samedi 2 avril 2016

Des entraîneurs (5), Essais de perceptions sociologiques

D
ans les précédentes chroniques de la série « Des entraineurs », nous avons tenté de montrer deux types de transfert de compétences. Le premier s’est appuyé sur les déclarations, d’un « entraineur d’Etat » français, que nous avons outrancièrement schématisé pour décrire un système collectif, institutionnel dans lequel sont en action en premier lieu (dans une approche expérimentale) une collaboration à l’avancée des connaissances et ensuite le partage cognitif en vue de la mise en place de qui serait une école française du 800 mètres.
Nous avons vu également que chez nous le partage des connaissances était restreint et que, dans certaines situations précisées d’associations et d’institutions sportives, il prendrait plutôt la forme d’une contamination ayant donc le caractère informel dans lequel patauge toute la société algérienne et non seulement les associations sportives et leurs membres. Ces clubs (MCA, ASSN, CNMEPS) et des pôles de résultats (Bordj Bou Arreridj pour le demi-fond et le fond,  Bejaïa pour ce qui concernent les épreuves techniques) perpétuent (le contexte les y contraignant) la démarche scholastique des écoles coraniques et des universités de l’âge d’or de l’Islam et du Moyen Age européen prenant la forme d’un cercle de savoir limité à un Maître et à des disciples. Une transmission basée également sur l’oralité et la présence permanente auprès du « cheikh ».
Sans que l’on y prenne garde, nous sommes au cœur d’une dualité entre une société moderne et  l’archaïsme sociétal, une expression utilisée, il y a quelques années, par un homme politique pour stigmatiser une action populaire contestataire qui n’avait pas eu l’heur de lui plaire (et à ses pairs du très riche panel des partis politiques agréés par les pouvoirs publics) car s’appuyant sur la résurgence (selon lui inappropriée) des structures sociétales traditionnelles.
La notion de circulation de la connaissance est également en jeu. Dans les deux situations, c’est le concept de « l’itinérance » qui est central. Dans la première situation, il s’agit de l’itinérance du savoir (et des conférenciers-propagateurs) qui se déplace à la rencontre du public. Dans la seconde, ce sont les apprenants qui vont vers les détenteurs du savoir, vers les mandarins jouissant d’un statut social confortable.
Notons que ce n’est pas la qualité de la connaissance transmise qui est ici en question mais la rapidité de la dissémination cognitive, la nature des supports ainsi que l’étendue du cercle des apprenants. Il est aussi possible de percevoir une autre dimension (plus sociale celle-là) distinguant un comportement de « démocratisation du savoir » d’un autre plus « élitiste » dans le prolongement des principes (sauf qu’ici le savoir supplante les puissances militaire et financière) inscrits dans les  notions de « clans » et de « tribus » regroupés autour d’un leader coopté par un groupe social plus puissant ayant le statut, comme dans l’organisation sociale amazighe (berbère, numide) de fédérations ou de confédérations ou dans celle de l’Occident féodal des seigneuries ayant le rang de principautés, duchés, comtés et baronnies avec une proximité (exempte de hiérarchisation) de ces émirats qui peuplent les discours contemporains arabo-islamistes. On ne peut s’empêcher d’y greffer l’idéologie véhiculée par le concept de « patriarcat », traversant les millénaires, retrouvée sculpté dans le marbre de la table des lois ancestrales où l’âge et le temps de présence dans la fonction détermine la compétence.

La transmission du savoir, dégagée à partir des déclarations de Bruno Gajer, ne se limite pas à ces aspects que nous avons tenté d’éclairer. Nous avons à dessein momentanément écarté celui qui a amorcé l’entretien. La publication d’ouvrages dont l’un est remarquable car il implique un collectif de 12 personnes. 

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