dimanche 8 novembre 2015

Formation de champions, A force de répétitions et conditions de fortune


E
n août 2013, à la veille des championnats  du monde d’athlétisme  de Moscou, dans une interview publiée sur  le site Le monde.fr, l’ancienne athlète puis entraîneur et enfin dirigeante (vice-présidente de la fédération ukrainienne), la spécialiste soviétique du 400 mètres, Olga Bryzgina, triple championne olympique et double championne du monde sur 400 m et 4x400 m entre 1987 et 1991, évoque ses souvenirs  et sa pratique de ce sport dans son Ukraine natale.
La quinquagénaire qu’elle est voue encore, à celui qui fut son entraîneur, un très grand respect que les athlètes algériens ayant un certain niveau de notoriété oublient quelque fois bien qu’il soit possible de le discerner dans ce « cheikh…… »   qui traverse leurs propos. Plus de vingt ans après son dernier titre, celui-ci est encore, dans une situation de communication officielle comme peut l’être une interview, « Monsieur Fedorets » dont elle dit qu’il «  était un excellent coach ».
Elle se souvient également que son entraîneur était un adepte de l’individualisation de l’entraînement qui « concoctait un programme complexe d’exercices adapté à chacun de nous. Il était très pointilleux et on répétait les mouvements jusqu’à ce que l’exécution des gestes soit idéale, notamment les bras, en ce qui me concerne ».
Guy Roux, l’emblématique entraîneur de l’AJ Auxerre, présent à la cérémonie de remise du Soulier d’or algérien qui s’est déroulée il y a quelques jours dans un des grands hôtels d’Alger, s’est penché un bref moment sur la formation en football en racontant une anecdote qui indique que les deux grandes nations sportives des deux grands géopolitiques, que furent et sont la Russie et les Etats Unis, privilégient la répétition inlassable des exercices. Il dit à ce sujet que Tony Parker, une des stars françaises actuelles du basket américain (NBA) lui aurait confié que « chaque matin que Dieu fait, même à Noel, il exécute 300 shoots à trois points » avant de poursuive que « c’est ce qui explique pourquoi il est toujours adroit ».  Une façon aussi très subtile de dire que le talent des grands sportifs est le fruit d’une quantité importante de travail qui par certains aspects confineraient à une sorte de conditionnement ou, pour reprendre une expression très actuelle, un formatage qui mènerait à la perfection technique que l’on accorde à pérorer que c’est la première qualité sportive.
On ne peut pas dire que la déclaration rouxienne soit innovante. En fait, elle très éculée puisque Guy Roux n’a fait que répéter un discours connu de tout un chacun (lecteurs, auditeurs et téléspectateurs) qui aujourd’hui savent que les Zidane, Messi, Ronaldo et Cristiano Ronaldo et tant d’autres légendes sportives furent avant tout des bourreaux de travail.
L’ancien entraîneur d’Auxerre, très peu l’ont perçu, avait en cette rencontre à l’hôtel Aurassi revêtu l’uniforme de l’éducateur, celui du pédagogue qui sait s’adapter à toutes les conditions. Un survêtement que nos techniciens et conseillers du sport ont jeté aux orties avec les principes et valeurs qui l’accompagnent en tous temps et tous lieux.
Cet esprit l’animant encore, alors qu’il a vécu plus des trois quart d’un siècle, lui fait voir la formation du jeune footballeur avec des riens disponibles à qui sait chercher et trouver. Loin du « luxe », des terrains et autres accessoires à profusion qui émaillent les réclamations et récriminations de nos techniciens et dirigeants habitués, malgré les difficultés de tous ordres, à un consumérisme né de la fonctionnarisation de leurs fonctions et des avantages qui s’y rattachent. Nous y rattacherons aussi le corporatisme qui en fut le déclic au crépuscule de la « Réforme sportive de 1976», lorsque les diplômés des instituts de formation des techniciens (et surtout) des cadres du sport mirent au rencart les éducateurs, les moniteurs et autres enseignants d’EPS qui leur livraient des sportifs à perfectionner et à spécialiser mais le plus souvent prêts à monter sur les podiums.

L’affaiblissement du sport scolaire qui a résulté de cette démarche suicidaire donne les résultats que nous connaissons. L’Algérie n’a plus de champions dignes de ce nom. On oublie (ou on ne sait pas) que les cadettes de la JS Ouzellaguen, rivalisant avec les seniors de l’élite nationale de hand-ball féminin, comme tant d’autres sportifs et sportives,  s’entraînaient dans des conditions de fortune, sur un parking souvent, à la tombée de la nuit, à la lumière des réverbères éclairant la route menant à Ifri, haut lieu de la Révolution.         

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