mardi 13 mars 2018

Ali Saidi Sief (10), Galère pour un "sans-papiers"


La jeune génération doit savoir qu’en 1991, après les championnats du monde de Tokyo, certains entraîneurs, parmi les plus influents de la DTN, s’opposèrent, de toutes leurs forces, à ce qu’Abderrahmane Morceli (ou Amar Brahmia) soient récompensés au même titre qu’Amar Bouras ou Ahmed Mahour Bacha.
Le départ à l’étranger d’Abdi Youcef est encore l’objet de discussions passionnées et passionnantes parmi ceux qui le côtoyèrent. Pour certains, Abdi fut (bien avant les judokas et boxeurs qui défrayèrent les  informations sportives nationales) le premier transfuge, au sens propre du terme. Pour d’autres, son exil s’apparenterait à celui d’Abaoub. Un voyage de reconnaissance des lieux et de préparation (tous frais payés par la fédération) suivi par un aller sans retour.
Pour les premiers, il avait été sélectionné pour participer (en compagnie de Miloud Abaoub et d’Ali Saïdi-Sief) aux championnats du monde junior organisés à Sidney en 1996. Il aurait fait défection pendant la compétition et serait resté au pays des kangourous.
Pour les seconds, il aurait concouru pour l’Algérie, serait revenu avec la délégation puis serait reparti. Un jour sans doute, quand il souhaitera vider entièrement son sac, expliquera-t-il, avec plus de précisions qu’il ne l’a fait, ses motivations et la manière dont il s’y est pris.
A propos du départ de Youcef Abdi, des hypothèses émises laissent à penser qu’il aurait pu subir l’influence de son compatriote (légèrement plus âgé) Nabil Adamou qui lui aurait « préparé » le terrain. Ce sauteur en longueur (PB : 7m 98 lorsqu’il revint lui-même, après les jeux olympiques de Sidney, de son exil en Australie) était déjà sur place et aurait servi de guide à la délégation algérienne. Quoiqu’il en soit les conditions véritables dans lesquelles Youcef Abdi s’est lancé dans l’aventure restent à élucider. Attendons que la parole se libère totalement.
Notons que « Kabylie Times » lui consacra, il y a peu, un court article qui n’apporte rien de bien nouveau si ce n’est quelques confirmations sur les difficultés rencontrées. Le coureur kabyle n’est pas entré dans les détails que nous attendions.
On apprend ainsi qu’il avait voulu partir pour « réussir ma carrière » sportive. Il s’était rendu compte « qu’on ne voulait pas me voir réussir en Algérie ». Un discours que l’on ne connait que trop bien, tant il a été ressassé.
On ne connait presque rien des conditions de vie qui furent les siennes. Ce qu’il en dit se résume en quelques lignes par lesquelles il raconte la première partie (qui parait avoir été la plus difficile) de sa vie australienne. Elles suggèrent qu’elles auraient été très proches de celles par lesquelles sont passés les communautés d’émigrants auxquelles il appartient incontestablement.
Les mots utilisés par Abdi Youcef sont à la fois simples et significatifs. En particulier au moment où il confie que pendant une période de deux années, celles qui suivirent son installation, il a «vraiment galéré ». Il ajouta aussi qu’en certaines circonstances il n’avait pas les moyens de payer une chambre d’hôtel et qu’en conséquence il a dû passer des nuits à la belle étoile.
Abdi Youcef n’a pas été prolixe sur ce thème qui n’était pas la préoccupation première, il faut en convenir, du journaliste ayant recueilli ses propos. On apprend cependant que, au cours de cette période, la pratique de l’athlétisme a été presque reléguée au second plan tout en restant le moteur principal de sa motivation.
Il affirme que, même dans les moments les plus durs, il ne pouvait oublier que l’objectif de son aventure était la réussite sportive. Il reconnait également que ce fut dur « de travailler et m’entraîner » pour une raison toute simple connue des migrants illégaux: « je n’avais pas de papiers ».

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