D
|
ans la dérive de l’athlétisme national, les athlètes sont des victimes.
Les victimes d’un système que nous estimons perverti depuis la mise en place du
système libéral mal compris. Celui essentiellement basé sur l’individualisme qui
a trouvé chez nous toutes ses aises pour des envolées anarchisantes sans
retenue. En réalité, un fonctionnement si débridé que même les nations, les
plus marquées par l’idéologie la plus libérale qui soit, auraient de quoi
s’inspirer du fonctionnement de la société algérienne pour faire disparaitre
les Etats-nations.
Une société qui sans transition aucune est passée d’un monde régi par l’action
de l’Etat ultra-régulateur à un autre où domine le même Etat ayant lâché la
bride à « la main invisible » manipulatrice de ses
fondements. Une main (ou plus exactement
des mains) qui plonge dans le labyrinthe de l’informel et fouille dans le
tréfonds. Un mode de gestion qui ne laisse que peu de traces. Une approche que
certains observateurs supposent être celle qui marque une société en voie de
développement, en quête d’une identité entre le « socialisme
spécifique » et le « libéralisme spécifique »,
entre deux conceptions de la société à la sauce algérienne, évoluant en
permanence, dans un mouvement d’essuie-glaces réglé comme du papier à musique,
entre système autoritaire et laisser-aller outrancier.
Lorsque l’on se penche sur le cas de Zahra Bouras (dont nous avons
souvent parlé), on a l’impression qu’elle ne fait partie des athlètes en bute à
tous les obstacles qui peuvent se dresser devant leurs pas et doivent donc les
surmonter en permanence. Une athlète devant laquelle le terrain aurait été
déblayé pour en faire une championne.
Zahra est la fille d’Amar Bouras, l’entraîneur qui hissa Hassiba
Boulmerka sur la première marche du podium des championnats du monde et des
jeux olympiques du 1 500 mètres, cette course que l’on dit reine des
épreuves de demi-fond. Un entraineur passé de l’autre côté de la barrière et qui
actuellement exerce les fonctions de
président de la fédération algérienne d’athlétisme dont le mandat
électif (2012-2016) s’achèvera avec la fin du cycle olympique.
Zahra être née sous de bonnes
augures. Une carrière de championne de haut niveau lui était promise avec ce
père qui est à la fois considéré comme l’entraîneur ayant le plus beau palmarès
du pays et qui, par sa fonction élective, est perçu dans notre société comme un
facilitateur de moyens, le dispensateur ultime. Comment de telles pensées ne
pourraient-elles pas surgir quand toute la société fonctionne sur le mode
népotique.
Contrairement à l’amalgame découlant certainement de la notoriété
acquise par ses résultats sur 800 mètres, Zahra n’est pas (au départ) une
spécialiste de demi-fond. Elle fut d’abord sprinteuse (200 m) avant de monter
sur la distance supérieure (400 m) et obtenir une petite réputation nationale
sur le 800 mètres. Si on devait la classer dans une catégorie, nous dirions
qu’elle relève du modèle cubain, de l’ile célébrissime pour son tabac et son
rhum qui donna à l’athlétisme mondial de magnifiques coureurs de 800 venus du
400. Alberto Juantorena, El Caballo à l’immense foulée et Ana Maria Quirot la
miraculée furent les superbes locomotives emblématiques d’un communisme
résiduel. Il faut dire également qu’Amar Bouras voue un véritable culte pour
l’ile des Caraïbes. Depuis les années 90 qui virent Hassiba Boulmerka s’y
préparer pour ses échéances.
Zahra Bouras fut, au début de sa carrière sportive, confiée aux bons
soins d’Ahmed Mahour Bacha. Un autre entraîneur qui ne laisse pas indifférent.
Beaucoup de choses ont été dites sur ce compagnonnage qui s’acheva brutalement
en 2012.
Elle fut une athlète qui, depuis le milieu de la première décennie du
21ème siècle, se trouva sur
le devant de la scène athlétique nationale, aux premiers rangs du 200 puis du
400 et ensuite du 800, avant de franchir en 2010 la barrière mythique des 2
minutes sur la distance la plus longue. La coureuse était même pressentie par
les pronostiqueurs (très rarement infaillibles de la FAA) pour une place en
finale des jeux olympiques de Londres (2012). Certains la voyait même revenir
du voyage sur les rives de la Tamise avec une médaille. A posteriori, la tenue
du pari était envisageable. Surtout pour
ceux qui connaissaient les dessous de sa préparation.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire