jeudi 8 mars 2018

Ali Saidi Sief (7), La comète Miloud Abaoub


La volonté de se tenir éloigné des affaires publiques et sportives (une attitude qui a été aussi celle de nombre de ses prédécesseurs dont beaucoup étaient en outre tenus, en considération de leurs appartenance aux corps constitués, par une forme d’obligation de réserve et d’esprit de corps) a souvent été reproché à Morceli par ceux, de toute appartenance idéologique, qui auraient voulu obtenir ne serait-ce qu’un soutien de pure forme, de façade à leurs actions et déclarations.
Bien que répondant favorablement à toutes les sollicitations à participer aux cérémonies protocolaires en lien avec le sport, il se tient donc à l’écart des instances sportives (fédération d’athlétisme, ministère, comité olympique algérien) usant de tous les moyens pour l’attirer dans leurs girons respectifs.
On peut penser que cette attitude participe de sa réserve naturelle et de l’adage populaire du «  le chat échaudé craint l’eau froide » reposant vraisemblablement d’une réaction reposant sur l’épisode des semaines qui suivirent les Jeux Olympiques de Barcelone qui auront fortement marqué à la fois sa mémoire, son esprit et son comportement vis-à-vis des institutions nationales qui n’avaient pas été en mesure de lui apporter le moindre soutien psychologique alors qu’il était à la fois soumis à un lynchage médiatique des nationalistes et loué par les islamistes.
Nous devons admettre que, dans certains esprits, Noureddine Morceli n’était sans doute pas suffisamment Algérien du moins dans la définition de l’identité nationale qui était la leur et qui fonde l’idée que la majorité des Algériens ont de leurs concitoyens dérogeant aux normes érigées par les forces sociales dominantes.
C’est ce conditionnement que l’on pourrait introduire dans un raisonnement conduisant à disqualifier également ces jeunes athlètes qui ont suivi cette voie en invoquant la trahison et vilipendant ensuite les footballeurs (et autres sportifs) franco-algériens sélectionnés en équipe nationale.
Remarquons que ce mode de pensée (« le compter sur soi »), dans une forme très édulcorée et  malheureusement de moins bonne qualité, deviendra prépondérant au cours de la seconde décennie du 3ème millénaire. Il emporta l’univers athlétique dans une vague lorsqu’interviendra le déclin managérial de l’athlétisme et de ses structures qui elles aussi été habituées aux postures d’assistés inscrites dans la permanence de la doxa nationale.  
Dans le sillage de Morceli, quelques années plus tard, après les JO de Barcelone, de jeunes athlètes - ne faisant pas partie des plans sur la comète concoctés dans les bureaux de la fédération ou postulant (à tort ou à raison) qu’ils ne sont pas intégrés dans la réflexion menant au soutien fédéral - aux prises avec les mêmes contraintes dogmatiques s’imposant à l’ensemble des membres de la société algérienne, subjugués par le mirage véhiculé par le jeune prodige ténésien, lorgnèrent vers ces horizons lointains.
Certains de ces jeunes « aventuriers » trouvèrent refuge sur cette île-continent de l’Océanie chère à l’humoriste Mohamed Fellag, abordable seulement par ce « Babor pour l’Australie » illustrant les mirages d’adolescents désespérés  en quête de repères et d’un sort meilleur que celui proposé par la mère-patrie.
Deux faits divers illustrent les équipées des jeunes athlètes désireux d’un ailleurs plus heureux qui ne le fut pas toujours.
Le premier « fugueur » (jeune qui tenta de trouver une échappatoire  aux contraignantes emprises sportives et sociales) fut Miloud Abaoub, un cadet de Batna. Ce coureur, sur le chemin du retour vers le pays, à l’issue des  championnats du monde scolaires d’athlétisme disputés à Chypre (1994), profita de l’escale de Rome, pour prendre, avec un petit groupe d’athlètes tentés par l’aventure, la poudre d’escampette en prenant le train en direction de la France. Rattrapés avant la frontière par les carabiniers, ils furent remis dans l’avion à destination d’Alger.

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