lundi 28 décembre 2015

Mouloudia d’Alger, Sous pression populiste


A
la veille du Mawlid Ennabaoui, quelques supporters du Mouloudia d’Alger, doyen des clubs algériens, club emblématique s’il peut en être, qui dès sa création s’est donné une perspective innovatrice en investissant dans les forces vives populaires d’une nation en attente du recouvrement de sa souveraineté et se plaçant, selon ses partisans, dans une dimension d’opposition au pouvoir colonial en exhibant sa prévalence religieuse, se sont retrouvés pour montrer leur exaspération en perturbant une nouvelle fois une séance d’entraînement. Une réaction qui pour toute personne douée de raison est inexplicable dans un contexte où l’équipe qu’ils chérissent plus que tout, après une longue période de résultats mitigés, revient – suite au changement des staffs directionnel et technique effectués dans la tradition sportive de ces chocs psychologiques destinés selon les stratégies de perpétuation de leadership à permettre le redressement des groupements sociaux en plein désarroi - aux premières loges d’un championnat de Ligue 1 en perpétuel et impossible équilibre et qui plus est dans une période où les écarts ne sont pas déterminants y compris entre ceux détenteurs d’une relative aisance financière et les quémandeurs de subvention .
On ne peut s’empêcher de toute évidence de lier ce débordement au résultat final de la rencontre qui, quelques jours plutôt, avait opposé l’étendard historiquement religieux du mouvement sportif national à son éternel rival local (l’USM Alger) dans un derby entre deux équipes, d’un seul et même quartier, représentatives de strates socio-idéologiques divergentes. Un résultat qui n’a pas l’air de satisfaire les supporters les plus endurcis.
C’est certainement dans l’humus idéologique, sociologique et populiste qu’il faut rechercher les racines d’un moment sur médiatisé d’un club porté à bouts de bras par la presse sportive à sensation à l’affut de ces situations pré révolutionnaires qu’elle suscite et entretient pour le plus grand bonheur de quelques uns dont ses commanditaires.
Les mouvements de foule de ce type au cours desquels des supporters surexcités demandent des comptes à des joueurs et à des entraîneurs livrés à eux mêmes et sans défense devant une foule déchaînée, les sit-in de protestation devant les sièges d’institutions sportives et publiques, les marches populaires sans les rues des villes et les comités de sauvegarde mis en place pour exprimer leurs ras-le-bol et invectiver font partie de ce que l’on pourrait sans hésitation qualifier de cours normal des choses dans une société dépourvue de normes, de ces faits sociaux si courants qu’ils en deviendraient anodins s’ils ne faisaient la « Une », une preuve itérativement répétée de la gestion des associations sportives par la rue. D'autres clubs de même stature populaire (CSC, MOB, MCO, JSK, etc.) vivent des situations identiques, latentes la plupart du temps et expansives et même explosives en ces occasions de repli identitaire, de retour à l’authenticité originelle affichés ostensiblement par les laissés-pour-compte.    
Extraordinairement c’est à l’époque où la gestion des clubs a été confiée (par les pouvoirs publics et la représentation nationale) à des sociétés commerciales, groupements d’un marqueur sociétal d’une certaine aisance financière, que la voix populaire se fait entendre alors qu’elle s’était tue ou faite plus discrète dans un passé récent lorsque la représentation directoriale des associations sportives était entre les mains de bénévoles ou de responsables désignés par les entreprises publiques.
En ces temps nouveaux où les supporters ne devraient être que des admirateurs, confortablement assis dans des tribunes et des gradins, d’un spectacle à la hauteur des prétentions managériales, on se surprend à écouter des déclarations éculées de dirigeants acculés reprenant un discours (aussi agressif que peut l’être la désapprobation populaire) se référant à d’autres segments, à d’autres activités  de la vie sociale.  Une reprise des points de vue de leurs prédécesseurs en poste dans un passé récent, détenteurs d’un pouvoir sans faille, stigmatisant les foules en colère, capricieuses car éternellement bernées par des promesses non tenues.

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