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ous ne pouvions clôturer cette série de chroniques, sans nous arrêter
un instant, sur le destin d’Asmahane Boudjaadar, qui pourrait être future star
du handisport. Une jeune athlète qui vient de battre le record du monde du
lancer de javelot dans sa classe de…..handicap.
Un record parmi tant d’autres que la pléthore, enregistrée dans
d’autres disciplines sportives (athlétisme, natation, cyclisme), semble
quelquefois réduite à sa plus simple expression. Nous aurions presque envie d’écrire,
en usant de cette exagération qui sied à l’humour méditerranéen, que chacun des
concurrents en lice dans une compétition nationale ou internationale handisport pourrait se voir attribuer un titre
ou une médaille ou que le dernier peut battre un record, si ce n’est que s’engager
dans cette voie ce serait railler des sportifs qui, plus que n’importe que
autre sportif, qui mérite tout notre respect.
Par ailleurs, nous dirons ce record qui passera inaperçu ou n’aura pas
l’exposition médiatique méritée par l’exploit, atténue (si cela est possible)
la perte récente d’un grand champion d’handisport. Mohamed Alleg nous ayant
quitté, Asmahane Boudjaadar pourrait être le nouveau fleuron du sport pour
handicapés.
Alors que le commun des mortels et des sportifs éprouvent des
difficultés à assimiler cette notion de classe permettant, selon les situations
et les programmes de compétitions, de différencier ou de rassembler dans une
épreuve, un championnat différentes
formes de handicap (visuels, moteurs, mentaux, etc.), Asmahane a appris à ces
dépens ce qu’il en était réellement.
Asmahane, avec ce record du monde et ses précédents recors nationaux,
continentaux et mondiaux (homologués ou pas, en fonction d’arguties techniques,
réglementaires qui font que souvent on ne comprend pas ce qui se déroule sous
nos yeux), est entrée dans la catégorie des champions et aurait donc quitté
celle des jeunes talents.
En ce qui nous concerne, cette athlète (disqualifiée au lancer du
poids des derniers championnats IPC disputés à Doha, au début de l’hiver
dernier, pour une prétendue faute technique qui serait surtout, si l’on se
tient au récit des événements, soit une marque de l’incompétence des juges soit
une immixtion de membres du comité
d’organisation dérangés par l’intrusion dans le circuit mondial d’une inconnue)
est encore un athlète en devenir.
La carrière sportive d’Asmahane est courte. A peine deux années séparent
ce record de ses débuts au sein de l’Union Sportive Handisport de Constantine, une association sportive
réservée aux personnes aux besoins spécifiques n’ayant que quatre années d’existence,
fondée (et dirigée) par deux anciens entraîneurs d’athlétisme, Abdelmagid
Kahlouche et Rachid Latreche, qui firent (avec Salim Beniou), dans les années
70-80, de Constantine un centre national de développement des quatre lancers.
Dans le club, Asmahane côtoie régulièrement (dans ces conditions loin
d’être optimales qui sont aussi le sort des athlètes valides avec ces empêchements
de lancer sur la pelouse de ce qui est, si l’on en croit la plaque qui surmonte
son entrée, un stade d’athlétisme, devenu lieu d’entraînement des équipes de
football ou d’utiliser la salle de musculation dont l’état de désolation est
connu) deux champions du monde et paralympiques (Nadia Medjmedj et Karim
Bettina) revenus prendre une licence au pays après une escapade sous d’autres
horizons.
En peu de temps, Asmahane est devenue une princesse d’Arabie, une
princesse des milles et une nuit. Tous ses exploits, tous ses échecs (celui des
championnats du monde de Doha) elle les
a réalisés dans des compétitions organisées dans les émirats. En attendant les
jeux olympiques de Rio pour lesquels on nous dit qu’elle serait qualifiée.
Aujourd’hui princesse, Asmahane était hier une Cendrillon, une mal
aimée. Il y a deux ans, elle participa à deux meetings dans ces mêmes pays du
Golfe. Elle en revint avec aussi avec un record du monde dans des circonstances
curieuses.
Elle fit en effet partie d’une délégation hybride. Une partie
(Medjmedj, Bettina et les athlètes de l’équipe nationale) prise en charge par
la fédération et une autre (Asmahane, ses accompagnateurs de l’USHC) qui
s’était saignée pour acheter leurs billets d’avion (sur place, ils avaient pris
en charge par les organisateurs). Le club n’ayant pas les moyens de les prendre
en charge, les membres de la délégation durent avancer le prix d’un billet qui
n’est pas à la portée du premier venu. Asmahane s’était…..«payée », au
sens propre du terme, son record du monde. Si ce n’est pas elle (nous connaissons tous les moyens
financiers des personnes aux besoins spécifiques) ce sont ses parents, ses
amis, ses proches qui croient en elle qui lui ont accordé le prêt que nécessitait SON Projet. Comme le font les
parents de beaucoup sportifs qui souhaitent la réussite de leur progéniture.
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