dimanche 12 juillet 2015

Reflet de la société, Le sport rattrapé par ses démons



Dans le mouvement sportif national, le football est, depuis une époque si lointaine, considéré comme le sport-roi. Il est vrai que ce qualificatif lui a été donné à un moment de l’histoire où la pratique sportive n’était qu’accessoire et qu’il fallait aux commentateurs, analystes et autres chroniqueurs faire croire que le sport avait indubitablement sa place dans la société algérienne. Une société qui, en ces temps immémoriaux, avait pour seule et unique ambition que de vivre et quelquefois de survivre. Un temps, que les plus jeunes n’ont pas vécu, et qui faisait que le port du short, de la cuissette était une incongruité, un signe montrant que son propriétaire n’était pas encore sorti de l’adolescence.
Le sport n’avait pas sa place dans une société qui émergeait à peine des affres de la misère coloniale. Du moins, n’avait pas l’importance, la place incontournable qu’on lui accorde aujourd’hui qui en fait un fait social doté de nombreux attributs dont celui de disposer d’une industrie d’accompagnement et d’un outil médiatique en constant développement.
Le sport algérien se résumant donc en une seule discipline sportive, le football (les autres telles que l’athlétisme, la boxe, le cyclisme, les sports collectifs restant confidentielles) et, auxiliairement, les sports de combat qui ont pris un essor qu’il faudrait sans doute expliquer par autre chose que la profusion des salles destinées à la pratique mercantile des arts martiaux ou la recherche de la voie spirituelle trouvée en d’autres espaces conditionneurs de mode de vie.
Pourtant, le pivot de la pratique sportive algérienne est l’argent. On le constate de plus en plus avec l’inflation des budgets des associations sportives concomitamment, il est vrai, avec l’inflation et les phénomènes monétaires qui marquent l’économie nationale. Le football, sous l’impulsion des instances internationales (FIFA et CAF) frappées par des scandales à répétition, s’est conceptuellement placé dans le cadre de l’économie de marché inadaptée aux instruments juridiques et surtout mentaux nationaux. La libre entreprise est revendiquée certes mais attifée des mécanismes de l’économie des caravansérails, des bazars-lieux de rencontres des caravanes commerçantes, théâtres de contes des milles et une nuit  (₺Ali Baba et les quarante voleurs₺ ou ₺Aladin et la lampe magique₺) sans compter les histoires de pirates (Barbe noire) corsaires (Barberousse) inscrites dans la grande et petite histoire de la course illustrant pillages, mises à sac et butins de navires, cités et contrées entières.
Le monde du football est représentatif de la société dans laquelle il évolue. Dans les tribunes et les gradins, toutes les couches de la société sont assises presque côte à côte. Ici aussi, les signes distinctifs sont apparents. Les emplacements séparent les nantis des autres. L’aristocratie (élite sociale aux multiples visages), ghettoïsée dans les tribunes officielles ou d’honneur, est mise à l’écart de la populace soumise aux intempéries.
Devant les guichets, la débrouille est reine. Les passes droits également. Tout comme l’est le marché informel des tickets offrant aux entrées des stades un spectacle identique à celui des marchés populaires fait de désordres, de bousculades et du respect intransigeant (mais quelquefois négociable en fonction de l’humeur, des tendances et des partenaires) de la règle de l’offre et de la demande parfaitement intériorisée.
La violence fait aussi partie du décor. Avant, pendant et après les rencontres. Elle est l’exutoire des sentiments et ressentiments.  Un véritable épanchement de tous les refoulements retenus, contenus, impossible à exprimer dans une société où les tabous, les restrictions se multiplient à l’infini.

Les résultats négatifs, les échecs répétés, les espoirs inassouvis dans tous les domaines de la vie sociale s’expriment dans le sport qui occupe une place aussi importante que la question du logement, des coupures d’eau ou d’énergie. L’insatisfaction conduit à des débordements, à des atteintes à l’ordre public, à des sit-in devant les stades d’entrainement ou les sièges des clubs, lorsque ce ne sont pas des marches populaires de protestation contre les agissements des dirigeants. Les insatisfaits étant toujours les mêmes, ceux qui attendent beaucoup, quelquefois trop.    

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