R
|
elater la biographie d’un champion n’est pas chose aisée. Elle l’est
encore plus lorsque celui est encore en activité
et que sa carrière sportive est entachée par des à-côtés peu élogieux comme
peuvent l’être toutes les circonstances liées à la tricherie pharmaceutique.
Pour les athlètes (pratiquants l’athlétisme s’entend), cette mission
s’avère plus ardue compte tenu de la confidentialité de la discipline. En
dehors des grands événements qui mobilisent les médias et qui en ces occasions
ne font pas œuvre pédagogique puisque tournés vers le sensationnel traduit
d’abord en meilleure performance mondiale, en records du monde ou des jeux et
enfin en ces informations croustillantes alimentant les commentaires Facebook
et autres réseaux sociaux.
Raconter en quelques lignes la carrière d’un champion dans les colonnes
de la presse est une suite de facilités scripturales et de raccourcis réduisant
à la limite du possible les résumés proposés par des journalistes généralistes
zappant allégrement les informations intéressant les passionnés. C’est le
travers de nos précédentes chroniques ayant pour objet Mo Farah. L’entraînement
suivi, les différentes périodes, l’apport de chacun des entraineurs dont on ne
connait pas avec précision le début et la fin de la relation avec le champion,
les généralités méthodologiques etc. ne sont pas éclairants alors qu’ils
auraient pu dissiper une partie de la brume qui entoure sa progression de ces dix
dernières années.
Contrairement à ce que l’on a tendance à croire, la suspicion entoure
Mo Farah dès 2010. Une année avant qu’il ne rejoigne (en février 2011) Alberto
Salazar accusé, par les médias britanniques (en particulier the Daily
Mail) dans le sillage des autorités américaines, d’incitation au
dopage, Mo Farah est signalé en « no show » (absent du
lieu où il est sensé se trouver, selon les indications qu’il porte lui-même sur
le système dit Adams de localisation permanente des athlètes d’un certain
niveau).
Quelques semaines plus tard après l’officialisation de leurs relations
(au printemps 2011), Mo Farah fait l’objet d’un second « no
show », d’une absence à un contrôle inopiné des inspecteurs de
l’UKAD (agence britannique antidopage) à son domicile à Londres. Sa justification est
qu’il n’a pas entendu la sonnerie à sa porte.
En ce temps-là, la réglementation prévoyait une suspension maximale de
deux ans pour trois « no shows » en 18 mois. Depuis
code mondial antidopage de 2015, la dite durée a été ramenée à 12 mois. Pour
corser le tout et indiquer l’inquiétude de l’athlète, le Daily Mail
fait état d'un échange de correspondances entre l'athlète (s'inquiétant sur les
conséquences de ces deux absences et d'une éventuelle suspension) et Alberto
Salazar qui lui répond (le 5 mai 2011): « Si tu rates encore un
test, ils vont te pendre ». Une réponse qui laisse à penser qu’Alberto
Salazar est un entraîneur « clean » qui ne plonge pas
dans les affaires de dopage.
Mais, ainsi que nous l’avons écrit à propos d’Aden Jama, la réussite
fait naitre la suspicion. Depuis 2004, son protégé l’Américain Galen Rupp
survole le demi-fond long avec d’abord ses records juniors des USA -3 000 m
(7.49.16), du 5 000 m (13.37.91) et du 10 000 m (28.15.52) - puis sa longue
série ininterrompue (depuis 2009) de titres nationaux. Ses records personnels
(tout comme ceux de Mo Farah, son partenaire d’entraînement) affolent les
commentateurs et inspirent le doute (5
000 m : 12. 58.90, le 2 juin 2012 ; 10 000 m 26. 44.36 le 30 mai
2014 ; 1 500 m : 3. 34.15, le 5 septembre 2014 ; marathon :
2 h 11 min 12 s le 13 février 2016). Le grand écart entre le 1 500 et le
10 000 réalisé en à peine 3 mois sur deux distances ne faisant pas appel
aux mêmes qualités attirent l’attention. Il en est de même pour Farah alignant
deux records d’Europe aussi bien sur 1 500 m (3.28.81 le 19 juillet 2013 que
sur 10 000 (26.46.57 deux années plus tôt le 3 juin 2011) ainsi que des
records personnels incroyables (3 000 m en
7.32.62 le 5 juin 2016; 5 000 12.53.11 le 22 juillet 2011.
Disons également que Mo Farah n'apparaît pas dans l'enquête de l'Usada
(agence antidopage américaine), révélée en début juin 2015 par la BBC, chaîne de
télévision britannique de référence qui cible en revanche son partenaire
d'entraînement (Galen Rupp) et leur entraîneur (Alberto Salazar).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire