été totalement éclairci), du chef de département chargé de la lutte contre le dopage (docteur Gabriel Dolle), des conseillers de l’ancien président de l’IAAF (dont son fils) impliqués dans les scandales ont conduit à la mise en examen de l’ancien président Lamine Diack et de ses proches collaborateurs soupçonnés de corruption en lien avec le dopage.

Quant aux collaborateurs proches du nouveau président Sébastian Coe, ils furent sanctionnés par le comité de discipline pour des manquements à l’éthique en relation avec le dopage en Russie et l’attribution des championnats du monde à Eugène (Oregon). Ces faits  montrent la difficulté à agir rencontrée par le détective en chef.

Dans les investigations sur le groupe Jama Aden, les entraves apparues  étaient également  étroitement liées  à la position et au rôle très positif (en particulier via les résultats obtenus par les athlètes qataris) de Jama Aden auprès de la fédération d’athlétisme du Qatar dont il dirigeait avec succès l’équipe de demi-fond.

La fédération qatarie relevant de la confédération asiatique est active. Comme les autres fédérations sportives d’ailleurs. Elle est l’organisatrice du meeting de Doha, premier rendez-vous athlétique du calendrier de la « Diamond League », se disputant sur le territoire du richissime émirat de la péninsule arabique. Une nation qui accapare l’ensemble des événements sportifs mondiaux en vue d’augmenter sa notoriété dans le concert des nations.

Dans sa quête, pour un athlétisme d’où seraient expurgées les pratiques déviantes, qui par bien des aspects ressemble à celle du Don Quichotte de Miguel de Cervantès luttant contre les moulins à vents, Kyle Barber s’est donné pour noble mission chevaleresque non pas de plaire à sa Dulcinée mais d’éviter que les podiums olympiques de Rio 2016  ne soient squattés par des athlètes du groupe du coach Aden. Un groupe d’entraînement composé essentiellement de coureurs de demi-fond qataris auxquels s’ajoutent ceux d’autres nations désireux de faire progresser leurs athlètes. Ce groupe cosmopolite a recensé, dans le cadre de conventions conclues avec leurs fédérations nationales, des athlètes djiboutiens et algériens. Le groupe Aden est précédé par la suspicion d’utilisation d’aide pharmaceutique.

Au final, Barber atteindra l’objectif qu’il s’était assigné. La razzia de titres et de médailles ne sera pas pour les athlètes d’Aden placé sous contrôle judiciaire et dont le passeport a été retiré. Il ne put donc s’éloigner de Barcelone, suivre ses athlètes dans leurs pérégrinations et leur prodiguer ses précieux conseils.

Les places sur le podium, les médailles reviendront en fin de compte aux athlètes d’Alberto Salazar, l’entraineur américain également controversé, le responsable technique du « Nike Oregon Projet » soutenu sur les plans logistique, scientifique et financier par l’équipementier américain Nike. La rivalité entre les deux groupes d’entrainement portés à bouts de bras par des puissances d’argent donnera la victoire, la suprématie aux JO de Rio au second, à l’entreprise supranationale.

Kyle Barber avait élaboré un plan qui devait conduire à l’affaiblissement du groupe Aden. Dès le début de la saison estivale, dès le mois d’avril 2016, il avait prévu d’abattre le groupe du qatari en Espagne, à Sabadell près de Barcelone. Grâce à Torrence il avait obtenu quelques informations qui s’avéreront précieuses.

Depuis 2013, Aden y avait établi sa deuxième base d’entraînement. En bordure de la mer Méditerranée où au printemps les conditions météorologiques sont propices à la préparation. Un lieu d’entraînement d’où (Barcelone est une grande métropole) il était possible de rayonner dans le Sud du Vieux Continent afin de participer aux grands meetings européens qui y sont organisés majoritairement en début de saison sportive européenne.


mercredi 22 mars 2017

David Torrence (10), Makhloufi approché par Barber

Kyle Barber a tout tenté pour faire entendre raison à Driouch. Il était en particulier porteur d’une réduction de peine pouvant permettre au coureur, banni pendant deux ans des compétitions, de participer aux jeux olympiques de Rio. Une possibilité contenue dans la réglementation de la lutte antidopage mise en place par l’AMA afin de démanteler les réseaux de dopage. Malgré cette offre, Barber n’obtiendra aucune information de la part de Hamza Driouch.

Barber explique ce qui s’apparente à une volte-face de Hamza Driouch (à partir des informations qu’il aurait recueillies) par l’encaissement de 80.000 euros. Une belle somme d’argent considérée, par l’investigateur de l’IAAF, à la fois comme «  un très joli cadeau de départ » et sans doute le prix de son silence.

Dans un second temps (après avoir tenté d’utiliser la faiblesse consécutive aux mauvais moments que vit Driouch), Kyle Barber a tenté d’atteindre son but en se rapprochant du champion olympique 2012 du 1 500, Toufik Makhloufi qui vient de quitter le groupe Aden. Son approche a échoué. Le récit de cette tentative laisse toutefois sceptique. Il l’aurait  « rencontré au Kenya en 2013 juste après qu’il ait quitté Jama Aden qui l’avait amené à la médaille d’or olympique ».

Pour Makhloufi, l’année 2013 pourrait être perçue comme une année sabbatique. Le champion olympique  a connu une saison en demi-teinte qu’il a passé à se soigner et au cours de laquelle il n’enregistra qu’une seule performance digne d’intérêt (un 1 500 couru en 3.36.30), un chrono loin de ses marques précédentes.  

Cette information que fournit Barber est susceptible de modifier la chronologie, la succession des entraîneurs dont il a suivi les programmes d’entrainement. En particulier, celle de la période qui a suivi la séparation d’avec Aden et l’intégration dans le groupe d’athlètes de Dupont.

Une période qui ne serait plus automnale et hivernale (un semestre environ) ainsi que cela est généralement admis mais porterait sur une saison et demie (automne 2013 au printemps 2015). Il faut dire que le renseignement apporté par Barber redonne du crédit à la paternité accordée à un chrono à 3.30 attribuée à Ali Redjimi (son premier entraîneur) venu apporter sa collaboration à Makhloufi  après que ce dernier eut quitté Aden.

 Kyle Barber fut désappointé par sa rencontre avec Makhloufi. Selon la narration de Barber, l’enfant de Souk Ahras se serait limité à parler entraînement et technique. Sur les questions qui lui furent posées à propos du dopage, il se serait contenté à déclarer « qu’il n’avait rien reçu », qu’il n’était pas un adepte des « injections de vitamines ».

Ainsi que nous avons eu à le dire, Makhloufi appartient à la population frontalière avec la Tunisie. Un espace géographique où « le trabendo » (la contrebande) est l’activité des jeunes inactifs pourchassés en permanence par les forces de l’ordre. C’est dans cette ambiance collective (généralisable aux pratiques du commerce informel citadin) qu’a grandi Makhloufi.

L’IAAF forme un système normatif. Elle est une institution qui s’apparente à toutes celles qui restreignent les libertés.

Dans la mémoire collective des habitants de cette région frontalière, passages d’armées colonisatrices depuis les Carthaginois, les Romains, les Byzantins et les Arabes, les institutions administratives sont le reflet des dispositions mises en place par les armées d’occupation dont les soldats de l’armée française (pendant la guerre de libération nationale) laissant derrière eux la ligne frontalière électrifiée, les miradors, les champs de mines anti personnelles, etc., le martyre de la ville frontalière tunisienne, la toute  proche Saket  Sidi Youcef.

Elle  a aussi à l’esprit les institutions algériennes freinant les flux contrebandiers, la liberté de déplacement. On comprendra donc l’importance de son mutisme. Ses réticences à converser librement avec le représentant  de l’IAAF, emprunte à une démarche historiquement présente dans les mémoires, celle des camps de SAS (camps de torture).


Kyle Barber avait contacté une multitude de personnes en relation avec Jama Aden, à un moment ou à un autre. Les Irlandais de la fédération d’athlétisme d’Irlande du Nord qui avait accueilli le groupe de Jama Aden, juste avant les JO de Londres en firent partie. De même que l’ancien coach américain de David Torrence (John Cook) qui lui avait raconté avoir fait l’objet de menaces à la suite de ses déclarations mettant en doute la médaille olympique de Toufik Makhloufi à Londres.

mardi 21 mars 2017

AGE de la FAA (10), (Re)Mobiliser les désabusé

Dans la précédente chronique nous avons vu la dénonciation par Kamel Benmissi de la léthargie qui s’est emparée de la majorité des wilayas. Il aurait pu citer les 15 oasis, ces 15 ligues de wilayas qui, dit-il, « travaillent ». Ces wilayas que l’on peu trouver en lorgnant du côté d’Alger, de Bejaïa, de Bordj Bou Arreridj et de ces quelques autres wilayas ou villes où de petits clubs prospèrent. Des lieux  où le cross-country et les courses de demi-fond survivent par la seule volonté de quelques irréductibles croyant fermement que le développement de l‘athlétisme passe par la promotion de la course à pied.
Il aurait pu également s’interroger sur les quelques ligues continuant à œuvrer au développement de l’athlétisme comme il aurait pu aussi se pencher sur l’état des lieux, sur le présent des wilayas de Constantine, Annaba, Skikda, Guelma, Oran, Tlemcen qui font illusion tout en s’enfonçant année après année, mandat après mandat dans la régression de la pratique.
Le candidat à la présidence ne parle pas du phénomène de récession  accompagné par une antagonique inflation, une démultiplication soutenue du nombre d’associations agréées par les pouvoirs publics sollicitant et épuisant les maigres subventions distribuées par les collectivités locales (communes, fonds de wilaya et directions de la jeunesse et des sports) sans résultats probants. Ni performances sportives ni accompagnement des jeunes.
Dans cette interview, Benmissi reprend également à son compte une antienne qui est celle des compétences marginalisées, quelques fois même ostracisées, celles qui n’ont jamais pu compter sur l’aide fédérale ou qui n’ont jamais eu recours à l’aide de ces produits interdits appartenant apparemment à l’arsenal des entraîneurs cotés: « On a des potentialités, des infrastructures, des talents et des techniciens de haut niveau, on peut faire beaucoup mieux. Il faut travailler, c’est tout ». C’est tout certes. C’est peu et beaucoup en même temps. Travailler !
Tout un programme en direction de ces désabusés (dirigeants de clubs, entraîneurs et même athlètes) qu’il faudra mobiliser à nouveau. Là encore, il n’a pas développé cette idée que l’on devine partager avec tant de techniciens et de dirigeants qui ont connu l’absence de stades et de salles. Ceux qui  présentement constatent avec amertume qu’avec de plus en plus de moyens infrastructurels mis à  disposition là où existèrent les viviers de la discipline  il y a peu d’athlètes pour les utiliser.
Pourtant, un peu partout sur le territoire national, dans les stades, les salles omnisports, sur le bord des routes nationales et départementales, on observe un nombre sans cesse croissant de pratiquants de la course à pied, des joggers du weekend. Une mode et une façon de vivre qui s’étend avec des masters, des vétérans, d’anciens sportifs à la recherche d’une activité sportive ludique ou de personnes à la recherche d’une santé perdue.
Curieusement ce qui est une activité sportive ludique, de loisirs pour les uns, a été transformée (par d’autres appâtés par le gain) en activité lucrative alimentant les caisses personnelles à partir d’un sport servant de repoussoir au lieu d’attirer les jeunes. Il a laissé en suspens les maux qui frappent la discipline. Ils ne faisaient pas l’objet de son interpellation.
Benmissi aurait pu dire également que les encadreurs d’hier, qui se sont dévoués pour prendre en charge les milliers d’écoliers, de collégiens et de lycéens orientés par les enseignants d’EPS croyant aux discours dithyrambiques, se sont laissés débordés par des pratiques pernicieuses alors inconnues.
Le discours sur l’obligation de revenir aux fondamentaux (il soutient habituellement cette thèse) n’est pas propre à Benmissi. Il appartient à tous les entraîneurs anonymes ou à ceux qui ont acquis une petite notoriété avec quelques résultats. Ils le savent, le disent quelquefois et ne peuvent agir. Ils ne sont pas dans le circuit.

Des performances, des talents à modeler mais rapidement étouffés par la machine impitoyable mise en place à la fédération, par les entraîneurs dits de l’élite s’appropriant le produits des efforts des autres, ceux qui ont fait leur réputation dans le milieu sportif en exerçant leur métier sur le dos des autres, comme les coucous s’installant dans le nid des autres volatiles. En fait rien de bien nouveau sous le soleil d’Algérie où la discipline est maintenant la proie d’opportunistes de tous bords. Des professionnels, des experts.

lundi 20 mars 2017

AGE de la FAA (9), Entre Faste et humilité

Toufik Makhloufi, le nouveau leader du demi-fond algérien et mondial est également mis inévitablement au premier rang de la réflexion du candidat exclu de la course au fauteuil de président de la fédération sur incitation des attentes du journaliste. Et au-delà par les lecteurs. L’athlétisme est présentement indissociable de Makhloufi.
Mais, la réflexion sur ce thème, ainsi qu’en témoigne la réponse de Benmissi, est réduite à la plus simple expression. Concentrée, pourrions-nous dire. Elle invite ainsi les lecteurs avertis (qui le voudraient bien) à explorer la possibilité de développer à l’infini l’image retenue dans le milieu  par les  champions olympiques et de se pencher sur la notion précieuse de « travail » semblant avoir été oubliée.
Aujourd’hui, il est loisible d’observer que le triple médaillé olympique, la star des stars sportives nationales, est placé sur un piédestal symbolico-médiatique. Le même (si l’on prend un instant le temps de s’y arrêter) que celui sur lequel furent disposés Hassiba, Noureddine et Nouria et tant d’autres avant (Rahoui, Boutamine) et après eux, (Saidi-Sief, Hammad, Saïd-Guerni). Ce socle est virtuel et si fragile que (ainsi que l’enseigne l’histoire de la discipline) l’on pressent que malheureusement il ne le portera que le temps des victoires et des médailles.
Un podium sociétal, un tapis rouge (qui n’est certes pas celui du festival cinématographique de Cannes) que l’on déroule devant ses pas et qu’on lui retirera de sous les pieds quand il aura fait son temps. Quand les années se seront écoulées inéluctablement. Quand les chronos et les victoires ne seront plus en sa faveur. Bref, quand son auréole aura perdu de son éclat, les regards se détourneront, les micros et les caméras s’éloigneront de son chemin. Makhloufi connaitra l’amère désillusion lorsqu’il constatera qu’il n’a plus d’utilité sociale.
Ses prédécesseurs dans l’histoire olympique algérienne n’ont pas connu la chute vertigineuse qui semble lui être prédestinée. Son statut social présent, l’impression d’ascension sociale rapide  donnée par les conditions de préparation et d’existence temporaire qui lui sont offertes, semblables à celle de l’élite politique et du monde des affaires, sont comme un miroir attirant les alouettes. Un miroir que l’on exhibe à tous les prétendants au statut de privilégié.
Selon Benmissi, « Makhloufi ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt ». La formule est archi-connue dans le landernau. Elle a été ressassée des milliers de fois par tous les amoureux de la discipline athlétique et de la course à pied. Depuis des décennies, depuis les premières victoires internationales et les premiers titres mondiaux de Boulmerka et Morceli. Elle est entendue aux alentours de Bouchaoui, du Sato, à la maison des fédérations et en marge des regroupements et des compétitions.
Une formule qui, en ces temps antérieurs au 21ème siècle, servait à masquer (au cours de ces inlassables polémiques illustrant le désœuvrement des cadres du sport) une densité athlétique qui n’était pas aussi dérisoire (en quantité et en qualité) qu’on le laissait entendre et qu’elle ne l’est aujourd’hui.
Benmissi, comme tant d’autres avant (et avec) lui, en utilisant cette formule qui résonne si bien aux oreilles, n’a malheureusement pas constaté que derrière Makhloufi ne se profile plus la forêt mais le désert.
Un désert quantitatif que Hassiba Boulmerka a dénoncé (il y a déjà quelques saisons sportives) en constatant la diminution (vraie ou illusoire, nous ne saurons le dire en l’absence de données statistiques fiables) de l’effectif des licenciés. Un nombre d’athlètes recensés par les clubs, les ligues et la fédération qui n’auraient atteint en 2015 qu’à grand peine  9 000 licences. Une information communiquée par la FAA pour contredire Hassiba. Bouras (le considéré comme ancien entraîneur de la championne olympique) tenta d’apporter la contradiction à celle qui fut son athlète et devint une opposante à ses idées.

Reconnaissons que Hassiba, prenant à contre-pied les habitudes clubardes oublieux des principes de la Reforme sportive et l’orientation donnée à la discipline par Bouras, avec les athlètes du club qu’elle a créé (avec l’aide de son mentor initial Labed Abboud) et qu’elle finance, représente la moitié (à peu de choses près) de la participation aux compétitions organisées par la ligue de Constantine tout en commençant à s’illustrer en obtenant quelques résultats au niveau national.  

dimanche 19 mars 2017

AGE de la FAA (8), ces champions exclus

Au-delà de Nouria Benida-Merah, que Kamel Benmissi dû réconforter après l’exclusion des champions olympiques de la composante statutaire de l’assemblée générale de la FAA, c’est l’inexistante exemplarité des champions olympiques,  leur place dans la famille de l’athlétisme qui est mise en avant.
Ils sont pourtant peu nombreux. Seulement quatre athlètes ont pu conquérir cette position mondialement  convoitée par des millions d’athlètes dispersés sur la planète. Beaucoup sont appelés, peu sont admis dans ce cénacle réduit: Hassiba Boulmerka, Noureddine Morceli, Nouria Benida-Merah, Toufik Makhloufi.
Quatre champions olympiques (toutes disciplines sportives confondues et curieusement auréolés de la médaille de vermeil dans la seule et unique épreuves du 1 500 mètres), deux hommes et deux femmes (comme un symbole fort dans les palmarès de cette parité présente dans les discours et les textes par l’adjonction d’un alinéa promouvant la représentativité  féminine dans la composante du bureau fédéral mais absente dans la réalité) à rajouter aux 96 membres constituant l’assemblée générale de la FAA où pullulent 68 présidents de ligues (les 48 ligues de wilaya) et de clubs (ceux des 20 meilleurs clubs de la classification nationale établis sur la base de la performance et des résultats aux championnats nationaux).
 Se souvenant qu’il a  vu Nouria Benida-Merah « quitter la salle en pleurs », il note que, au sein d’autres nations athlétiques, ces champions olympiques bénéficient d’une aura, d’une considération sans commune mesure avec celle qui leur est réservée chez nous : « nos voisins de l’Ouest ont placé tous leurs champions au niveau des instances internationales et les nôtres, on ne les invite même pas aux AG. C’est malheureux ».
Nawel El Moutawakel, la championne olympique du 400 mètres haies des jeux olympiques de Los Angeles (1984) occupe des fonctions de premier plan dans l’instance internationale olympique et dans le gotha sportif mondial. Un rôle que l’on ne peut décemment pas comparer à celui de Hassiba, de Noureddine et de Nouria dans les instances athlétiques algériennes. Heureusement que le comité olympique national, rattrapant un peu cet impair, a intégré les médaillés olympiques et leur a confié quelques missions.
Le propos de Kamel Benmissi est excessif. Il dénote cependant que la représentation nationale au sein de l’instance athlétique  est dans la logique mécanique de la versatilité des hommes occupant les fonctions fédérales. Les compétences nationales (aussi modestes soient-elles) reconnues au plan international ne font toujours les affaires de ceux qui sont en poste à la fédération privilégiant les intérêts particuliers à l’intérêt général. Abderrahmane Belaid ancien secrétaire général de la FAA, continue à faire partie de la confédération africaine en tant que membre honorifique. En dépit de l’opposition de la FAA présidée par Bouras. Mais, combien d’autres sont exclus.
L’exemple montré par ces champions – y compris le dernier, Toufik Makhloufi, le double médaillé des jeux olympiques de Rio de Janeiro (2016) que l’on exhibe avec ostentation comme on le fit avec ses prédécesseurs… avant qu’ils ne soient remisés dans les oubliettes dont on ne les sort que pour parader (le temps d’une cérémonie ou d’un événement) aux côtés des nouveaux seigneurs de la discipline – relève (nous devons en convenir)  des arts théâtral et cinématographique. Benmissi ne le dit pas en ces termes. Il le fait comprendre à demi-mots à ceux qui connaissent vraiment les lieux hantés par la médiocrité.
Lorsqu’il évoque la dérive administrative et financière (que l’on a pu percevoir dans la conservation des devises allouées dans le cadre des missions, des stages et des compétitions à l’étranger) qui d’après lui ne revêtirait pas un caractère de gravité de première ou de grande importance, cet aspect est latent et sert à la promotion des cousins et des copains.

C’est en portant un regard se voulant inquisiteur sur la pratique de l’athlétisme qu’il observe ces « autres choses graves » qu’il traduit en deux phrases : « Sur les 48 wilayas du pays, il n’y a pas 15 ligues qui travaillent sérieusement. C’est l’indifférence totale ». Un avis partagé par tous ceux qui sont par tous les temps au contact du terrain et des jeunes. La valeur travail est absente dans la maison athlétisme. Supplantée qu’elle est par les discours et les apparences des apparatchiks accompagnés (ainsi que le disent d’autres aussi acerbes) par l’accaparement des subventions.

samedi 18 mars 2017

AGE de la FAA (7), « On est dans l’illégalité »

La dernière affirmation de Benmissi est comme un coup de tonnerre. Ce manquement aux dispositions qu’est la non-transmission des statuts amendés de la FAA à l’instance supranationale de l’athlétisme qu’est l’IAAF autorise, à en croire Benmissi, celle-ci à  « remettre en cause nos résultats aux JO de Rio » et réduire ainsi  à néant les efforts consentis et les résultats obtenus. Dans une quantification résumée au risque maximal, le plus médiatique aussi, le risque le plus important est la perte des « médailles remportées par Makhloufi ». Son constat est rempli d’amertume : «  On est dans l’illégalité ».
La liberté de ton de Benmissi est connue. Sa fouge (le plus souvent outrancière) interpelle plus que de raison ses auditeurs et ses contradicteurs par des formules-choc.  A travers cette interview de dernière minute (par rapport à l’agenda du processus électoral de la fédération algérienne d’athlétisme) et sachant que son éviction ne fait pas d’elle une mise en valeur programmatique mais revêt plutôt une valeur testamentaire, nous apprenons que depuis l’élection précédente, il n’a pas cessé d’attirer l’attention du ministère en lui adressant plusieurs dossiers qui, selon ses propos, auraient permis (s’ils avaient été pris en considération) de « limiter les dégâts avant d’arriver à ce cirque ».
La mauvaise gestion de la FAA - qu’il a à maintes reprises dénoncée - serait flagrante et se traduirait entre autre par cette absence de réunions de la commission d’évaluation des finances de la fédération. Une commission qui ne se serait pas réunie pendant les quatre années du mandat. Benmissi soutient qu’ « il y a anguille sous roche ». Il soulève ce qu’il prétend être une anomalie de taille. La fédération d’athlétisme a manipulé 93 milliards de centimes pendant son mandat et à la fin elle « laisse une dette de 7,6 milliards de centimes » aux nouveaux élus.
Dans le registre des étrangetés marquant le mandat écoulé, l’ancien président de la FAA donne publiquement des informations sur le « fameux dossier » des championnats du monde de Moscou qui est l’équivalent du monstre du Loch Ness dont on entend souvent parler mais que l’on ne voit jamais. Un dossier évoqué en « off », dont on a beaucoup parlé en coulisses, et sur lequel personne n’a voulu publiquement communiquer.
On apprend donc et enfin d’une source enfin identifiée, par une déclaration médiatique surprenante dans un environnement où l’omerta règne, qu’« on a ramené 2 000 euros de médicaments qui existent sur le marché algérien, et des produits dopants, mais personne n’a été inquiété ». Il confirme également que la conservation de la manne monétaire inemployée, au-delà des délais réglementaires autorisés, fait partie des mœurs depuis au moins l’été 2013.
A ce propos, sa déclaration est révélatrice de la routine qui s’est ancrée dans les pratiques de la fédération d’athlétisme. En révélant que le « chef de la délégation a gardé 6 000 euros au lieu de les rendre à la fédération », il fait de la restitution tardive des frais de mission par le trio Mahour Bacha, Mohamed Hocine et Larbi Bouraâda, neuf mois après l’annulation du déplacement pour les championnats du monde en salle de Portland (Oregon),  un non-événement. Ce qu’il a effectivement été.
Interrogé sur le retrait de la candidature de Nouria Benida-Merah, Kamel Benmissi soutient que la championne olympique du 1 500 « est un symbole » et qu’il avait «  demandé à ce que nos champions olympiques soient intégrés comme membres à part entière de l’assemblée générale », une proposition qui fut acceptée avant qu’elle ne soit reniée et que ces champions ne soient « enlevés de la composante de l’AG ». Une proposition qui daterait donc du début de son mandat inachevé de 1996.  
La suite est cinglante. Benmissi observe, à juste titre selon nous, que «  dans le monde entier, on honore ces symboles et ces héros, sauf chez nous ».

Benmissi, emporté par son élan contestataire et certainement par la directivité de l’interview, a fait abstraction de la représentation des athlètes algériens par le biais de leurs délégués élus statutairement prévus. Il voudrait accorder aux héros de l’athlétisme algérien une place à part dans le giron athlétique. 

jeudi 16 mars 2017

AGE de la FAA (6), Statuts non validés

Dérogeant à la règle et aux déclarations ayant habituellement cours dans les milieux sportifs, Kamel Benmissi, candidat évincé de la course à la présidence de la FAA, note (dans une tentative d’explication de l’interventionnisme du ministère de la jeunesse et des sports dans les affaires des fédérations sportives) que « toutes les fédérations sont prises en charge par l’Etat ». Il trouve également « normal que la tutelle ait un droit de regard sur leur gestion ».
 Il approfondit son analyse (s’appuyant sur la fonction régulatrice du MJS) en remarquant que les autres ressources, celles provenant du sponsoring relèvent du secteur économique public. Ce secteur possède d’importants liens juridiques et financiers avec l’Etat et fait partie intégrante de son patrimoine privé. Son argument tient dans cette phrase : « Même l’argent du sponsoring provient des sociétés publiques et les présidents des fédérations ne peuvent faire ce qu’ils veulent de cette manne financière ».
Nous sommes étonnés par le changement de discours de ceux qui - il y a quelques mois, au cours de la période estivale riche en critiques sur les agissements dits négatifs de la commission de la préparation olympique et du comité olympique algérien ne réagissant pas alors positivement à leurs exigences - sollicitaient l’immixtion des pouvoirs publics, criaient au loup dans la bergerie. Aujourd’hui, ils ne sont pas satisfaits de la remise en cause de la vie sportive nationale, de l’écartement des fonctions fédérales des présidents et bureaux fédéraux faillis que leurs diatribes a provoqué. Les effets produits n’ont pas été ceux recherchés par eux.
Kamel Benmissi a fait partie de ceux (plus nombreux qu’on ne le croit habituellement) qui ont appelé de tous leurs vœux à l’assainissement du mouvement sportif par les pouvoirs publics pour lever la main mise exercée par le clan (dont font partie Amar Bouras et Ahmed Mahour Bacha) en lutte avec le clan Brahmia. Benmissi a toujours fait partie de la « troisième force ».
La vision de Benmissi, telle qu’elle est expliquée dans l’interview accordée, n’est pas celle de l’intervention excessive et permanente du MJS, d’un autoritarisme. Selon lui, cette intervention doit rester « dans la limite de la souveraineté des assemblées générales ».
Elle serait, avons-nous compris, une sorte d’opération de « remise en ordre » rappelant des événements politiques et sociaux vécus à la fin du siècle dernier et pouvant avoir une parenté avec un certain « coup d’Etat scientifique » au sein du Parti Unique. On observe aussi que les actions empruntent beaucoup aux « redressements » des associations nationales à caractère politique et autres groupements sociaux agréés dérangeants.  
On peut comprendre que, dans cette ambiance significative d’un temps peu éloigné, l’ancien président de la FAA (pendant la période de la décennie noire), prétendument démissionnaire mais en en réalité non réélu, dise opportunément qu’il fut la cible des auteurs d’attentats terroristes qui marquèrent l’époque.
Pour Benmissi, le caractère démocratique de l’activité sportive doit être conservé : « Il faut que ce mouvement sportif national évolue, sans laisser bien évidemment les gens faire ce qu’ils veulent, sans aucun contrôle ».
Alors que le clan (apparemment en déroute) menace d’une ingérence des instances internationales dans les affaires de la FAA, Benmissi (qui n’accorde pourtant aucune attention aux déclarations privées des leaders de clan), agissant souvent en électron libre, s’inscrit dans une logique légaliste et protectrice de l’héritage national porteur d’une autre vision de la souveraineté que celle prônée par le souverainisme adaptable aux situations de ses éternels adversaires.
Selon Benmissi, l’athlétisme algérien est confronté à « une période délicate » qui nécessite l’évitement « de problèmes avec les instances internationales ». Appelant à la vigilance, il souligne l’irrespect des règlements et statuts des instances internationales et le laisser-aller qui auraient prévalu au sein de la fédération.

Homme de dossiers, Benmissi apporte une information de grande importance montrant du doigt  certains des actes de mauvaise gestion (cette fois-ci juridique) de l’administration fédérale sortante. Les fameux statuts de la fédération (amendés en janvier 2016 évoqués par les laudateurs de l’ex-président de la FAA) n’auraient aucune valeur juridique auprès des instances supranationales. La déclaration de Benmissi montre la fragilité de l’assise juridique de l’instance athlétique nationale : « La dernière révision des statuts de la FAA n’a pas été soumise à l’IAAF qui peut à tout moment nous suspendre ». 

mercredi 15 mars 2017

AGE de la FAA (5), Dans l’’univers du non-dit


Les témoignages apportés par deux personnalités honorables du mouvement sportif ont le mérite d’éclairer autrement la situation de Kamel Benmissi. Le mandat olympique de ce dernier a été interrompu suite à un énième changement des dispositions législatives et réglementaires.
Nous avons vu trop rapidement que les statuts prétendument adoptés en janvier 2016 ne sont pas disponibles sur (le site obsolète à tous points de vue) de la FAA qui ne propose que ceux de 2013. Après avoir remarqué la courte durée de vie de ces statuts (3 années, 2013-2016) que nous dirons rédigés sur mesure, nous observerons  que la structure fédérale fait appel dans son fonctionnement à l’oralité. Un mode de fonctionnement, favorisant la propagation de rumeurs, emprunté à la tradition sociétale et au fonctionnement des sphères structurantes de la société algérienne moderne.
Dans le milieu, l’impétuosité, le franc-parler  de Benmissi sont connus. Il nous apprend qu’il n’a pas fait recours à la décision de la commission de candidatures qui (explique-t-il) à manquer à ses devoirs. Ce serait par « les rumeurs » qu’il aurait appris le rejet de sa candidature. A ce sujet, il indique que « à la veille de l’assemblée générale (nous devons comprendre l’AGE du 9 mars annulée et reportée à une date non fixée avant de l’être pour le 16 mars), j’ai demandé une notification sur le rejet de ma candidature et on n’a pas pu taper trois lignes durant toute la journée ». Et que les membres de la commission se dispersent.
Kamel Benmissi, comme beaucoup, ne connait pas les raisons réelles du report des élections. A ce sujet, il affirme simplement qu’ « il y a beaucoup de non-dits et de rumeurs » avant d’assener le coup de massue qui se veut décisif : « on murmure qu’il y a un candidat que le Ministère veut imposer ». Encore et toujours ces rumeurs dont quelques-unes pourraient (comme souvent) être malveillantes, servir de ballon-sonde.  
Notre ami l’ « expert » est quant à lui plus affirmatif. Ce candidat (Abdelhakim Dib) porté par des « sous fifres du MJS » est unique, le seul sauvé de la bourrasque, un cadre du MJS, un rescapé de la réglementation sur le cumul des fonctions. Celle qui fut allégrement piétinée pendant des années (et lors des dernières AGE de ligues de wilayas) qui empêcherait (on s’en rend compte seulement maintenant, dans les sphères habituellement manipulatrices, à l’occasion de l’AGE de la fédération échappant à leurs griffes) un cadre administratif ou technique du secteur de postuler à une fonction élective.
C’est un effet boomerang pour le clan au pouvoir depuis des années au sein de la FAA. Sa connivence avec d’autres « sous fifres du MJS » ayant quitté inéluctablement l’espace sectoriel, n’est plus. Il assiste surpris à  l’émergence d’une autre génération de cadres ministériels qui habilement, en utilisant les mêmes moyens que leurs prédécesseurs, auraient su conduire au retrait ou à l’éviction des poulains des clans connus et mettre fin à l’impérialisme népotique initialement existant. Le clan est pris à son propre piège.
Benmissi semble ne pas accorder « beaucoup d’intérêt aux rumeurs » et à ces agitations qui pourtant sont légions dans le microcosme qu’est l’immense complexe olympique du 5 juillet et ses dépendances et la Place du 1er Mai. Ce sont ces rumeurs (reprises par la presse nationale) qui expliquent les retraits de deux candidats (Saïd Ahmim et Yacine Louail), soumis, selon la vox populi sportive, à des pressions faisant appels aux menaces et aux chantages.
Benmissi, détenteur de la première médaille algérienne en cross-country (elle est exposée au musée olympique), qui dit avoir « mal au cœur de voir notre fédération et notre athlétisme partir ainsi en vrille », en a pourtant vu d’autres au cours de son existence consacrée à la promotion de l’athlétisme et à la dénonciation de la mauvaise gestion de la FAA.
A une question sur les déclarations d’inéligibilité d’un grand nombre de présidents de fédération prononcées par la commission d’évaluation  mise sur pied par le MJS et l’interventionnisme du secteur ministériel, il observe que les « gens qui sont éliminés ont des choses à se reprocher et ils n’ont pas d’ailleurs réagi » et, que de son point de vue, « les pouvoirs publics ont amorcé une campagne d’assainissement (qui) est la bienvenue même si elle est quelque peu maladroite ».

AGE de la FAA (4), Benmissi se rebiffe

Le discours du clan de l’ex-président de la fédération est remarquable par ses accents de souverainisme populiste débridé. Ce discours accorde à l’assemblée générale (certes souveraine dans son secteur) une capacité régalienne qui franchit allégrement les limites de la loi nationale.
 L’assemblée générale de l’athlétisme (mais ce travers est à l’œuvre dans les autres fédérations dont la plus solide sur le plan financier qu’est la fédération algérienne de football), selon l’ « expert » en question, est en capacité de légiférer, d’amender, de modifier la loi votée par les élus de la Nation ou les textes en découlant. La FAA est un Etat dans l’Etat. Elle n’agit pas dans le cadre de la loi algérienne mais dans celui de dispositions décidées par et à Delly Ibrahim où se trouve le siège de la fédération.
C’est cet état d’esprit qui pourrait expliquer les nombreuses dérives qui font qu’une assemblée générale ordinaire, forte de conditionnements historiques, approuve un bilan financier qui n’a pas obtenu la certification par le commissaire aux comptes. Celui-ci a émis des réserves. Il a ainsi relevé l’absence de pièces justificatives en rapport avec trois opérations importantes dont l’une (l’organisation des championnats arabes juniors) a été budgétée dans le contrat-programme à hauteur de 2 milliards de centimes. Tout comme il a constaté 7.6 milliards de dettes. Un endettement qui triple celui de la fin du mandat précédent et qui ne surprend pas outre mesure les membres de l’AG.
Pour notre « expert », le second candidat (Kamel Benmissi) déclaré inéligible n’est pas concerné par cette disposition. Il n’en a pas fait cas. Cela est compréhensible. La famille de l’athlétisme sait  que ce candidat et l’ « expert » sont en profond désaccord depuis des décennies.
Ce second candidat écarté de la course à la présidence fédérale estime que son cas ne relève pas de cette disposition réglementaire. Dans un quotidien algérois à diffusion nationale, il affirme n’avoir pas démissionné du poste de président qu’il a occupé au cours de la seconde moitié des années 90.
Nous constaterons que la FAA est abonnée au concours de circonstances. Mohamed Hamouni a démissionné en 1996. Il a été remplacé par Kamel Benmissi. Boualem Rahoui, inspirateur des statuts de janvier 2016, aurait -selon notre « expert » - démissionné en 1997. « 20 ans après » est  le titre de la suite du roman de cape et d’épées « Les trois mousquetaires » d’Alexandre Dumas. Les trois compères voient leurs noms associés à la mélasse de l’athlétisme.
A travers l’interview accordée, on apprend que la commission de candidatures lui reproche « de ne pas avoir achevé mon deuxième mandat » et que cette même commission lui « demande de prouver le contraire ».
Sans y prendre garde, Kamel Benmissi dévoile les pratiques électorales en milieu athlétique. Des pratiques généralisables aux autres sports. Il rappelle que « En 1995, j’avais pris la place de Mohamed Hamouni qui avait démissionné » et explique l’arrière-plan de l’élection présidentielle présente  permettant à « ceux qui l’ont poussé à démissionner  à l’époque » de devenir «  ses mentors aujourd’hui ».
Kamel Benmissi «  pense qu’il y a un amalgame » et regrette que le ministère de la Jeunesse et des Sports ne dispose pas « des archives sur cette époque-là pour tout vérifier ».
Benmissi déclare n’avoir pas introduit de recours mais avoir adressé un courrier au ministre. Ce courrier dit de sensibilisation est complété par deux témoignages : celui du ministre de l’époque (Mohamed Aziz Derouaz) et celui du président de la FAA (Kamel Megnounif) qui lui a succédé.
Selon les explications disponibles dans l’entretien, en 1997, un nouveau décret sur les fédérations sportives a été promulgué et a été suivi d’élections anticipées sur instruction du gouvernement algérien. Benmissi affirme s’être présenté aux élections, n’avoir pas été élu et avoir passé les consignes à son successeur.
Le ministre d’alors écrit que ces élections « ont conduit les nouveaux élus à la fin dudit mandat sans que pour autant une ombre quelconque n’ait entachée officiellement le mandat des bureaux exécutifs sortants ».

Le  successeur de Benmissi « atteste et certifie sur l’honneur » que son élection fait suite « à la promulgation d’un décret exécutif qui a interrompu le mandat olympique par l’organisation d’une assemblée générale élective de mise en conformité ».

lundi 13 mars 2017

AGE de la FAA (3), La FAA en marge de la loi


L’ « expert » en agitation et en polémiques, soutien indéfectible de l’ex-président de la FAA, s’est insurgé, il y a quelques jours, contre un article de confrères habituellement considérés comme étant sensibles aux arguments de la fédération algérienne d’athlétisme dans toutes ses composantes élues depuis 1990.
Son « expertise » (en actions en marge de la légalité) aidant, il fait valoir que l’un des candidats (Mohamed Hamouni), déclaré inéligible (notons qu’il ne l’était pas encore au moment de la parution de l’article, les journalistes et l’ « expert » devançant de facto la décision officielle) n’est pas concerné par la réglementation telle qu’elle est connue, à savoir qu’un président de fédération démissionnaire n’est pas éligible.
Ce commentaire (par ailleurs fort instructif sur la perception du monde du groupe représenté) a été publié sur les réseaux sociaux avant même  que la commission n’ait officiellement fait part de sa décision. Il s’agit donc d’un commentaire à propos d’une information officieuse recueillie auprès d’un membre de cette commission. Certainement un de ces membres qui, quelques jours plus tard, sera raillé pour n’avoir pas obéi à ses injonctions. Ce membre de la commission (membre du bureau fédéral sortant), un membre de ce même bureau fédéral sortant et un entraîneur (également membre du même bureau fédéral, glorifié précédemment lorsqu’il fut candidat à la présidence avant de retirer sa candidature), perçus dans leur proximité avec l’ « expert » et l’ex-président de la FAA feront l’objet de moqueries raillant ce qui est apparentée à une apostasie
Notre « expert », faisant fi des dispositions de l’article 14 du décret exécutif n° 16-153 du 23 mai 2016 fixant les dispositions statutaires relatives aux dirigeants sportifs bénévoles élus, affirme que la commission d’examen des candidatures ne doit pas être tenir compte de la démission avérée de ce candidat.
Parmi les arguments proposés, il rappelle, à ceux qui auraient oublié ou n’auraient pas connaissance des événements de cette période, que la dite démission date de 1995. Il relève également l’inanité d’une telle disposition qui rend les démissionnaires inéligibles « jusqu’à la fin de leurs jours ». Nous ne rapporterons pas le qualificatif attribué à cette disposition.
Cette disposition d’inéligibilité, qui lèserait les droits des candidats à la fonction de président de fédération, ne serait pas à prendre en considération. Selon l’article 23 des statuts de la fédération algérienne d’athlétisme entrés en vigueur, déclare-t-il, à compter du 13 janvier 2016 (notez bien la date et  comparez-là avec la date de promulgation du décret exécutif n°16-153 du 23 mai 2016) et l’article 50 du règlement intérieur de la FAA, le candidat en question n’est nullement concerné.
Toutefois, ce que ne dit pas notre « expert » est que c’est statuts de janvier 2016 ne sont pas disponibles. Ils sont introuvables. Ils n’ont pas été distribués aux membres de la famille déchirée de l’athlétisme. De plus, ils n’ont pas été publiés sur le site officiel de la FAA qui propose seulement ceux de 2013. Ces statuts auxquels il est fait référence sont donc clandestins. Nous devons croire la FAA sur parole et faire appel à celle de ceux qui auraient été présents à cette assemblée générale en espérant qu’ils soient encore membre de l’AG/FAA. Ce qui est majoritairement le cas.
A l’en croire, selon ces nouveaux statuts, la période de « l'inéligibilité pour cause de démission » aurait été limitée à un seul mandat qui serait celui du « mandat suivant la démission ». Il est également relevé que cette proposition de l’ex-président Bouras avait eu pour objectif « de réintroduire dans le jeu, Boualem Rahoui, qui avait vu sa candidature en 2012, rejetée du fait de sa démission en 1997 ».

L’aura et la notoriété du médaillé d’or du 3 000 mètres steeple des Jeux Méditerranéens de 1975 sont mises en exergue pour justifier une modification de la réglementation qui devient à géométrie variable en fonction des intérêts individuels, des ambitions des uns et des autres. L’instabilité des principes juridiques, en adaptation permanente aux mutations politiques et économiques, conduit inexorablement à la cacophonie que connait cette fédération d’athlétisme traversée, comme pour aggraver une situation mouvante, par la multiplication d’égos excessifs et des parti-pris égocentriques.