dimanche 5 août 2018

Ali Saidi-Sief (45), Ali le « brûleur de frontières »


Le jeune Ali Saïdi-Sief semble avoir possédé l’esprit aventureux qui caractérise les adolescents. Surtout les jeunes Algériens dont les horizons sont perçus (à tort ou à raison) bouchés et qui sont mis en situation, par une société de plus en plus fermée imposant des tabous numériquement plus nombreux, de connaître des frustrations diverses.

Cette absence de projections sur un avenir serein, plus ou moins en phase avec les dimensions sociétales et humaines  véhiculées par les chaînes de télévision satellitaires mais également en contradiction profonde  avec les « traditions » nouvellement  ancrées dans une société progressivement transformée par l’importation d’une conception éducationnelle, pédagogique et religieuse amène à faire naître dans les esprits et à concrétiser la pensée de ce qui deviendra le « brûlage des frontières » lorsque les conditions de le faire en toute légalité sont présentes. La migration clandestine dominante présentement n’est pas encore à l’ordre du jour.

Nous avons cru comprendre, dans un des récits du vice-champion olympique du 5 000 mètres racontant ses premiers pas,  qu’Ali Saïdi-Sief a possiblement fait partie de l'équipée ratée de Miloud Abaoub. Etrangement, seul le nom de ce dernier  a été retenu par la petite histoire. Une histoire narrée par les responsables du sport scolaire de l’époque et, en premier lieu, par les responsables de la délégation (désireux vraisemblablement de se dédouaner  vis-à-vis et auprès des autorités qui auraient préféré le black-out médiatique) qui firent que celui-ci fut désigné en tant que fugueur en chef, le porte-flambeau de l’escapade.

Certainement parce qu’il venait de conquérir un renom certain avec le titre de champion du monde scolaire du 3 000 mètres et que l’information, en raison de cette particularité, avait plus de retentissement médiatique. Ce fut l’association du titre de champion du monde et de la fugue collective qui donna un éclat particulier à ces deux informations qui, en d’autres circonstances, seraient passées totalement inaperçues. Le sport scolaire n’était (et n’est toujours) pas aussi porteur, qu’il aurait dû l’être dans la perception du développement de beaucoup d’éducateurs. Il était pourtant, il nous faut le reconnaître, structurant.

Retenons aussi qu’en ce temps-là, l’IAAF n’organisait pas  de championnats du monde U 18. L’IIAF était encore « fédération internationale d’athlétisme amateur » et perdra quelques années plus tard la qualification « amateur » en devenant « fédération internationale des associations d’athlétisme ». Elle entérinait ainsi l’entrée du dollar et de l’euro dans cet univers qui longtemps avait conservé, comme marqueur social et discriminatoire inaltérable de son fonctionnement, l’absence visible et illusoire des récompenses monétaires).

En sa qualité de champion du monde scolaire du 3 000 m, Abaoub était donc un virtuel champion du monde cadet. Ce qui rehausse la participation et le statut initial d’Ali Saïdi-Sief affirmant aujourd’hui qu’il fut champion d’Algérie du 1 500. Sans préciser si ce fut sous la tutelle du sport scolaire ou de la fédération dite civile.

Observons ici l’inversion des trajectoires.  Cette inversion réside dans  la disproportion (ou l’absence, dans la phase initiale de leurs carrières sportives) des moyens accordés à l’évolution régulière des carrières, de leurs  progressions.  

Abaoub et Saïdi-Sief ont toutefois en commun d’être engagés dans le même processus de production de champions qu’a été le binôme sport scolaire et sport civil.

Il reste à élucider, pour ceux qui vécurent, (ou voudraient retracer) cette période, leurs participations à l’instrument de base de la détection des coureurs à pieds que furent, à différents moments de l’histoire : « le cross du Parti », « le cross du Parti et des APC » puis, dans la dernière livrée (à partir de 1990), du « cross de la Jeunesse ».

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