mardi 1 septembre 2015

Taoufik Makhloufi, Sachons raison garder


En août 2012, lors des jeux olympiques de Londres, Taoufik Makhloufi avait emporté le peuple algérien dans un univers empli d’une extase quasi orgasmique. Une médaille d’or surprise obtenue à l’issue d’une course qui avait stupéfait les commentateurs et consultants étrangers qui ont vu dans cette victoire inattendue l’effet d’une manipulation pharmaceutique et des manœuvres en coulisses.
Beaucoup, y compris parmi les experts algériens, ne voyaient –avant que ne débute la compétition planétaire -, en cet obscur athlète venu des monts de Souk Ahras, qu’un outsider de second ordre dont on ne pronostiquait au mieux qu’une qualification en finale à condition que toutes les conditions favorables soient réunies et qu’il réalise un exploit.
Les chances de – non pas remporter une médaille- se qualifier pour la finale étaient si réduites que les décideurs de la FAA l’avaient engagé sur deux courses : les 800 et 1500 mètres. Une façon comme une autre pour meubler sa présence à Londres et lui faire acquérir un peu d’expérience de compétitions de haut niveau. On connait la suite. Une qualification inattendue en finale du 1 500 (où tout est possible surtout lorsque la course est tactique) et une course de 800 qui vient malencontreusement (?) s’intercaler comme pour contrecarrer les nouveaux plans sur la comète. Une course dont il prend le départ et qu’il abandonne très rapidement comme le ferait un junior qui ne maitrise pas ce genre de convenances réglementaires. Un imbroglio administratif et médical lui vaut disqualification et réintégration. Tout ce qu’il faut pour se mettre à dos la presse et les autres, tous ceux qui sont avides de ses à-côtés sulfureux.
Taoufik Makhloufi, avant que s’achève la course n’était qu’un bon coureur de 1 500, un parmi tant d’autres qui comme lui courent le 1 500 autour de 3.34, un chrono qui ouvre la porte du véritable niveau international. Rien de bien extraordinaire ! Si ce n’est qu’en cette année 2012, Taoufik a franchi une étape et s’est rapproché des 3.30 et occupe, avant les jeux olympiques, la 6ème place mondiale à 3 secondes du leader Asbel Kiprop - son vainqueur de Pékin (devenu avec cette victoire de Pékin, triple champion du monde de la distance) alors champion olympique (2008) et champion du monde (2011) de la distance – qu’il devancera après une dernière ligne droite fantastique.
Depuis cette victoire époustouflante, la carrière de Taoufik Makhloufi a connu une suite mouvementée dans laquelle la maladie, l’instabilité de l’encadrement technique, les polémiques avec les instances sportives ont été les moments forts et les « grosses » performances absentes. Jusqu’au début de l’été et les trois chronos (étourdissants et porteurs d’espoir de médaille) de Nancy, Paris et Monaco. Un espoir consolidé avec une très belle demi-finale et un chrono (3.35) qui en faisait le favori. Le premier de la course (second de la finale), le Kenyan Alijah Manangoi, moins connu (à peine 22 ans) l’obligeant à puiser dans ses réserves tandis qu’Asbel Kiprop s’autorisait une victoire aisée, sans éclat dans l’autre course qui fut pour lui un footing légèrement rapide (3.42).
Dans une finale qui rassemblait sept des dix meilleurs performers de l’année, les meilleures chances de Taoufik Makhloufi étaient de courir comme à Londres, attendre et (peut être) gagner grâce à un sprint échevelé dans la dernière ligne droite, une tactique incertaine puisque Kiprop (1.43.15) et les autres sont du même niveau (si ce n’est légèrement meilleur sur 800) et certainement mieux armé sur 1 500 (Iguider est régulier à moins de 3.32 depuis 2006 et est juste derrière lui au bilan mondial 2015).
Désirant certainement une victoire avec panache (dans le style Morceli et El Guerroudj), Makhloufi, bien placé dans la ligne droite opposée, a lancé un sprint très long (250 mètres) qui a certes fait souffrir ses adversaires qui l’ont cependant rejoint et dépassé de peu, après qu’il eut épuisé ses ressources physiques. Il avait oublié (ou ne savait pas) que ses principaux adversaires (Kiprop et Iguider) détenaient de meilleures et bonnes références sur 3 000 mètres (respectivement 7.42.32 et 7.34.99).
Quoiqu’il en soit, le résultat de Pékin ne doit pas être perçu comme un échec monumental. Son actuel entraineur n’envisageait-t-il pas seulement la possibilité d’une médaille ? D’ici Rio, l’été prochain (si rien ne perturbe la planification), Philippe Dupont connaitra mieux son athlète, ses forces et faiblesses, ses réactions à ₺sa₺ méthode d’entrainement. L’ ₺échec₺ (si échec, il y a) est le fruit de l’instabilité technique. On ne peut pas impunément passer entre les mains de 4 entraineurs (en trois ans) sans effets négatifs sur la progression.


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