lundi 18 janvier 2016

Football olympique, Les rêves tombés dans le ruisseau

E
n prenant la décision de ne pas considérer la période des Jeux Olympiques, se déroulant à la fin du mois d’août à Rio de Janeiro, comme une date FIFA, c'est-à-dire une période où les clubs professionnels de toute la planète sont dans l’obligation de laisser leurs joueurs à la disposition de leurs sélections nationales, la fédération internationale de football a mis dans un embarras certain la FAF, membre de l’institution faîtière, dont son (et notre) équipe nationale olympique a obtenu le droit d’y prendre part grâce à la qualification acquise sur le terrain .
Les arguments présentés par la FIFA tels que donner aux joueurs professionnels la possibilité de récupérer des efforts fournis pendant la saison qui viendra de s’achever, de régénérer leur force de travail  et ensuite de se préparer en vue de la saison à venir sont évidemment recevables. La FIFA, comme toutes les fédérations internationales, défend son territoire qui couvre aussi bien le football professionnel que le football amateur. La vigueur financière de la FIFA (nous devons nous garder de l’occulter) est fonction de la puissance financière des clubs professionnels, de leurs ambitions, de leurs ressources qui sont essentiellement le produit de leurs engagements et de leurs places dans la hiérarchie des compétitions nationales et internationales dans lesquels ils sont engagés (championnats nationaux et internationaux des clubs, multiples coupes nationales et internationales), qui génèrent des ressources permettant de rivaliser avec leurs rivaux.  
Le tournoi de football des Jeux Olympiques, bien que relevant du point de vue technique de la FIFA, est organisé sous l’égide du CIO (comité international olympique) dont les préoccupations sont tout autres (même si l’aspect financier n’est pas exempt). La référence idéologique de cette compétition planétaire plonge ses racines dans un idéal ancien (paraissant désuet même en ces temps de professionnalisation effrénée des pratiques sportives) porté par des dirigeants européens qui, au 19ème et dans la première moitié du 20ème siècle, de par leurs positions sociales, adeptes d’une pratique sportive ludique, ne se voyaient pas concourir face à des adversaires dont cela aurait été la profession, l’activité principale.  
C’est dans ce contexte socio-économique et philosophique structurant un courant idéologique puissant, ancré dans les sociétés occidentales que la participation EXCEPTIONNELLE des professionnels (toutes disciplines sportives confondues) de plus de 23 ans est admise, un âge qui correspond dans ses sociétés à celui de la fin des études universitaires et à l’entrée dans la vie active. Par ailleurs, dans les pays anglo-saxons,  formant le noyau dur des institutions internationales et de la formulation des chartes qui les régissent, l’éthique et la réglementation sportive scolaire et universitaire interdit formellement le bénéfice d’avantages financiers (contrats de sponsorings, primes de participation et/ou de résultats, rémunérations, etc.) autres que ceux octroyés par les établissements scolaires et universitaires (bourses) dont l’accès gratuit n’est pas la caractéristique première.   
On ne sait si la fédération nationale s’était préparée à cette mesure qui bouleverse des ambitions nées de la qualification récente de la sélection olympique. Mais, il est quasiment certain que - compte tenu du niveau de la compétition nationale élite-  cette qualification, ce voyage à Rio n’était pas dans les plans. La valeur, le potentiel, le talent de ces joueurs nationaux de moins de 23 ans ne sont  pas autant mis en question que l’organisation générale du  sport qui n’incitait pas à une telle perspective jamais entrevue depuis 35 ans et les jeux olympiques de Moscou.
Seule la confusion des genres dans l’esprit des commentateurs et de quelques dirigeants (qui en sont proches ou leur servent de relais) a pu faire croire qu’une part importante de l’équipe nationale aurait pu être du voyage faisant naitre ainsi des rêves de médailles inespérée en d’autres circonstances. Un rêve, né de la politique fédérale de faire appel à de jeunes joueurs formés ailleurs et jouant ailleurs sur lesquels, en de pareilles circonstances, n’a plus de consistance.
Si pour beaucoup de fédérations nationales (européennes, américaines) la problématique ne se pose pas ou très peu, pour la fédération algérienne (et beaucoup de fédérations africaines s’appuyant sur leurs diaspora pour réaliser des résultats), il s’agit de revoir l’ensemble de la philosophie qui sous tend leurs démarches.  Compter sur les joueurs locaux (moins soumis aux contraintes imposées par les clubs professionnels étrangers).

Dans « Les misérables », l’espiègle titi Gavroche est abattu sur des barricades de la Commune de Paris. Agonisant sur le pavé parisien, Victor Hugo lui fait chantonner, dans un dernier souffle, que les rêves sont tombés dans le ruisseau  par la faute à…Rousseau.

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